IranNucléaireIran : le bellicisme perd du terrain à Washington

Iran : le bellicisme perd du terrain à Washington

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À un quart d’heure de marche de la Maison-Blanche, l’amphithéâtre climatisé du Center for Strategic and International Studies (CSIS, l’un des principaux instituts de réflexion sur la politique internationale à Washington) est comble. Tout ce que la capitale compte comme experts en géopolitique s’est déplacé pour assister à une conférence sur l’Iran, donnée par deux experts de re¬nom : Zbigniew Brzezinski, ancien conseiller pour la sécurité nationale du président Jimmy Carter ; et le général Brent Scowcroft, qui exerça la même responsabilité auprès des présidents Gerald Ford et George H.W. Bush (le père du président actuel).

Le premier est devenu un conseiller écouté de Barack Obama sur la politique étrangère ; le second, qui n’a jamais caché l’effroi que lui inspire l’idéologie néoconservatrice, a gardé une grande influence dans les milieux républicains modérés.

Lors de la conférence tenue ces derniers jours, au pupitre comme dans la salle, on se félicite de la décision prise par le président George W. Bush d’avoir envoyé un diplomate de haut rang parler directement aux Iraniens à Genève, lors de la rencontre du 19 juillet entre le groupe des Six (les cinq membres permanents du Conseil de sécurité de l’ONU, plus l’Allemagne) et le secrétaire du Conseil suprême de défense du régime de Téhéran.

Les experts américains s’accordent sur la nécessité de mettre un coup d’arrêt à la prolifération nucléaire à travers la planète et donc d’empêcher les Iraniens de se doter de la bombe atomique. Mais comment ? Brzezinski critique frontalement la doctrine de l’Administration de George W. Bush, qui consiste à dire que «toutes les options (y compris ¬celle d’un bombardement des ¬installations nucléaires iraniennes) sont sur la table ». «Vous ne pouvez pas à la fois menacer une grande nation comme l’Iran, et prétendre dialoguer sereinement avec elle», explique l’ancien conseiller du président Carter.

Renouer les liens commerciaux

Pour Brezinski, maintenir ouverte l’hypothèse d’un acte de guerre unilatéral est contre-productif : cela confirme les dirigeants iraniens dans l’idée qu’ils doivent se doter de moyens nouveaux de défense. À ses yeux, l’idée d’une guerre préventive n’est, de surcroît, pas raisonnable au vu des intérêts américains. Ses conséquences sur la stabilité du Moyen-Orient et sur l’économie mondiale seraient à coup sûr «catastrophiques».

Sur l’autre plateau de la balance, l’hypothèse d’un Iran nucléaire, aussi peu souhaitable qu’elle soit, ne présente pas de grand risque de déstabilisation régionale, car, jusqu’à présent dans l’histoire, «la dissuasion a toujours montré qu’elle fonctionnait».

Pour Brezinski, il n’y a aucune raison de penser que le régime iranien agirait de manière moins rationnelle que la Russie de Staline ou la Chine de Mao par le ¬passé.

Scowcroft et Brezinski partagent l’idée qu’il faut montrer à l’Iran qu’il a plus intérêt à renouer ses liens commerciaux avec l’Occident qu’à développer un programme nucléaire militaire. Les deux hommes pensent qu’on ne peut prétendre exiger la suspension du programme iranien d’enrichissement de l’uranium, sans rien donner immédiatement en échange, hormis la promesse de larges négociations tous azimuts. Un geste concret de l’Occident (comme la suspension de l’embargo américain sur les technologies pétrolières) serait, à leurs yeux, bienvenu.

Au sein de l’Administration Bush finissante, le secrétaire d’État Condoleezza Rice et le secrétaire à la Défense Robert Gates ont ma¬nœuvré ensemble pour éloigner toute idée de guerre préventive, en soutenant le principe de négo¬ciations directes, en souhaitant publiquement l’ouverture d’une section d’intérêts américains à Téhéran, en laissant filtrer l’opposition des chefs militaires à l’ou¬verture d’un troisième front.

Reste le problème des Israéliens. Cette semaine, le ministre de la Défense, Ehoud Barak, la ministre des Affaires étrangères, Tzipi Livni, et le vice-premier ministre, Shaoul Mofaz, se succèdent à Washington pour presser les Américains de lancer un ultimatum à l’Iran. «Ils savent que c’est leur dernière chance, car un Obama président ne laisserait pas passer sans conséquences un fait accompli israélien», estime le commentateur Arnaud de Borchgrave, un ancien reaganien qui s’apprête à voter pour le candidat démocrate.

Quoi qu’il en soit, le président Bush n’a pour le moment pas donné le moindre signe qu’il se laisserait à nouveau forcer la main par son vice-président Dick Cheney et le camp des bellicistes néoconservateurs.

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