Sanctions commerciales : la guerre des mots
The Guardian, Téhéran, 16 janvier par Robert Tait Hier, lIran, dans un nouvel acte de défi à la pression internationale au sujet de son programme nucléaire, a menacé daugmenter le prix du pétrole dans le cas où le pays se voyait imposer des sanctions. Alors que des diplomates venant des USA, dEurope, de Russie et de Chine se préparaient pour leur rencontre aujourdhui à Londres afin de discuter du renvoi de Téhéran devant le Conseil de Sécurité de lONU, le ministre iranien de lÉconomie, Davoud Danesh-Jafari, a déclaré quune telle mesure aurait des conséquences fâcheuses en raison de la position du pays en tant que quatrième plus gros producteur de pétrole au monde.
« Toute sanction venant de lOccident pourrait éventuellement, en perturbant la situation politique et économique de lIran, faire augmenter les prix du pétrole bien au-delà de ce que lOccident prévoirait », a-t-il déclaré à la radio dÉtat iranienne.
Dans une autre démarche provocatrice, lIran a annoncé hier son projet dorganiser une conférence « scientifique » afin dexaminer les preuves de lholocauste. Cette nouvelle survient quelques semaines après que le président Mahmoud Ahmadinejad a suscité lindignation générale en décrivant le massacre des 6 millions de Juifs par les Nazis pendant la seconde Guerre Mondiale de « mythe ».
Les commentaires de M. Danesh-Jafari reflètent les craintes des experts du marché de lénergie suite à laugmentation la semaine dernière du prix du pétrole brut qui a dépassé 64$ le baril, alors que les espoirs de trouver une solution diplomatique au conflit samenuisent.
La semaine dernière, Manouchehr Takine, du Centre for Global Energy Studies, a indiqué que les prix du brut pourrait atteindre 100$ le baril si lIran arrêtait lexportation. « Loffre et la demande séquilibrent de manière très délicate », a-t-il dit.
Les remarques de M. Danesh-Jafari ont donné plus de poids aux menaces voilées du président iranien samedi. LIran a un « moyen bon marché » de mettre en uvre ses « droits » nucléaires, a déclaré M. Ahmadinejad, qui a ajouté : « Vous [lOccident »> avez plus besoin de nous que nous navons besoin de vous. Chacun dentre vous aujourdhui a besoin de la nation iranienne. »
Admettant le danger, Gernot Erler, ministre adjoint allemand des affaires étrangères, a déclaré hier : « Nous assistons à des mesures désespérées des pays asiatiques, principalement la Chine, lInde et dautres, essayant de se procurer des ressources en énergie, et pour eux, lIran est un partenaire dont ils ne peuvent se passer ». Il a dit quil était « dangereux » dimposer des restrictions sur les relations commerciales « qui pourraient nous nuire à nous plus quà eux ».
Les dirigeants islamiques dIran insistent pour dire quils désirent maîtriser la technologie nucléaire pour satisfaire ses besoins en énergie. LOccident suspecte que son intention réelle soit de produire une arme nucléaire.
Mais même au milieu de cette rancur incessante, certains hauts responsables iraniens semblent adoucir leur position belliqueuse. Appelant à un retour à la table des négociations, le ministre des affaires étrangères Manouchehr Mottaki a accusé lOccident de réagir de manière exagérée à la décision de Téhéran la semaine dernière de lever les scellés de lONU et de reprendre la recherche à son usine nucléaire de Natanz, la Grande-Bretagne, la France et lAllemagne ayant officiellement décidé dabandonner les pourparlers qui ont duré 2 ans et demi et exigé la comparution de lIran devant le Conseil de Sécurité des Nations Unies.
Bien que la Grande-Bretagne a exclu la possibilité de mesures militaires contre lIran, hier, deux sénateurs américains ont avancé que les USA devraient entreprendre une frappe de « dernier recours » afin dempêcher lIran de se procurer des armes nucléaires. Le républicain John McCain a déclaré à CBS : « Tous les autres recours doivent êtres épuisés, mais dire quen aucun cas nous ne ferions appel à loption militaire serait absurde ». Le démocrate Evan Bayh a lui recommandé la diplomatie, mais a affirmé quil y avait certains éléments du programme nucléaire iranien qui, si le pays était attaqué, « retarderaient de manière dramatique son développement ».
Le porte-parole de la Maison Blanche, David Almacy, a déclaré : « La communauté internationale est déterminée à ne pas laisser lIran développer une arme nucléaire. La manière dont nous allons prendre des mesures contre les infractions perpétuelles commises par ce régime sera définie dans les jours et les semaines à venir ».
La question du renvoi devant le Conseil de Sécurité de lONU sera au cur des discussions aujourdhui, lorsque les responsables de lUE et des États-Unis vont tenter de persuader leurs homologues russes et chinois de la nécessité dun tel renvoi, qui pourrait conduire à limposition de sanctions économiques.