Le Monde, 25 novembre – Par Laurent Zecchini – Cest tentant de voir une corrélation entre les deux faits : au moment où les Européens viennent de transmettre à la Russie et à la Chine un nouveau texte proposant des sanctions contre l’Iran tenant compte des réticences de Moscou, Téhéran a fait plusieurs concessions, qualifiées de « pas dans la bonne direction » par Mohamed ElBaradei, directeur général de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA).
Alors que les autorités iraniennes se refusaient, depuis des mois, à remettre à l’Agence de Vienne des documents d’archives sur le fonctionnement de l’usine-pilote d’enrichissement d’uranium de Natanz, elles viennent d’obtempérer, comme l’a indiqué, jeudi 23 novembre, M. ElBaradei devant le conseil des gouverneurs de l’AIEA. Deuxième concession : l’Iran accepte que les inspecteurs de l’Agence puissent prélever des échantillons par frottis sur des équipements de l’ancien site nucléaire de Lavizan (longtemps interdit d’accès), pour y déceler d’éventuelles traces de radioactivité. L’AIEA reconnaît que sa tâche devrait en être facilitée, tout en regrettant que l’Iran « n’autorise pas un accès aux résultats » des opérations des deux cascades de 164 centrifugeuses installées à Natanz.
Les Européens ont demandé à Moscou et à Pékin de se prononcer rapidement sur leurs nouvelles propositions. Contrairement au projet initial qui visait l’ensemble du programme nucléaire et balistique de l’Iran, en prévoyant une seule exemption pour la centrale nucléaire civile de Bouchehr (construite par la Russie), le nouveau texte ne concerne que ses « activités les plus sensibles », explique un diplomate.
D’autre part, la Russie obtient une maîtrise complète de ses livraisons de combustible pour Bouchehr, ce qui signifie que rien ne s’opposerait au démarrage de la centrale en septembre 2007.
Les Etats-Unis ont par ailleurs manifesté leur satisfaction à la suite de la décision de l’AIEA de refuser à l’Iran une demande d’assistance financière (pour 222 139 dollars) destinée à « renforcer les équipements de sécurité » du futur réacteur à eau lourde d’Arak, potentiellement capable de produire du plutonium.
Après de longues discussions mettant aux prises Américains et Européens d’un côté, Chinois et Russes de l’autre, un compromis a été adopté : les sept autres projets de « coopération technique » déposés par l’Iran ont été acceptés, et celui concernant Arak a été « gelé » pour deux ans, selon Mohamed ElBaradei. L’ambassadeur américain auprès de l’AIEA, Gregory Schulte, a estimé que « cette décision consensuelle reflète l’inquiétude persistante du Conseil (des gouverneurs) concernant la nature du programme nucléaire iranien ». Téhéran a indiqué que le projet de réacteur d’Arak serait néanmoins mené à son terme.