Selon les autorités irakiennes, depuis l’invasion américaine de mars 2003, le commerce d’opiacés, de cannabis et de drogues synthétiques a augmenté régulièrement dans le pays, la majorité des produits, surtout les opiacés, arrivant d’Afghanistan via l’Iran.
Selon l’ONU, la production afghane d’opium est passée de 6.100 tonnes en 2006 à 8.200 tonnes en 2007, et représente 93% de la production mondiale.
En Irak, les statistiques manquent mais le nombre de trafiquants interceptés aux frontières avec l’Iran, le Koweït et l’Arabie saoudite augmente rapidement, essentiellement dans les provinces de Bassorah et Missane (sud), a déclaré à l’AFP le porte-parole du ministère de l’Intérieur, le général de division Abdul Karim Khalad.
A deux pas de l’Iran, Amara, capitale de la province de Missane, connaît une forte croissance du trafic de narcotiques, vers les pays du Golfe et vers la capitale fédérale, Bagdad, au nord.
A 60 kilomètres au sud d’Amara, les longs roseaux du marais d’al-Ezeir, qui entre largement en territoire iranien, sont une couverture idéale pour les trafiquants.
Le marché du haschich et de l’opium fleurit aussi à Bassorah, également voisine de l’Iran. "Les trafiquants passent le haschich via al-Shalamja à la frontière iranienne, et par Safwan près de la frontière irako-koweïtienne", en utilisant souvent des poids-lourds pour acheminer leur butin vers le Golfe, a expliqué un policier anti-drogue de Bassorah, sous couvert de l’anonymat.
Pendant ce temps, la ville de Samawa, dans la province d’al-Muthana, est devenue le principal point de passage des trafiquants intéressés par le marché saoudien.
"Les drogues arrivent d’Iran, puis sont vendues à la frontière saoudienne. Les trafiquants sont jeunes et utilisent des motos ou des animaux pour traverser le désert en pleine nuit", selon un policier local.
La police irakienne a refusé de fournir à l’AFP des estimations sur la quantité de drogues ayant transité par l’Irak en 2007, mais selon la police iranienne, elle dépasse largement les 1.000 tonnes, qui continuent ensuite leur chemin vers l’ouest.
"Le trafic de drogue et les risques de culture illicite de pavot ont augmenté dans certaines zones en même temps que les problèmes d’insécurité", selon le Bureau international de l’ONU pour le contrôle des narcotiques, parlant de l’Irak dans un rapport de 2007.
Les tentations sont fortes, les marges importantes. Le kilo d’héroïne, vendu 3.000 dollars en Afghanistan et 3.200 dollars en Iran, atteint 17.000 dollars en Syrie, 21.000 dollars en Jordanie, pour finir à 35.000 dollars en Europe, selon le Rapport mondial sur les drogues 2008 de l’ONU.
Et l’efficacité de la lutte anti-drogue s’est effondrée à la chute de Saddam Hussein. Du temps du dictateur, quand un fonctionnaire permettait une saisie, il recevait du gouvernement une prime correspondant à la quantité interceptée, au prix du marché.
Et l’instabilité générale de l’Irak a encore aggravé le problème.
"Les drogues suivent la voie offrant la plus faible résistance, et certaines régions irakiennes correspondent certainement à cette description", mais "les informations fiables sur l’Irak sont absentes", a déclaré à l’AFP un représentant du Bureau des Nations unies pour le contrôle des drogues et la prévention du crime.
Dans un hôpital de Bagdad, un médecin estime que l’usage de drogues a fortement augmenté dans la ville, même si là encore les chiffres manquent.
Le Bureau de l’ONU pour le contrôle des narcotiques renchérit: "malgré l’absence de données officielles, il apparaît que l’usage de drogues en Irak a augmenté dramatiquement, y compris parmi les enfants des familles aisées".