Reuters: par Ross Colvin – L’intention affichée par Barack Obama de retirer toutes les troupes américaines de combat d’Irak d’ici à la fin août subira un test crucial ce dimanche lors des élections législatives qui décideront de la tendance du prochain gouvernement.
Si le scrutin se déroule dans des conditions relativement bonnes, les "boys" seront rapatriés dans les délais promis par le président américain lors de sa campagne électorale. Mais il pourrait être forcé de revoir son calendrier en cas de reprise des affrontements intercommunautaires.
Il ne s’est accordé lui-même en janvier que très peu de marge de manoeuvre lors de son discours sur l’état de l’Union, en déclarant à ses compatriotes: "Toutes nos troupes de combats auront quitté l’Irak d’ici à la fin du mois d’août. Ne vous y trompez pas, cette guerre s’achève et tous nos soldats vont rentrer."
Barack Obama avait fait de l’Irak, où plus de 4.300 soldats américains ont été tués depuis l’invasion de mars 2003, un thème dominant de sa campagne, mais la crise mondiale et la dégradation de la situation en Afghanistan l’ont fait passer au second plan. Obama s’en est déchargé sur le vice-président Joe Biden.
L’heure de vérité est cependant arrivée pour lui.
Que fera-t-il si les dirigeants irakiens se chamaillent durablement pour savoir qui formera le prochain gouvernement et si des groupes comme Al Qaïda profitent du vide politique pour raviver les tensions ethno-religieuses, comme après les législatives de 2005, largement boycottées par les sunnites ?
"Ce qui nous inquiète, c’est que cette période est potentiellement périlleuse. Si on a l’impression d’un vide, de ne pas savoir qui est responsable, alors on peut craindre la manière dont sera comblé le vide", souligne un haut responsable américain souhaitant conserver l’anonymat.
Mais il se dit rassuré par le fait que, "au moins pour le moment" et "malgré les désordres", les Irakiens semblent avoir choisi de "résoudre leurs divergences par le biais du processus politique et non pas des bombes et des balles".
NE PAS PARTIR EN PLEIN CHAOS
Le général Ray Odierno, chef du contingent américain en Irak, a dit avoir prévu un plan d’urgence pour ralentir le retrait de ses hommes d’Irak si la situation l’exigeait, mais le secrétaire à la Défense Robert Gates a affirmé qu’il faudrait pour cela une "détérioration considérable" de la sécurité.
Odierno pense toujours réduire de 96.000 à 50.000 hommes les effectifs américains dans les six mois qui viennent. Au Congrès, où les démocrates sont majoritaires, peu nombreux sont ceux qui remettent en cause ce processus de retrait.
"Je ne trouve aucun soutien parmi mes collègues pour autre chose que la poursuite soutenue du retrait", déclaré William Delahunt, représentant démocrate à la commission des Affaires étrangères de la Chambre. "Nous sommes allés là-bas et c’est le moment pour les Irakiens de prendre leurs propres décisions."
Washington, qui assure n’avoir aucun favori, souhaite la formation rapide d’un gouvernemental stable et amical, tout en reconnaissant que cela pourrait prendre des semaines ou des mois et en redoutant l’émergence d’un cabinet proche de l’Iran.
Même si Obama veut tourner la page aussi vite que possible, il ne souhaite pas quitter un pays en plein chaos.
Il n’est pas exclu que Washington ou Bagdad demande à réviser le pacte de sécurité conclu en 2008, qui prévoit qu’un nombre limité de soldats américains restent en Irak au-delà de 2011 pour encadre l’armée irakienne.
"Lorsqu’on vend à un pays du matériel de pointe et que l’on est étroitement associé à son armée, il est probable que, quel que soit celui qui est au pouvoir, on vous demande de rester", fait valoir Brett McGurk, un ancien de l’administration de George Bush qui a contribué à la négociation du pacte.
Après avoir investi tant de sang et de milliards de dollars en Irak, il n’est pas anormal que les Etats-Unis, même dirigés par un président qui a voté contre la guerre du temps où il n’était encore que sénateur, veuillent s’assurer que leurs sacrifices n’auront pas été vains.
Joe Biden s’est déclaré convaincu le mois dernier que l’Irak pourrait être "l’un des grands accomplissements de cette administration".
Version française Marc Delteil