De jour en jour, Mme Clinton affiche sa fermeté et dessine une nouvelle politique de dissuasion envers l’Iran, remplaçant l’ancienne politique de dissuasion datant de l’affrontement entre les Etats-Unis et l’Union soviétique.
"Comme lors de la Guerre froide, quand des milliers de missiles étaient pointés vers nous et que nous pointions (des missiles) vers l’Union soviétique, nous devons indiquer très clairement qu’il y a un prix", a répété Mme Clinton lundi sur CNN.
La veille, Mme Clinton avait maintenu sa promesse d’"annihiler" l’Iran. "Pourquoi aurais-je des regrets ? On me demande ce que je ferais si l’Iran attaquait notre allié (Israël), un pays avec lequel beaucoup d’entre nous ont beaucoup de liens et d’affection".
Vali Nasr, professeur à la faculté de droit et de diplomatie à l’Université Tufts, reconnaît dans les propos de Mme Clinton une anticipation sur l’après-Bush: "c’est le début du processus par lequel les Etats-Unis indiquent (..) ce qu’ils feraient s’ils ne pouvaient pas empêcher l’Iran d’acquérir (l’arme) nucléaire".
"Donc en un sens c’est le début de la politique de l’après-Bush envers l’Iran", ajoute-t-il, soulignant qu’à la différence de l’administration Bush, Mme Clinton ne mentionne ni changement de régime ni guerre préventive contre l’Iran, mais une riposte à d’éventuelles actions iraniennes.
Barack Obama, qui dispute à Hillary Clinton l’investiture démocrate pour la présidentielle américaine de novembre, a toutefois condamné l’"imprudence" des remarques de sa rivale, qui selon lui la rapprochent de l’administration Bush.
"Le mot ‘annihiler’, c’est le genre de langage qu’on a vu George W. Bush utiliser depuis sept ans, et c’est précisément le genre de langage provocateur que Mme Clinton a reproché à d’autres d’employer, en suggérant que si on est candidat à la présidence, on ne devrait pas provoquer des incidents internationaux", a souligné M. Obama lundi sur CNN.
Il faisait référence à une démarche officielle de l’Iran auprès du Conseil de sécurité, condamnant des propos "provocateurs, injustifiés et irresponsables" de Mme Clinton.
Le commentateur de gauche Steve Clemons, de la New America Foundation, s’inquiète également de voir Mme Clinton jouer sur la peur, "exactement comme (le vice-président Dick) Cheney".
Et M. Clemons d’ajouter que ce n’est pas seulement les électeurs américains, mais aussi les électeurs iraniens, appelés aux urnes dans un an, qui surveillent le débat et risquent d’en tirer des conclusions.
Or d’après lui, "tant Mme Clinton que M. Obama ont été négligents et imprudents dans le choix de leurs mots". Ainsi, "Mme Clinton semble complètement pencher vers les roulements de tambour de la guerre (contre l’Iran), et Obama (…), quand il parle de bombarder le Pakistan ou qu’il dit que la sécurité d’Israël est primordiale, fait aussi mal, parce qu’il sous-entend un faux choix, dans un jeu à somme nulle entre le Moyen-Orient et Israël".
S’indignant que les candidats démocrates se prêtent au jeu de question binaires sur le Moyen-Orient, M. Clemons estime qu’"on a tous de quoi s’inquiéter: Hillary Clinton et Barack Obama ont-ils la maturité pour réfléchir à des questions de sécurité nationale sans donner l’impression qu’ils sont obligés de jouer ce théâtre?".
Quant à la démarche de l’Iran dénonçant les propos de Mme Clinton, il souligne qu’elle est plutôt une bonne nouvelle pour l’ex-Première dame: "si l’un des individus les plus impopulaires au monde, Mahmoud Ahmadinejad, vous crache pratiquement dessus, et vous insulte, cela peut aider Hillary Clinton à établir sa légitimité en tant que commandant en chef", s’amuse-t-il.