Iran Focus, Londres, le 24 août 2005 – Manoutchehr Mottaki, 52 ans, le nouveau ministre des affaires étrangères de la République islamique d’Iran qui a reçu ce mercredi le vote de confiance du parlement ultraconservateur du pays a été impliqué dans une série d’attentats terroristes à l’extérieur de l’Iran selon les dissidents iraniens.
Plusieurs députés avaient en privé exprimées des inquiétudes sur le fait que Mottaki aurait des difficultés à voyager à l’étranger étant donné que les autorités turques lui avaient demandé de quitter le pays en 1989 à cause de son rôle dans plusieurs attentats terroristes en Turquie.
Iran Focus a appris que le porte-parole du parlement, Gholam-Ali Haddad-Adel, un ultraconservateur proche du guide suprême Ali Khamenei, avait rassurés en privé les députés en leur disant que l’Iran avait obtenu des assurances de la part des autorités turques qu’ils n’engageront aucune poursuite contre Mottaki.
Mottaki, a été jusqu’à présent le président de la sous-commission des affaires étrangères du parlement. Auparavant, il a été vice-ministre des affaires étrangères et a servi comme ambassadeur d’Iran en Turquie et au Japon.
A l’époque où il était étudiant à l’université Bangalore en Inde, Mottaki a été un islamiste radical, fervent défenseur de l’ayatollah Khomeiny. Peu après la chute du régime du Shah en 1979, il est retourné en Iran et a rejoint les rangs du Corps des gardiens de la Révolution (Pasdaran). Après avoir participé à une sanglante campagne de répression contre les dissidents Kurdes, Mottaki a rejoint le ministère des affaires étrangères en tant qu’officier de liaison chargé des relations entre ce ministère et les Pasdaran.
En 1985, Mottaki a été nommé ambassadeur d’Iran en Turquie. « Pendant qu’il était en poste à Ankara, les gardiens de la Révolution iranienne déguisés en diplomates ont perpétré en Turquie plusieurs attentats et ont assassiné plusieurs dissidents iraniens » affirme l’opposition iranienne. Dans les années 80 et au début des années 90, au moins 50 dissidents iraniens ont été kidnappés ou assassinés en Turquie par les agents secrets du régime travaillant souvent étroitement avec des diplomates en poste à l’ambassade et dans les consulats de l’Iran.
Pendant la période où Mottaki était ambassadeur en Turquie, l’ambassade d’Iran à Ankara et le consulat général d’Iran à Istanbul se sont transformé en centre d’espionnage et lieu de détention et de torture des dissidents exilés » affirme les opposants iraniens. Leurs affirmations ont été confirmées par d’anciens agents de services iraniens.
Dans son livre publié en 1993 et intitulé « Le fondamentalisme islamique, la nouvelle menace mondial », Mohammad Mohaddessine a précisé que Mottaki, avant de joindre les services diplomatiques du régime iranien, a été un membre du Corps des gardiens de la Révolution ». Mohaddessine affirme dans son livre que « Mottaki a été impliqué au moins dans deux tentatives d’assassinat contre les Moudjahedines du peuple ».
Mohaddessine qui est le président de la commission des affaires étrangères du Conseil national de la Résistance iranienne (CNRI) a été lui-même la cible d’une tentative échouée d’assassinat en mars 1990 en Turquie dans lequel un autre membre du CNRI a été grièvement blessé. A l’époque les médias officiels iraniens avaient précipitamment annoncé que « M. Mohaddessine a été assassiné à Istanbul ».
Par ailleurs, Abolhassan Mojtahedzadeh, un militant politique sympathisant de l’Organisation des Moudjahidines du Peuple d’Iran (OMPI) a été kidnappé en 1988 à Istanbul par des agents de services secrets iraniens. Il a été torturé dans les locaux du consulat général de l’Iran à Istanbul. Ensuite les diplomates du régime iranien l’ont ligoté et l’ont mis dans le coffre d’une voiture diplomatique pour l’emmener par la route vers l’Iran. La police turque les a suspecté et a procédé à l’inspection de cette voiture, à quelques kilomètres de la frontière iranienne. Les policiers ont ainsi découvert l’opposant iranien kidnappé dans le coffre de ce véhicule officiel de l’ambassade d’Iran en Turquie.
D’autres victimes n’ont pas pu survivre. Selon Amir Farshad Ebrahimi, un ancien membre du conseil central de « Ansar-e Hezbollah », un groupe de pression affidés aux dirigeants ultraconservateurs du régime, Mottaki a ordonné l’assassinat de deux Iraniens exilés en Turquie : Bahram Azarnia (Azarfar) et Mohammad Qaderi,. Le corps de Azarnia a été trouvé alors qu’il était criblé de huit balles. Qaderi a été enlevé et assassiné. Son corps a été trouvé deux jours plus tard par la police turque.
Le 7 août 1988, alors que Mottaki était encore ambassadeur d’Iran en Turquie, 58 ressortissants iraniens qui avaient fuis leur pays ont été remis par des autorités turques à l’ambassade d’Iran à Ankara. Quatre d’entre eux ont ensuite été trouvés morts dans la ville de Gomoush. Les 54 autres ont été sommairement exécutés dans la ville iranienne d’Ourmia dès qu’ils ont été transférés de l’autre coté de la frontière. Les services de sécurité turque ont révélé plus tard que, Manoutchehr Mottaki, avait donné des pots de vin aux fonctionnaires locaux en Turquie pour étouffer cette affaire.
Selon Ebrahimi, le 16 novembre 1988, moins de quatre mois après ces horribles assassinats, Mottaki a commandité l’enlèvement de neuf membres de l’OMPI. Trois d’entre eux ont été froidement assassinés. Les six autres ont été transférés vers l’Iran où ils ont été condamnés à prison à vie pour leur opposition au régime.
Parmi les actes terroristes attribués à Mottaki, il y a notamment l’enlèvement d’un ancien colonel de l’Armée de l’Air iranien en 1986. Mohammad Pedram a été kidnappé à Ankara et transféré de force vers Téhéran où il a été emprisonné dans la fameuse prison d’Evin avant d’être exécuté en 2001.
Les autorités turques ont demandé à Mottaki de quitter la Turquie en octobre 1989 pour son rôle dans les assassinats et les enlèvements perpétrés dans ce pays. La Turquie a acceptée de ne pas employer le terme « expulsion » pour permettre à l’Iran d’éviter une situation embarrassante. Cette expulsion a été présentée comme un banal changement d’ambassadeur.
Mottaki a ensuite été nommé vice-président de l’Organisation de culture et de propagande islamique, une institution créée par le guide suprême dans le but d’exporter la révolution islamique vers d’autres pays musulmans.