Iran Focus
Les extraits suivants sont tirés du Rapport de la Commission du 11 septembre.[1″> La Commission a interrogé plus de 1000 personnes dans 10 pays différents et a établi un rapport denquête sans précédent sur les services de renseignements américains. Dans ses conclusions, dont voici un extrait ci-dessous, la Commission donne la preuve dun lien significatif et continu entre Al Qaïda et la République islamique dIran.
LIran et les Tours Khobar 1996
Le 26 juin 1996, un camion piégé a soufflé un complexe résidentiel à Dahran en Arabie Saoudite, tuant dix-neuf militaires américains. En 1997, le Washington Post a déclaré que les membres saoudiens du Hezbollah suspectés davoir commis lattentat étaient associés au Général de Brigade Ahmad Charifi, un commandant du Corps des Gardiens de la révolution.[2″> La Commission du 11 septembre a de plus réaffirmé que des officiers iraniens ont pu jouer un rôle majeur dans lattaque des forces américaines :
En juin 1996, un camion piégé a provoqué une explosion de grande ampleur dans le complexe résidentiel des Tours Khobar à Dahran en Arabie Saoudite, qui abritaient des membres de la U.S. Air Force. Dix-neuf américains ont été tués et 372 autres blessés. Lopération a été menée principalement, et peut-être même exclusivement, par le Hezbollah saoudien, une organisation qui avait reçu le soutien du gouvernement iranien. Alors quil y a de nombreuses preuves dune participation de lIran, il semblerait quAl Qaïda y ait également participé, cependant nous ne savons pas de quelle façon.[3″>
Al Qaïda entraîné par lIran ?
Entre 1991 et 1996, Osama Ben Laden vivait au Soudan où il était protégé par Hassan Abdullah al-Tourabi, le chef du Front islamique national du Soudan, un mouvement islamiste. Daprès la Commission du 11 septembre, de hauts responsables soudanais ont facilité les rencontres entre des agents dAl Qaïda et de hauts responsables iraniens, relation qui sest transformée en entraînement tactique :
Tourabi a cherché à persuader chiites et sunnites de mettre de côté leurs désaccords et de se rallier contre lennemi commun. A la fin de lannée 1991 ou 1992, des négociations au Soudan entre Al Qaïda et des agents iraniens ont débouché sur un accord de coopération consistant à soutenir même sil ne sagissait que dentraînement des actions menées essentiellement contre Israël et contre les Etats-Unis. Peu de temps après, de hauts responsables et entraîneurs dAl Qaïda sont allés en Iran afin de recevoir une formation sur les explosifs. A lautomne 1993, une autre délégation similaire sest rendue dans la Valée de la Bekaa au Liban pour une nouvelle formation en explosifs, mais aussi en espionnage et en sécurité. Ben Laden aurait manifesté un intérêt particulier pour lutilisation des camions piégés, comme celui qui avait tué 241 Marines américains au Liban en 1983. Le lien entre Al Qaïda et lIran a démontré que les différends entre sunnites et chiites ne représentaient pas une barrière insurmontable à une coopération pour des opérations terroristes. [4″>
LIran a-t-elle aidé au passage des terroristes ?
