OPINION Hamid Enayat – Politologue spécialiste de l’Iran
Le gouvernement belge vient de conclure un accord controversé avec l’Iran pour libérer le cerveau d’un attentat terroriste de grande envergure, déjoué de justesse en 2018 sur le sol européen. Un projet de loi portant sur le transfèrement vers l’Iran de personnes condamnées a été présenté au parlement belge et permettrait notamment le retour à Téhéran d’Assadollah Assadi, un diplomate condamné en mai dernier à 20 ans de réclusion criminelle pour son implication dans le funeste attentat.
Celui-ci visait à faire exploser une puissante bombe dans le rassemblement des opposants iraniens en France, auquel plusieurs personnalités et élus suisses s’étaient joints en guise de solidarité avec la cause de la liberté et la démocratie en Iran. Si le carnage avait réussi, cela aurait été le plus grand attentat terroriste jamais mené en Europe. En mai dernier, l’organisation Amnesty International dénonçait le «chantage» exercé par l’Iran sur la Belgique. «Il est à craindre que les autorités iraniennes gardent en otage et menacent d’exécution Ahmadreza Djalali pour obliger la Belgique et la Suède à leur remettre deux anciens responsables iraniens emprisonnés.»
La Belgique semble avoir cédé au chantage de Téhéran qui a mis la pression en annonçant l’exécution imminente du professeur Djalali, un scientifique irano-suédois et professeur à l’Université libre de Bruxelles. Il avait été arrêté en 2016 à Téhéran alors qu’il effectuait une mission et condamné à mort pour espionnage. Un otage français, Benjamin Brière, arrêté en Iran en mai 2020 lors d’un voyage touristique, a également été accusé d’espionnage et son sort semble également être lié à celui d’Assadi.
Dans une lettre adressée au premier ministre et au ministre de la Justice belges, Mes Georges-Henri Beauthier et Rik Vanreusel, les avocats de l’opposition iranienne, ont protesté contre un «projet funeste» qui permettrait à Assadollah Assadi d’être gracié lors de son retour dans son pays. «Il est certain que, par la suite, la prise en otages d’innocents sera facilitée, puisque les agents des services secrets et des terroristes iraniens seront, en fin de compte, remis à leur gouvernement.»
Pour réaliser le sinistre attentat contre le rassemblement du Conseil national de la résistance iranienne (CNRI) à Villepinte, auquel avaient pris part des dizaines de milliers d’Iraniens et de personnalités politiques des cinq continents, Assadi avait transporté par avion depuis l’Iran le puissant engin explosif dans sa valise diplomatique. Il l’avait ensuite remis à ses complices qui devaient le poser le plus près possible de Maryam Radjavi, la dirigeante du CNRI, une coalition de l’opposition face à la dictature iranienne.
Maryam Radjavi, principale cible des commanditaires de l’attentat, a réagi avec indignation à la décision du gouvernement belge: «Si le projet de loi est adopté, le fascisme religieux au pouvoir en Iran sera bien plus agressif dans ses actes terroristes en Europe et personne en Europe ne connaîtra de sécurité et d’immunité contre les assassins au pouvoir en Iran. Les représentants du peuple belge au parlement doivent rejeter ce projet de loi.»