Une offre que Téhéran peut refuser mais qui comporterait de grands risques pour le régime
The Times, 2 juin Editorial Loffre de ladministration Bush de se joindre aux négociations nucléaires avec lIran tombe à pic. Les conditions fixées par Washington, soit la suspension vérifiable de lenrichissement duranium et des activités de retraitement et une coopération totale avec les inspecteurs de lAgence internationale de lEnergie atomique, ne sont pas linitiative de lAmérique seule. Ce sont exactement les termes formulés par les 3E, cest-à-dire la Grande-Bretagne, la France et lAllemagne, et approuvés par le conseil de lAIEA et le Conseil de Sécurité de lONU.
Cest donc une offre que lIran refuse à lorigine, mais le régime doit savoir que continuer sur cette voie reviendrait à annoncer quil na aucun intérêt dans des négociations de bonne foi. Pendant des mois, lexcuse de lIran pour se retirer des négociations avec la Russie comme avec les 3E, était que l « hostilité » de lAmérique rendait les pourparlers inutiles. Cet alibi commode nest plus valable. Washington a non seulement accepté de négocier, mais a aussi reconnu le « droit » de lIran à lénergie nucléaire civile. LAmérique a promis que si lIran prouvait quil navait aucune intention dacquérir des armes nucléaires, les Etats-Unis « encourageraient activement » non seulement une coopération nucléaire civile, mais aussi « une coopération économique progressivement plus importante ». Tout en précisant que lIran devait abandonner son soutien au terrorisme international avant quun dialogue plus large puisse souvrir, Condoleezza Rice a souligné le désir du président Bush dune « relation bénéfique » avec les Iraniens.
Le fruite le plus juteux de tous pour Téhéran est, après un silence de 27 ans, que même des négociations limitées feraient une publicité énorme pour le président Mahmoud Ahmadinejad dans son pays. Il a toujours cherché à obtenir ce résultat sans beaucoup de tact, le plus récemment avec la missive sans queue ni tête et déclamatoire quil a envoyée à la Maison Blanche le mois dernier. LAmérique sera considérée comme ayant répondu à cet agitateur autoritaire avec des concessions quelle avait refusée à son prédécesseur modérément réformiste, le président Khatami. Cest là la conséquence fâcheuse dune décision que Washington a dû avoir des difficultés à prendre. Si le gouvernement uniformément radical de lIran accepte finalement cette offre, M. Ahmadinejad va se vanter de la victoire de sa stratégie de confrontation avec lOccident, signe de la force de lIran (et de la valeur de la stratégie de la corde raide dans la question nucléaire).
De plus, il nexiste aucune garantie contre lhypocrisie des Iraniens, qui peuvent faire semblant de négocier tout en fabriquant secrètement des centrifugeuses, repoussant le plus longtemps possible la menace de sanctions des Nations Unies pouvant, bien quelles soient limitées, nuire à un régime à court dargent malgré ses vastes revenus du pétrole. LIran joue toujours sur un terrain divisé dont les joueurs clés saccordent sur le fait quil ne doit pas obtenir darmes nucléaires, mais comme le montre les difficultés rencontrées pour la formulation des résolutions de lONU, ils ne sont toujours pas daccord sur la marche à suivre si Téhéran persistait dans son aventurisme nucléaire. Les Etats-Unis ont trouvé le bon point faible : laversion des Iraniens pour lisolation que la plupart dentre eux associent avec un antiaméricanisme quils ne partagent pas, et avec des années de répression et daggravation de la pauvreté. Les Etats-Unis ont laissé le sas de secours ouvert, acte qui fait pression sur le régime pour laisser les Iraniens émerger.