En 1996, après que les Talibans se soient emparés du pouvoir, Osama Ben Laden sest installé en Afghanistan où il a monté un certain nombre de camps dentraînement terroristes. Lentraînement dAl Qaïda a attiré un flot continu de jeunes islamistes, dont beaucoup transitaient par lIran. Alors que, dordinaire, la police des frontières vise les passeports, elle faisait une exception pour beaucoup de terroristes dAl Qaïda. La Commission du 11 septembre explique comment cela a facilité les opérations dAl Qaïda :
Certains membres dAl Qaïda étaient chargés dorganiser des systèmes de collecte de passeports afin dassurer une circulation constante de documents frauduleux. A cette fin, Al Qaïda a demandé aux djihadistes de remettre leur passeport avant de se rendre au front en Afghanistan. Sils étaient tués, leurs passeports étaient recyclés puis réutilisés. Le stage de mission dintervention apprenait aux agents dAl Qaïda à contrefaire des documents. Y étaient enseignées certaines méthodes de transformation de passeports, telles que le remplacement de photos, leffacement et lajout de cachets. Des manuels expliquant la technique de « nettoyage » des visas auraient circulé entre les agents. Mohammed Atta [un auteur du détournement du 11 septembre »> et Zakariya Essabar [un membre dAl Qaïda à qui le visa américain a été refusé, lempêchant de participer aux détournements du 11 septembre »> auraient été formés au maquillage des passeports. Cette formation avait deux objectifs : développer une capacité institutionnelle pour la contrefaçon de documents et permettre aux agents de se mettre à jour, si nécessaire, dans ce domaine. Tout le monde sait, par exemple, que lorsquun Saoudien voyage en Afghanistan via le Pakistan, lors de son retour en Arabie Saoudite, si son passeport porte un cachet pakistanais il lui sera confisqué. Ainsi, soit les agents effaçaient les visas des passeports, soit passaient par lIran, qui napposait pas de visas directement sur les passeports.[5″>
Le soutien de lIran aux terroristes du 11 septembre
LIran a continué de réaffirmer son soutien à Al Qaïda, alors même que le gouvernement Clinton cherchait à tendre le rameau dolivier à la République Islamique.[6″> La Commission du 11 septembre a décrit dans le détail lassistance soutenue de lIran à Al Qaïda et a recommandé au gouvernement américain de mener de plus amples investigations sur les liens entre lIran et Al Qaïda :
Pendant leur séjour au Soudan, les chefs dAl Qaïda ont maintenu des contacts avec lIran et avec le Hezbollah, lorganisation terroriste mondiale soutenue par lIran et basée principalement dans le sud du Liban et à Beyrouth. Les membres dAl Qaïda ont reçu conseils et entraînement de la part du Hezbollah. Les services de renseignements font part de la persistance des contacts entre les responsables iraniens de la sécurité et les grandes figures dAl Qaïda après le retour de Ben Laden en Afghanistan. Khallad [Ben Attash, un haut responsable dAl Qaïda [7″> »> a déclaré que lIran sétait efforcée de renforcer ses liens avec Al Qaïda après lattentat doctobre 2000 contre lUSS Cole, mais quil avait essuyé un refus parce que Ben Laden ne voulait pas abandonner ses partisans en Arabie Saoudite. Khallad et dautres détenus ont décrit la volonté des responsables iraniens de faciliter le transit des membres dAl Qaïda par lIran lors de leur voyage en provenance et à destination dAfghanistan. Par exemple, les contrôleurs iraniens à la frontière auraient reçu lordre de ne pas apposer de cachets clairs sur les passeports de ces voyageurs. De tels arrangements ont bénéficié particulièrement aux membres saoudiens dAl Qaïda. Nos connaissances sur les voyages internationaux des agents dAl Qaïda sélectionnés pour lopération du 11 septembre restent fragmentaires. Mais nous avons maintenant des preuves suggérant que 8 à 10 des 14 principaux agents saoudiens sont sortis ou sont rentrés en Iran entre octobre et février 2001.
En octobre 2000, un responsable du Hezbollah sest rendu en Arabie Saoudite afin de coordonner les activités dans le pays. Il a également prévu daider des particuliers saoudiens à voyager en Iran en novembre. Un haut commandant du Hezbollah ainsi que des contacts du Hezbollah saoudien étaient impliqués. De plus, en octobre 2000, deux des futurs principaux pirates de lair, Mohand al Shehri et Hamza al Ghamdi, ont pris lavion en Iran pour le Koweït. En novembre, Ahmed al Ghamdi sest apparemment rendu à Beyrouth en avion, voyageant, peut-être par pure coïncidence, sur le même vol quun chef du Hezbollah. En novembre également, Salem al Hazmi aurait voyagé en avion dArabie Saoudite à Beyrouth.
