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Iran : les amis du régime inquiétés par les sanctions

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ImageIran Focus : Le temps des négociations avec l’Iran a été « très court », il serait prématuré de sanctionner le régime pour la violation de ses obligations internationales: c’est en substance le thème du nouveau leitmotiv du lobby des mollahs. 

Dans un billet intitulé « La menace est-elle la solution avec l’Iran ? », paru dans le quotidien « Les Echos », 30 mars,  le chercheur Thierry Coville, se dit préoccupé que « la tension entourant actuellement le dossier du nucléaire iranien est reflétée par l’utilisation de menaces dans la négociation. »

Thierry Coville ajoute : « Les quelques déclarations d’Obama montrant son absence d’hostilité vis-à-vis de la population et du régime en Iran et la négociation de Genève du 30 septembre 2009 ne sont pas une vraie négociation. Dans ce contexte, l’utilisation de menaces explicites, alors que le temps de négociation a été très court, risque d’avoir pour effet de renforcer l’opposition de la partie de l’Iran qui subit des sanctions depuis trente ans et dont la conscience nationale s’est construite par la résistance à l’envahisseur étranger. » (1)

Monsieur Coville estime donc que sept années de négociations et de concessions des Européens puis des Américains aux mollahs a été trop court. Et se lamente sur le sort de la partie qui subit les sanctions à savoir le complexe militaro-commerciale des gardiens de la révolution et ses partenaires en Europe y compris en France. Quel rapport entre les portefeuilles de ces ensembles mafieux des gardiens de la révolution et la « conscience nationale » iranienne? C’est un mystère à découvrir.

Depuis que fut révélé pour la première fois en 2002, après 18 ans de clandestinité (2), l’existence d’un programme nucléaire militaire iranien, les tenants de la politique de complaisance n’ont cessé d’appeler à la négociation, et de répéter que le peuple iranien soutient en bloc ce programme nucléaire. Mais jamais ne les a-t-on entendus préciser jusqu’où ces négociations devraient-elles se poursuivre. Se mettant dans la peau d’agneau ils feignent se soucier du sort de la nation iranienne mais ne versent que des larmes de crocodiles.

On les entend régulièrement alerter les décideurs politiques sur les méfaits des sanctions, faussement  présenté comme un facteur de « renfoncement » du pouvoir, heurtant la « conscience nationale » des iraniens. Une imposture et une manipulation habile des stratèges iraniens et de leurs alliés, cherchant à éloigner toujours plus le spectre des sanctions. Une perspective devenues aujourd’hui la hantise première des dirigeants à Téhéran, fortement ébranlés par une crise politique grave qui secoue le pays depuis plusieurs mois. L’Iran d’aujourd’hui est un volcan qui se réveille. Les mollahs savent très bien que l’enchainement du soulèvement populaire risque de se poursuivre au point d’emporter la totalité du régime.

Or Thierry Coville se dit préoccupé par « la partie de l’Iran » dont la « conscience nationale s’est construit par la résistance à l’envahisseur étranger ». Si par cette « partie de l’Iran », Thierry Coville entant l’homme de la rue, il doit savoir que celui-ci a souffert avant tout de l’oppression du régime. Il faut être aveugle pour ne pas voir que la conscience nationale des iraniens est avant tout forgée par la résistance à l’oppression d’une dictature religieuse cruelle. Si c’est les pasdarans et les factions au pouvoir qu’il vise, il est grand temps d’arriver à comprendre que l’on ne peut confondre les bourreaux et le peuple. Les despotes iraniens sont étrangers à toute conscience nationale, ils n’ont fait que « résister » aux aspirations démocratiques de ce peuple intelligent et courageux.

M. Couville veut faire croire dans la foulé que le régime « subit des sanctions depuis trente ans ». C’est tout le contraire. A part certains matériels militaires et plus récemment certains produits à double usage qui peuvent être utilisé dans le programme nucléaire, faire croire à l’existence d’une véritable sanction en Iran depuis trente ans, n’est qu’une énorme supercherie.

Le Wall Street Journal rapportait dans son édition du 5 avril : « Dans le dernier train de sanctions proposée au Nation-Unis, Washington s’appui encore une fois sur le  gel de avoirs iraniens comme un levier de pression pour contraindre le pays à ne pas produire d’arme nucléaire. Mais un examen attentif du montant d’argent jusqu’à présent gelé aux Etats-Unis par les sanctions déjà existant, montre que la somme totale est étonnamment minime, moins de 43 million de dollars, équivalent au quart du revenue en pétrole de l’Iran en une seule journée. Les autres pays n’ont pas gelé d’avantage, en dépit du gèle imposé par l’UE et l’ONU. A titre d’exemple, la Suisse a gelé 1,4 million de dollars d’avoirs iraniens, c.-à-d. une petite fraction des 712 million de dollars que les entreprises suisse ont exporté vers l’Iran au cours de l’année écoulée ».

