AFP, Nicosie, 26 juin – La presse arabe oscillait entre la crainte d’une exportation de la révolution islamique et l’espoir d’un comportement rationnel de l’ultra-conservateur Mahmoud Ahmadinejad, dans ses premiers commentaires dimanche sur l’élection présidentielle iranienne.
Elle souligne que les « durs » du régime islamique ont parachevé leur emprise sur les institutions en élisant Ahmadinejad à la présidence contre le modéré Hachemi Rafsandjani.
Pour le quotidien koweitien Al-Anbaa, la victoire de Ahmadinejad « nourrit la crainte d’une exportation de la révolution islamique ».
En 1979, plusieurs pays de la région avaient accusé l’Ayatollah Khomeiny de vouloir « exporter » la révolution iranienne dans le Golfe, dont les régimes sunnites s’étaient alliés à l’Irak dans sa guerre contre l’Iran (1980-1988).
« L’Iran est revenu au credo de la révolution », titre le quotidien saoudien Ash-Sharq al-Awsat, se référant à l’établissement en 1979 de la République islamique. « C’est la fin du printemps de Téhéran… Les radicaux ont étendu leur contrôle aux principales institutions du pays et rejeté les réformistes dans l’opposition », écrit-il.
Le journal saoudien al-Watan souligne qu' »après huit années sous le président réformateur Mohamad Khatami, l’Iran est revenu à un système unipolaire ».
« Désormais, l’Iran sera régi pendant quatre ans par une seule autorité et un seul programme, ce qui rendra plus facile de traiter avec lui », souligne cependant le journal, en relevant que pendant les années Khatami, la dualité de pouvoir entre les deux leaders (Khatami et Khamenei) avaient « entravé la vie politique »
Le journal koweïtien Al-Qabas relève qu’après « leur hégémonie sur le Majlis (parlement) l’an dernier, les radicaux fondamentalistes ont mis la main sur la dernière position encore détenue par les réformistes au sein de la République islamique ».
Pour le quotidien émirati Al-Khaleej, « l’élection de Ahmadinejad était une surprise même pour les Iraniens eux-mêmes », mais, ajoute-il, « c’est un choix qui doit être respecté ». Il souligne que l’Iran pourrait « entrer dans une période de durcissement », mais que cela « ne doit pas susciter la crainte ».
« Le pragmatique Ahmadinejad sait que l’Iran est entouré par des forces militaires (dirigées par les Etats-Unis) et fait l’objet de pressions politiques, qui demandent une pensée rationnelle, notamment sur les questions nucléaires, le terrorisme et le processus de paix dans la région », souligne le journal.
« Nous espérons qu’il surmontera ce premier test, car les problèmes auxquels il doit faire face ont des conséquences sur l’ensemble de la région » du Golfe, ajoute-t-il.
Au Liban, le quotidien libéral libanais An-Nahar estime que la victoire d’Ahmadinejad est « une sorte de coup d’Etat blanc », qui remet en cause radicalement le fragile équilibre entre le courant réformateur et les ultra-conservateurs.
« Cette victoire fait du guide Ali Khamenei et du courant conservateur les seuls décideurs avec autant de pouvoir que l’ayatollah Khomeiny. C’est un retour aux sources de la révolution islamique de 1979, un bond en arrière de 26 ans par lequel les conservateurs chercheront à assouvir leur volonté de puissance à l’intérieur et aussi au niveau régional », souligne-t-il.
Pour Al-Mostaqbal, qui appartient au groupe Hariri, « cette élection va asseoir la domination des conservateurs en donnant un coup d’arrêt aux réformes, ainsi qu’à un éventuel dialogue avec l’occident ».
En Egypte, la presse gouvernementale se borne à reproduire les dépêches d’agences.
Al-Akhbar souligne en titre que « les pauvres ont élu le dur Ahmadinejad contre le modéré Rafsandjani ». Al Gomhouria titre sur le « raz-de-marée », qui a porté le nouveau président au pouvoir, en relevant un commentaire de Washington selon lequel « l’Iran a tourné le dos à la démocratie ».
Al-Ahram souligne que « l’ingénieur Ahmadinejad est devenu président grâce au vote des pauvres » et que « Washington estime que ce résultat écarte l’Iran du chemin de la liberté ».
Election en Iran: la presse arabe craint l’exportation de la révolution
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