The Washington Times, 7 décembre – De Tony Blankley – Vous rappelez-vous il y a quelques mois lorsque lon nous a dit que la CIA avait déterminé quil faudrait probablement 10 ans à lIran pour développer une bombe nucléaire ? Cétait dans tous les journaux et presque tout le monde sest senti vraiment soulagé. Ces alarmistes et bellicistes impétueux se sont certainement mis à notre place. Nous avions cité la déclaration dIsraël selon laquelle au printemps 2006, lIran pourrait avoir la bombe.
Mon dieu, que le temps passe vite. Cette semaine, Mohamed ElBaradei, président de lAgence Internationale de lÉnergie Atomique (AIEA) a confirmé la déclaration dIsraël au journal libéral britannique The Independent, et a déclaré que si Téhéran reprenait effectivement lenrichissement duranium dans dautres usines, comme ils ont menacé de le faire, il faudrait à lIran seulement « quelques mois pour produire une bombe nucléaire ».
Noublions pas, M. ElBaradei nest pas un lanceur de bombe fou (pour ainsi dire). Il est ce même diplomate dont ladministration Bush a récemment, et sans succès, tenté de bloquer la nouvelle nomination en tant que président de lAIEA parce quil ne saffirmait pas suffisamment et parce quil avait trop tendance à minimiser limportance du danger du développement nucléaire dans les pays musulmans.
En dépit du petit écart de M. ElBaradei de franchise directe, il demeure un vrai diplomate, dans le pire sens du terme. Après avoir acquiescé quil faudrait encore des mois pour que lIran ait la bombe nucléaire, il a poursuivi en expliquant que, dun autre côté, toute tentative de résolution de la crise par des moyens non diplomatiques « ouvrirait une boîte de Pandore, des efforts seraient faits pour isoler lIran ; lIran userait de représailles, et en fin de compte il faudrait revenir à la table des négociations pour trouver une solution ».
En même temps, ceux dentre vous qui ont une mémoire politique peu commune se souviendront peut-être quil y a 10 mois, en janvier 2005, le président Bush dans son discours sur létat de lUnion avait dit que lIran ne serait pas autorisé à développer une arme nucléaire. Il sagissait dune affirmation plate, sans aucun qualificatif (« Le régime iranien doit abandonner son programme denrichissement duranium et tout retraitement de plutonium »).
Et il est allé plus loin. Il a conclu sa péroraison sur ces mots édifiants : « Et au peuple iranien je dis ce soir : alors que vous défendez votre propre liberté, lAmérique la défend avec vous ». Cette expression a été reprise par la presse dans le monde entier, et en particulier par les sites Internet iraniens, en tant quappel à un changement de régime en Iran.
Malheureusement, quelques mois plus tard, le peuple dIran a élu avec une écrasante majorité Mahmoud Ahmadinejad, un islamiste radical leader présumé du gang qui a enlevé et tourmenté nos diplomates à Téhéran en 1979.
M. Ahmadinejad nest pas un gentil. Il a menacé de reprendre le programme nucléaire de lIran et a fait un pied de nez aux menaces de lAmérique contre cet acte. Il a été suffisamment peu diplomate pour affirmer dun ton railleur que nous navions pas assez de troupes pour larrêter (il a apparemment oublié larmée de lair. Jespère que nous non). Il a également proclamé son objectif de rayer Israël de la carte et a qualifié tout Musulman contre ce projet de mauvais Musulman.
Ce qui nous amène à « Hamlet » de Shakespeare, Acte Un, Scène Cinq, ligne 189 (dernier soliloque dHamlet dans lActe Un) : « Le temps est hors des gonds. Ô sort maudit, Qui veut que je sois né pour le rejointer ! »
Pour récapituler lActe un, Scène cinq : Le fantôme du père dHamlet demande à Hamlet de « [venger »> son meurtre horrible et monstrueux ».
Hamlet, tout comme M. Bush dans son discours sur létat de lUnion, a répondu à la hâte : « Vite, instruis-moi. Et dune aile aussi prompte que lintuition ou la pensée damour, je vole te venger ».
Puis le fantôme du père dHamlet lui apprend que son meurtrier est loncle dHamlet, le nouveau roi : « Le serpent dont le dard tua ton père porte aujourdhui sa couronne ».
Ce qui conduit Hamlet à douter, à avoir peur et à maudire dêtre né « pour le rejointer ».
Mais est-ce que George Bush est là à la maison blanche, se faisant du mauvais sang, car bientôt, terriblement bientôt, il devra agir pour retrouver son honneur et rattraper ses paroles audacieuses selon lesquelles lIran ne possèdera pas la bombe ? Est-il en train de se tourmenter pour savoir si le monde sera mieux avec un Iran nucléaire ou un Iran non nucléaire ? Sait-il que lIran doit être dénucléarisé, mais malédiction, comme Hamlet, sait-il que cest à lui de le faire ?
Peut-être. Mais jai le sentiment que George nest pas comme Hamlet, une tragédie, mais un Henri V déterminé, une partie de lhistoire, qui dit à ses troupes avant la bataille : « Une fois de plus dans la brèche, mes chers amis, une fois de plus ; Imitez maintenant les hommes de sang fier. Et apprenez leur à faire la guerre Car il ny en a aucun parmi vous aussi méchant et vil Qui nait pas de lueur brillante dans ses yeux. Je vous vois dressés comme des lévriers, Peinant à attendre le départ. Le jeu a commencé : Suivez votre esprit, et dans lattaque Criez Dieu pour Harry, lAngleterre et Saint George ».
Ou bien nous pourrions suivre le conseil de M. ElBaradei et négocier à tout prix avec un Iran nucléaire dirigé par des fanatiques, même si nous avons déjà négocié sans succès avec un Iran non nucléaire. Cela pourrait marcher.
Dun autre côté, on pourrait demander au fantôme de Neville Chamberlain comment ça sest passé pour lui en 1939.