Libération, 26 mai par Jean-Pierre Perrin – Ces civils pourraient servir de monnaie d’échange avec les Etats-Unis. Une Française a aussi été arrêtée.
Après l’arrestation à Téhéran de l’universitaire américano-iranienne Halah Esfandiari (Libération du 11 mai), deux autres Irano-Américains, un chercheur et un homme d’affaires, ont été à leur tour appréhendés par les services secrets iraniens. Le sociologue Kian Tajbakhsh, 45 ans, est détenu à Téhéran depuis le 11 mai. L’homme d’affaires Ali Shakeri n’a pas donné signe de vie depuis mars et, selon ses proches, est lui aussi en prison.
Tajbakhsh avait signé la pétition des intellectuels iraniens contre la conférence sur l’Holocauste organisée par Téhéran. Il travaillait comme consultant pour la Banque mondiale et la fondation Open Society du philanthrope américain George Soros. Il vient d’ailleurs d’être accusé par le quotidien (proche du pouvoir) Kayhan d’avoir «joué un rôle dans les plans colonialistes de la Banque mondiale en Iran». Titre de l’article : «L’arrestation du lien avec la fondation Soros». Ce «lien» avait déjà été évoqué par le ministre des Renseignements, Gholam Hossein Mohseni-Ejeie, pour justifier l’arrestation de Halah Esfandiari, le 8 mai. Selon le ministre, les «confessions» de l’universitaire ont permis aux autorités d’identifier le «manager et représentant de Soros» en Iran.
Ali Shakeri, quant à lui, appartient à un organisme comparable à la fondation Open Society : le Centre pour la construction de la paix de l’université de Californie, qui étudie comment les citoyens peuvent promouvoir la paix dans des sociétés divisées. Pour l’expert iranien Reza Moini, ces trois personnes sont loin d’être des opposants à la république islamique : «Au contraire, ils ont fait plus pour elle que ses représentants aux Etats-Unis». Selon lui, Téhéran veut «couper toute relation avec des organisations de la société civile ayant des attaches à l’étranger».
Ces arrestations sont «des prises d’otages» , souligne le chercheur. Elles sont survenues avant la rencontre lundi des ambassadeurs iranien et américain à Bagdad, pour voir comment rétablir la sécurité en Irak. Téhéran devrait proposer d’échanger ces prisonniers contre cinq responsables de ses services secrets arrêtés en Irak.
Enfin, une Franco-Iranienne, Mehrnoushe Solouki, est aussi retenue depuis son arrestation mi-février. Placée en détention pendant un mois, cette étudiante en journalisme a été libérée le 19 mars contre une caution de 80 000 euros. Mais sans passeport, elle ne peut quitter l’Iran.