AFP, 19 mai – L’Iran a prévenu jeudi que sa décision de reprendre certaines activités nucléaires sensibles était « irréversible » malgré la menace de se retrouver devant le Conseil de sécurité de l’Onu si aucun accord de dernière minute n’est trouvé avec les Européens lors d’une prochaine rencontre.
Cette réunion, qui pourrait mettre face à face mardi à Bruxelles les ministres allemand, britannique et français des Affaires étrangères et le dirigeant iranien en charge du nucléaire, Hassan Rohani, « n’est pas encore certaine », a déclaré à l’AFP un des négociateurs iraniens, Hossein Moussavian.
« Pour que cette réunion ait lieu, il faut que les experts s’entendent au préalable sur les bases d’un accord acceptable par les deux parties », a-t-il dit, précisant que cela n’était « pas encore le cas ».
La rencontre, que les Iraniens ont présentée comme celle de la « dernière chance », devrait être précédée lundi d’une réunion préparatoire avec les directeurs politiques des ministères allemand, français et britannique et les représentants iraniens.
Or M. Moussavian a redit le refus iranien de renoncer à reprendre des opérations relatives à l’enrichissement d’uranium, au risque de faire péricliter des mois de négociations qui ont, jusqu’alors, tenu au loin la perspective du Conseil de sécurité.
La décision de redémarrer l’usine de conversion d’uranium d’Ispahan « est irréversible », a-t-il dit.
« S’il n’y a pas d’accord, il est possible que l’Iran reprenne ses activités à Ispahan avant la présidentielle », le 17 juin, a-t-il ajouté.
Ispahan (centre) convertit l’uranium, opération préliminaire à l’enrichissement proprement dit, qui s’effectuerait à Natanz (centre également).
En cas d’accord avec les Européens sur Ispahan, les Iraniens sont prêts à maintenir la suspension de l’enrichissement à Natanz, mais seulement « quelques mois », a-t-il ajouté.
C’est précisément la décision de commencer à convertir qui menace les pourparlers.
Les Européens ont obtenu en novembre une suspension par les Iraniens de toutes les activités relatives à l’enrichissement, y compris la conversion.
Les Européens, alarmés comme une grande partie de la communauté internationale par 18 années de dissimulations des Iraniens, veulent obtenir un renoncement à l’enrichissement, seule garantie probante pour eux que la République islamique ne fabrique pas l’arme nucléaire.
Ils offrent en contrepartie une coopération nucléaire, commerciale et politique.
Mais les Iraniens sont mécontents de l’état des travaux. « Au cours de tous ces mois, les Européens ne nous ont rien offert de satisfaisant », a critiqué M. Moussavian.
« Nous proposer des pièces de rechange pour nos avions au bout de plusieurs mois de négociations, c’est une blague. C’est autre chose de nous offrir une véritable coopération nucléaire, économique et politique », a-t-il dit.
Les Iraniens voudraient ainsi un engagement européen à construire dix centrales nucléaires civiles, a-t-il dit. Selon des sources diplomatiques, ils voudraient aussi un engagement de l’Union européenne à les approvisionner en combustible nucléaire, pour compléter leur propre production. Ils envisageraient aussi la signature de contrats d’armement.
Le 30 avril, les Iraniens ont annoncé qu’ils allaient redémarrer Ispahan.
Une telle initiative « mettrait un terme au processus de négociations. Les conséquences ultérieures ne pourraient être que négatives pour l’Iran », ont écrit les ministres européens à M. Rohani, selon une copie de la lettre.
Le ministre britannique Jack Straw a clairement évoqué un recours au Conseil de sécurité, préconisé depuis des mois par les Etats-Unis.
La menace du Conseil de sécurité n’a jamais paru aussi grande depuis octobre 2003 quand l’Iran, confronté à un ultimatum de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), avait accepté, lors d’une visite historique des trois ministres européens, de soumettre ses activités à un contrôle renforcé et de suspendre l’enrichissement.