Tageblatt (Luxembourg), 12 avril – Les Etats-Unis ont exclu mercredi de libérer cinq prisonniers iraniens contre une participation de l’Iran à une conférence internationale sur l’Irak, et ont porté de nouvelles accusations contre les agissements iraniens chez le voisin irakien.
L’armée américaine a accusé mercredi des agents du renseignement iranien d’avoir soutenu non pas seulement des extrémistes chiites, mais aussi sunnites, en dépit de la différence de confession religieuse. Le général et porte-parole William Caldwell a affirmé à Bagdad que les Américains disposaient d’informations selon lesquelles les Iraniens faisaient passer clandestinement en Irak des armes modernes, mais aussi instruisaient en Iran même des groupes irakiens à l’assemblage d’engins explosifs qui font des ravages dans les rangs de la coalition. De son côté, l’Iran a accusé les Américains d’avoir torturé un de ses diplomates, des accusations rejetées par la Maison Blanche comme dénuées de fondement.
Un porte-parole de la Maison Blanche, Gordon Johndroe, a exclu mercredi la libération de cinq Iraniens arrêtés le 11 janvier par les forces américaines à Erbil (nord de l’Irak) pour que l’Iran participe à la conférence internationale sur l’Irak prévue en mai en Egypte. « Non », s’est-il contenté de répondre à la question sur une telle éventualité.
Le vice-ministre iranien des Affaires étrangères, Abbas Araghchi, a lié dans la presse la participation de l’Iran à cette conférence à la libération des cinq détenus. L’Iran affirme que ce sont des diplomates, ce que contestent les Etats-Unis.
Ils sont devenus une pomme de discorde supplémentaire entre les Etats-Unis et l’Iran et compliquent encore la donne en Irak, où les deux pays sont confrontés le plus directement. Leur sort a nourri les spéculations avec la crise des 15 Britanniques capturés par les Iraniens. Le président George W. Bush a exclu toute libération des cinq Iraniens d’Erbil contre celle des Britanniques. Les spéculations sur un marchandage ont été renforcées par le fait que les Britanniques ont été libérés la semaine passée quelques jours après Jalal Sharafi, second secrétaire de l’ambassade d’Iran à Bagdad, enlevé en février par des hommes armés portant l’uniforme de l’armée irakienne.
L’Iran a affirmé mercredi, images de télévision à l’appui, que Jalal Sharafi avait été torturé par les Américains. « Les Etats-Unis n’ont rien à voir avec sa détention, et suggérer qu’il a été torturé (par les Américains) est sans fondement », a déclaré M. Johndroe. Les Américains ont torturé le diplomate à la perceuse, selon la télévision iranienne, qui a montré des images de blessures aux pieds et de coups de fouet dans le dos.
La résolution de la crise des soldats britanniques a soulevé des questions sur un éventuel message de bonne volonté de la part des Iraniens. La Maison Blanche avait immédiatement réaffirmé son exigence que l’Iran renonce à ses activités nucléaires les plus sensibles.
Depuis lors, dans un nouveau geste de défi, l’Iran a annoncé être passé à la phase industrielle de la production d’uranium enrichi. Une semaine après un voyage controversé à Damas, un membre éminent du Parti démocrate, Tom Lantos, a créé les conditions d’une nouvelle querelle sur la nécessité d’un dialogue avec les « ennemis » iranien et syrien en se disant prêt à tout moment à prendre l’avion pour Téhéran et à discuter avec le président Ahmadinejad.
Avec un Irak au bord de la guerre civile, les tensions avec l’Iran et la Syrie et les difficultés de la diplomatie américaine dans la région, une reprise du dialogue avec Téhéran et Damas suscite l’un des grands débats de politique étrangère aux Etats-Unis. Les démocrates y sont favorables. Mais la Maison Blanche a redit son opposition mercredi en jugeant « troublantes » les velléités de ses adversaires démocrates.