Dans un entretien avec La Voix du Nord, le 21 novembre 2009, Miraboutalebi, l’ambassadeur iranien en France, déclarait de la présence française en Iran : « Aujourd’hui, 40 % du parc automobile iranien est français ».

Le New York Times rapportait le 2 février 2010: « Les garanties de crédit pour les exportation octroyés à l’Iran par l’agence allemande Euler Hermesde en 2005, étaient de l’ordre de 1,4 milliards d’euros. Les exportations Allemande vers l’Iran en 2008 s’élevait à 4 milliard d’Euros, un peu moins des 4,4 milliard d’euros en 2005. Ensemble, les 27 pays de l’Union européenne ont exporté vers l’Iran des marchandises équivalant à plus de 14,1 milliard d’Euros en 2008 – machineries, matériel de transport, produits manufacturés et des produits chimiques. Les importations ont totalisé 11,3 milliards d’euros en 2008, la plupart de l’énergie et des produits liés à l’énergie. »

Tout au long de ces années, les amis du régime ont invariablement poussé à toujours plus de concessions et d’incitations, tout en racontant au monde qu’on pouvait changer le comportement du régime. Un temps ils ont conçu la politique du « dialogue critique », puis celui de l’«engagement constructif», aujourd’hui ils insistent pour une « main tendu » infiniment extensible.  Le lobby de la complaisance cherche à faire croire que  l’échec de leur politique iranienne est dû à la réticence des États-Unis de négocier directement avec l’Iran.

C’est une autre fausse idée colporté par le lobby. L’historique de la politique de complaisance envers l’Iran date de l’ère Reagan (1981-1989). C’est le président américain Ronald Reagan qui inaugura en 1985 la politique de « bonne volonté » à l’égard des dirigeants iraniens. Au cours de ce qui a été appelé l’affaire Irangate, l’administration américaine a accepté de livrer à l’Iran des armes et des donnés militaires (dans sa guerre contre l’Irak).  Ronald Reagan a poussé sa politique d’«engagement » au point de dépêcher son conseiller pour la Sécurité National, Robert McFarlane  Téhéran. Les mollahs ont surenchéri en demandant que leur principal ennemi intérieur soit ostracisé comme une organisation « terroriste et marxiste ». Les Etats Unis ont ensuite fait une déclaration publique (juillet 1985) désignant l’Organisation moudjahidine du Peuple d’Iran (Ompi) comme une organisation « terroriste et marxiste ».

Sous l’ère Bush père (1989-1993), après la mort de Khomeiny en Juin 1989, les Etats-Unis se sont déclaré  prêt à libérer les avoirs de l’Iran depuis 1979 . En 1993, les exportations américaines vers l’Iran grimpaient à un milliard de dollars et les compagnies américaines de pétroles achetaient près du tiers de la production iranienne. (Eric Rouleau, America’s unyielding policy toward Iraq, Foreign Affairs, 61 (1995).

Sous l’ère Clinton (1993-2001), la politique du « soft engagement » vis-à-vis de l’Iran a vu le jour avec Khatami. Une « feuille de route conduisant à des relations normales » avec l’Iran, a été alors dressée par la secrétaire d’état, Madeleine Albright. Elle a explicité ainsi la feuille de route qui deviendra un élément central de la politique américaine à l’égard de l’Iran : « Les États-Unis ont expérimenté la possibilité d’engager les relations avec Téhéran au moyen de gestes modestes et unilatérales ». (M. Albright, discours à l’Asia Society Dinner, New-York, 17 juin 1998). Clinton décidait alors de déroger de sanctions la construction d’un pipeline de gaz à travers l’Iran. En octobre 1997, pour satisfaire Khatami, le département d’Etat inscrivait officiellement l’OMPI dans la liste noire.

Sous l’ère Bush fils (2001-2009), tout au long de  l’invasion américaine de l’Irak, les USA ont engagé des discussions diplomatiques avec l’Iran, dans un effort pour obtenir sa neutralité. Cédant honteusement à la demande des mollahs, ils sont allés jusqu’à bombarder les bases des opposants iraniens en Irak, tuant et blessant des dizaines de militants du mouvement. En mai 2007, les USA engagent avec l’Iran « des discussions bilatérales du plus haut rang jamais tenues depuis près de trois décennies » (New-York Times, 28 mai 2007).

Le rapprochement avec l’Iran a été fondé sur la fausse idée que les mollahs répondraient aux incitations et agiraient en quelque sorte dans l’intérêt national de l’Iran. C’est méconnaitre la nature du régime du Vélayat Faghih. C’est un système autocratique d’inspiration « religieuse ». Elle est régit par cette notion de la « vérité absolue », le monopole exclusif du « système islamique » et de son « guide suprême ». Pour un système qui a vocation d’instaurer la « volonté divine » à l’échelle planétaire, il n’y a strictement rien à négocier. En ce que la volonté divine n’est pas sujet à compromission. La négociation n’est qu’un stratagème pour déjouer l’«arrogance mondiale ».

