UPI, Washington, 3 janvier Par Claude Salhani, rédacteur en chef international Parmi toutes les incertitudes qui rongent le Moyen Orient, il y a au moins trois éléments dont on peut être certain.
Premièrement, lIran continuera de fabriquer des armes nucléaires en dépit de tous les cris de protestation des Européens et des États-Unis. Deuxièmement, ladministration Bush ne laissera pas la République islamique réaliser son rêve nucléaire. Le président George W. Bush a déclaré à plusieurs reprises que « toutes les options étaient à considérer, y compris loption militaire ». Et troisièmement, lIran continuera de construire son système darmes nucléaires même si le pays est frappé par les États-Unis.
En dautres termes, il est très probable que le président Bush prenne des mesures contre la République islamique afin de stopper les ayatollahs avant quils ne puissent commencer à déployer leurs missiles nucléaires. Mais le bombardement des installations nucléaires de lIran ne serait quune force de dissuasion de courte durée et non une solution à long terme.
Les dessous de lhistoire de lescalade de la rhétorique entre Jérusalem, Téhéran et Washington sont ce quappelle le Professeur Raymond Tanter « une course entre trois montres ».
Tanter, haut responsable du Conseil de la sécurité nationale durant le mandat du président Reagan, est actuellement membre du Washington Institute pour la politique du Proche Orient et co-président de lIran Policy Committee, un groupe de pression essayant de convaincre ladministration Bush que le changement en Iran doit venir de lintérieur, par la résistance.
Tanter déclare : « Les négociations menées par lEurope pour persuader lIran dabandonner son désir de mener à bien le cycle complet du combustible nucléaire, à partir duquel la bombe peut être fabriquée, représentent la première montre ». Cette voie na pour linstant donné aucun résultat. En fait, un grand nombre dexperts pensent que Téhéran se sert de la voie européenne et des négociations avec lAgence Internationale de lÉnergie Atomique comme tactique pour faire gagner du temps aux ayatollahs.
« La seconde montre, selon Tanter, est leffort de lIran pour développer la bombe. »
Il sagit de la seule montre qui compte vraiment, puisque lIran en contrôle totalement les cadrans, les manipulant à sa guise, mais une montre qui progresse inexorablement, quoiquil advienne.
« La troisième est un changement de régime à Téhéran », daprès Tanter. Il explique : « La diplomatie perd son souffle, la fabrication de la bombe en Iran saccélère et le changement de régime est bloqué tant que les exilés et les dissidents iraniens seront considérés comme des terroristes plutôt que comme des combattants de la liberté ».
En menant astucieusement leur politique en avançant dun pas puis en reculant, en essayant de faire croire à lUE et à lAIEA quils sont sincères, le régime de Téhéran traîne intentionnellement des pieds, jouant le jeu de temps en temps tandis quil fabrique sa bombe et les mécanismes de lancement qui vont avec. Alors que le gouvernement américain est en faveur dune diplomatie internationale, espérant quelle lemporte sur la force, le président Bush ne décide pas de nos frappes militaires.
Les frappes militaires, selon Tanter, ne feront que retarder la fabrication de la bombe pour une courte période de temps, si elles y parviennent. Ce nest quune solution à court terme. Les Américains peuvent faire exploser une ou deux installations, les Iraniens en construiront une autre, puis encore une autre.
Il ny a quune seule chose qui puisse totalement arrêter la fabrication de la bombe, explique Tanter. Cest « un changement de régime venant de lintérieur. Et non des frappes militaires venant de lextérieur de lIran. Pour parvenir à cet objectif, nous devons permettre et soutenir un changement de régime par les exilés et les dissidents iraniens opérant à lintérieur du pays ».
Malgré larticle paru récemment dans le magazine en ligne allemand Spiegel qui rapporte que « la probabilité grandissante dune option militaire est de retour dans les gros titres en Allemagne grâce à un grand nombre dhistoires rapportées par les médias durant les vacances ». Tanter reste sceptique concernant la solution militaire.
De plus, il discrédite les reportages exagérés dans la presse turque qui en a fait trop au sujet de la visite du directeur de la CIA, Porter Goss, le 12 décembre à Ankara, où il aurait demandé au Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan de donner son soutien pour une éventuelle frappe aérienne en 2006 contre les installations nucléaires et militaires iraniennes. Plus précisément, Goss aurait demandé à la Turquie déchanger un nombre illimité de renseignements pouvant aider les Américains dans leur mission.
Alors en Turquie, Le chef de la CIA Goss aurait fourni aux responsables turcs de la sécurité trois dossiers « qui contiendraient la preuve que Téhéran collabore avec le réseau terroriste Al Qaida ».
En échange du soutien de la Turquie, probablement en autorisant le survol de leur espace aérien par les bombardiers américains et en collaborant dans léchange de renseignements, ladministration Bush aurait donné à Ankara le « feu vert » pour attaquer les installations du Parti des travailleurs du Kurdistan en Iran.
Plusieurs sources pensent que les dernières bouffonneries anti-israéliennes du président radical iranien, Mahmoud Ahmadinejad, (proclamant que lholocauste navait jamais eu lieu, qu « Israël devait être rayé de la carte » et quIsraël devrait être transféré en Europe, vers lAllemagne ou lAutriche) ne réussissent quà faire comprendre que des armes nucléaires entre les mains dun tel chef dÉtat seraient dangereuses, pas seulement pour Israël, mais pour la sécurité de toute la région.
Mais dun autre côté, le président américain ne devrait pas ignorer une autre certitude au sujet du Moyen-Orient. Celle quune frappe contre lIran produirait un grand nombre dincertitudes, en particulier concernant la réponse de lIran et le fait que les 138.000 soldats américains stationnés très près de la République islamique pourraient devenir la cible principale de lIran et de ses alliés en Irak.