A la mi-novembre, nous pensons que trois des principaux terroristes, Wail al Shehri, Waleed al Shehri et Ahmed al Nami, ayant tous obtenu leur visa américain en octobre, ont voyagé avec un groupe à partir de lArabie Saoudite jusquà Beyrouth, puis jusquen Iran. Un collaborateur dun des chefs du Hezbollah se trouvait sur le même vol que celui qui a emmené les futurs pirates de lair en Iran. Des responsables du Hezbollah à Beyrouth et en Iran attendaient larrivée dun groupe au même moment. Le voyage de ce groupe était suffisamment important pour mériter lattention des figures emblématiques du Hezbollah.
Plus tard en novembre, deux des principaux futurs pirates de lair, Satam al Suqami et Majed Moqed, ont pris lavion en Iran pour Bahreïn. En février 2001, Khalid al Mihdhar a peut-être pris un vol de Syrie jusquen Iran, puis a voyagé à lintérieur de lIran jusquà un point proche de la frontière afghane.
KSM [Khalid Sheikh Mohammed, le cerveau présumé des attentats du 11 septembre et qui est à lheure actuelle en détention provisoire [8″> »> et [Ramzi »> Binalshibh [un membre dAl Qaïda capturé au Pakistan un an après les attentats et qui a reconnu avoir participé à leur organisation [9″> »> ont confirmé que plusieurs pirates de lair du 11 septembre (au moins huit daprès Binalshibh) ont transité en Iran en allant en Afghanistan ou au retour, profitant de la pratique des Iraniens de ne pas tamponner les passeports saoudiens. Ils nient tout autre motif expliquant le voyage des terroristes du 11 septembre en Iran. Ils refusent dadmettre également tout lien entre les pirates de lair et le Hezbollah.
En somme, tout pousse à croire que lIran a facilité le transit des membres dAl Qaida en provenance et à destination dAfghanistan avant le 11 septembre, et que certains dentre eux étaient les futurs pirates de lair du 11 septembre. Nous avons également des preuves indirectes que des hauts responsables du Hezbollah suivaient de très près le voyage en Iran de certains de ces futurs pirates de lair en novembre 2000. Cependant, nous ne pouvons pas écarter lhypothèse dune étonnante coïncidence qui est la suivante: le Hezbollah soccupait en fait dun autre groupe en provenance dArabie Saoudite au même moment, plutôt que des futurs pirates de lair.
Nous navons pas la preuve que lIran ou que le Hezbollah aient eu connaissance du plan qui est devenu par la suite lattentat du 11 septembre. Au moment de leur voyage à travers lIran, les membres dAl Qaida eux-mêmes ne connaissaient probablement pas tous les détails de leur future opération.
Après le 11 septembre, lIran et le Hezbollah ont désiré tenir secrète toute preuve passée dune coopération avec des terroristes sunnites associés à Al Qaida. Un haut responsable du Hezbollah a démenti toute implication du Hezbollah dans les attentats du 11 septembre. Nous estimons que ce sujet mérite une enquête plus approfondie de la part du gouvernement américain.[10″>
Notes
[1″> 9-11 Commission Report (Washington, D.C.: The National Commission on Terrorist Attacks upon the United States, 22 juillet, 2004).
[2″> The Washington Post. 28 juin, 1997.
[3″> « The Foundation of the New Terrorism, » 9-11 Commission Report, p. 60.
[4″> Ibid., p. 61.
[5″> « Al Qaeda Aims at the American Homeland, » ibid., p. 169.
[6″> Secrétaire dEtat Madeleine K. Albright, remarques devant le Conseil américano-iranien, 17 mars, 2000.
[7″> The Christian Science Monitor, 19 avril, 2004.
[8″> « Progress Report on the Global War on Terrorism, » White House, Sept. 2003.
[9″> CNN.com, 17 Sept., 2002.
[10″> « The Attack Looms, » 9-11 Commission Report, pp. 240-1.