AFP, Téhéran, 21 août – L’universitaire irano-américaine Haleh Esfandiari, détenue en Iran depuis mai pour espionnage, a été libérée mardi sous caution, une affaire qui a ajouté aux vives tensions entre les Etats-Unis et l’Iran.
« Je peux confirmer qu’elle a été libérée contre une caution de 3 milliards de rials », environ 240.000 euros, a dit à l’AFP son avocate Shirin Ebadi.
Mme Esfandiari, gée de 68 ans et résidant aux Etats-Unis, s’était rendue en Iran en décembre pour y voir sa mère malade. Elle avait été arrêtée le 8 mai et était détenue depuis à la prison d’Evine de Téhéran.
Deux autres Irano-américains, le sociologue Kian Tajbakhsh et l’homme d’affaires Ali Shakeri, ont été arrêtés avec elle et leur sort reste en suspens. Mais selon une source du Parquet citée par l’agence Isna, « il est possible que la situation (de Kian Tajbakhsh) change dans les prochains jours ».
La Maison Blanche a immédiatement salué l’annonce de la libération de Mme Esfandiari.
« C’est une nouvelle encourageante, que les Etats-Unis saluent », a dit un porte-parole, Gordon Johndroe, à Montebello (Canada) en marge d’un sommet nord-américain.
La secrétaire d’Etat américaine, Condoleezza Rice avait demandé la remise en liberté de Mme Esfandiari peu après sa détention.
Washington avait aussi condamné les « révélations » télévisées de l’universitaire et de M. Tajbashkh, exprimant la crainte qu’elles aient été obtenues sous la contrainte.
La presse conservatrice iranienne a affirmé initialement que les trois détenus faisaient partie d’une opération menée à l’instigation des services secrets américains en vue d’une « révolution de velours » dans la République islamique.
Ces accusations ont été reprises par les autorités, qui ont expliqué que les Irano-américains détenus devaient constituer un réseau de soutien en Iran même.
Téhéran avait ensuite organisé en juillet la diffusion d’un programme télévisé, intitulé « Au nom de la démocratie », dans lequel Mme Esfandiari et M. Tajbaksh reconnaissaient à demi-mots leur implication dans une opération visant à terme à un changement de régime.
Washington s’était dit « outré » par la diffusion de ce programme.
Sans rien avouer, Mme Esfandiari expliquait en être « venue à la conclusion », qu’elle faisait partie d’un réseau de fondations, constitué « au nom de la démocratie » et qui aurait « résulté à terme dans des changements fondamentaux du système iranien ».
Haleh Esfandiari dirige le programme du Moyen-Orient au Centre international Woodrow Wilson à Washington.
Le ministre iranien des Renseignements Gholam Hossein Mohseni-Ejeie l’a accusée d’avoir des liens avec la fondation du milliardaire et philanthrope américain George Soros, pour laquelle travaillait M. Tajbakhsh.
Téhéran a accusé la Fondation pour une société ouverte (Open Society Foundation), très active dans la promotion de la démocratie dans l’est de l’Europe, de viser le même objectif en Iran.
Le programme télévisé « Au nom de la démocratie » contenait ainsi des images des révolutions « de la rose » géorgienne et « orange » ukrainienne.
L’offensive des autorités iraniennes contre ces universitaires avait commencé en 2006 avec la détention de l’intellectuel dissident Ramin Jahanbeglou.
Il avait été relché et a quitté le pays, non sans avoir « avoué » avoir été piégé par des agents étrangers l’utilisant contre l’Iran.
Une quatrième Irano-américaine, la journaliste Parnaz Azima, a été arrêtée puis libérée sous caution. Elle est accusée de travailler pour un média « contre-révolutionnaire », Radio-Farda, la station en persan de Radio Liberty/Radio Free Europe, financée par le gouvernement américain et basée à Prague.
L’Iran, qui ne reconnaît pas la double nationalité, a rejeté à plusieurs reprises les appels de Washington à la libération des Irano-américains.