Le sort de l’option nucléaire pour le Guide suprême est scellé d’avance. Elle relève d’une décision stratégique prise par la personne même du fondateur de la « république islamique » au début des années 1980, (3) que rien ne pourrait le contrarier. L’arme nucléaire est pour le régime, le moyen le plus rapide et le plus sûr de s’imposer dans l’arène internationale. Les théoriciens de la politique de « Bast », qui signifie littéralement « expansion »,  se complaisent déjà de leurs présence au Liban, à Gaza et en Irak, dans certains pays africains et même en Amérique Latine, où ils ont réussi à établir des têtes de pont intégristes. (4)

Le naïf technocrate occidental se méprendrait gravement s’il devait négliger d’un côté la dimension proprement « religieux » du régime iranien et d’autre part l’extrême fragilité interne d’un régime dos au mûr prêt à toutes les folies pour sauver sa survie.

Le guide suprême religieux Ali Khamenei, et les bandes de pasdarans qui l’entourent, Mahmoud Ahmadinejad, comme président, Ali Larijani, chef du majlis, et toutes l’éventail des autres militaires et mollahs réactionnaires ne sont pas des « négociateurs ». Ce sont les acteurs d’un dessein pré-établi, que rien ne saurait faire reculer. Ils n’ont besoin que de temps. Pour cela ils comptent sur leurs amis pour les aider. Des idiots utiles gagnés à leur cause. 

Dans ce contexte, entendre dire que l’on pourrait obtenir quelque chose des mollahs par la négociation, laisse douter du bon sens et à la fois de la sincérité de ses prétendants, Tant l’effet pervers de telles entreprises de propagande peut avoir des conséquences périlleuses.

Ce genre de démarche coïncide étrangement avec une offensive diplomatique désespérée de Téhéran pour éviter que le Conseil de sécurité des Nations unies adopte contre lui un nouveau train de sanctions. Cette offensive se concentre sur les dix membres non permanents du Conseil.

Les « pseudo-spécialistes » de l’Iran s’adonnent à un jeu dangereux en invitant à la complaisance envers les intégristes iraniens. Ils ignorent sciemment les dangers des pasdarans exaltés doté de l’arme nucléaire. Ils feraient mieux de se rappeler de l’histoire, ceux qui ont minimisé le péril hitlérien se sont fait un renommé à la hauteur de leur forfaiture. Usurpé une position d’expert sur l’Iran alors qu’on fait preuve d’incompétence et de mauvaise foi est plus que jamais inacceptable. 

  
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(1) Thierry Coville,  dans un article dans La Croix, le 28 décembre 2009, cherchait déjà à faire passer l’idée que loin de le pénaliser, les sanctions profiteraient au régime. Allant étrangement dans le sens de la propagande du régime qui a longtemps essayé de jouer la corde du  nationalisme, il écrivait : «Un certain nombre d’Iraniens estiment qu’ils ont droit au nucléaire. Dans ces conditions, des sanctions internationales renforcées contre l’Iran pourraient donner des arguments au régime pour fédérer la population contre l’étranger ».

(2) C’était en 2002, lorsque le Conseil national de la résistance iranienne, coalition de l’opposition démocratique, a révélé l’existence d’un programme nucléaire clandestin à Natanz et à Arak sous la conduite des Gardiens de la Révolution, caché pendant 18 ans des inspecteurs de l’Onu. Ce mouvement a ensuite fait une succession de révélations, alertant la communauté internationale des avancés du programme nucléaire militaire des pasdaran. Les spécialistes ont confirmés l’exactitude des informations dans 90 % des cas. ( Le New-York Times,  6 janvier 2010: Iran Shielding Its Nuclear Efforts in Maze of Tunnels, By WILLIAM J. BROAD)
 
(3) C’est Rafsandjani, bras droit de Khomeiny, qui fut chargé relancer le programme nucléaire qui avait été annulé après la chute du Chah. Dans la première moitié de 1980, celui qui fut également l’architecte principal des armes à destruction massive du régime, amorça des contactes secret avec plusieurs pays, notamment la Chine, le Pakistan, la Russie, la Corée du Nord, l’Argentine, l’Inde et l’Afrique du Sud pour obtenir leur assistance dans le programme nucléaire. En octobre 1988, Rafsandjani s’est adressé à  une conférence réunissant les scientifiques iraniens expatriés pour leur demander de retourner au pays, soulignant l’«importance primordiale » de développer l’industrie nucléaire. (Middle East Defence News, aout 1992, p. 42)

(4)  L’Agence Fars, rapportait le 1er mai 2010 les propos d’Ali Laridjani, président du parlement des mollahs comme suit: « Selon le correspondant parlementaire de l’agence Fars, ce matin, dans une réunion avec les oulémas des mosquées, Ali Laridjani, président de l’assemblée islamique, a déclaré en citant les recommandations du guide suprême de révolution : « Dans tous les domaines stratégiques de notre  pays, notamment la question nucléaire, du Liban et de la Palestine, à part le Vali-e-Faghih qui donnait des recommandations précises, aucune autre instance ne s’occupait de cette question. »

 

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