Le Monde, Washington, 22 septembre Par Corine Lesnes Les Etats-Unis et la France privilégient la solution diplomatique pour amener l’Iran à cesser l’enrichissement d’uranium. A l’issue d’un tête-à-tête suivi d’un déjeuner de travail à Washington, les chefs des diplomaties américaine et française, Condoleezza Rice et Bernard Kouchner, ont affirmé, vendredi, leur unité de vue alors que leurs négociateurs cherchaient avec les autres pays du groupe de sanctions sur l’Iran (Chine, Russie, Allemagne, Royaume-Uni) à renforcer leurs moyens de pression sur Téhéran.
Lors de leur conférence de presse commune, Mme Rice et M. Kouchner ont exposé les différentes voies par lesquelles ils cherchent à amener l’Iran à suspendre son programme d’enrichissement. Une réunion d’experts européens a eu lieu vendredi matin, a dit M. Kouchner, pour explorer la formule désormais préconisée par la France, de sanctions en dehors du régime de l’ONU. Celles-ci porteraient sur « le système bancaire et industriel de l’Iran ». Une autre réunion, des membres permanents du Conseil de sécurité plus l’Allemagne, présidée par l’Américain Nicholas Burns, a commencé à explorer parallèlement les éléments d’une nouvelle résolution à l’ONU. Les ministres poursuivront la discussion le 28 septembre à New York, a indiqué M. Burns.
UNE VOIE « INTÉRESSANTE »
M. Kouchner a aussi parlé d’une autre voie qu’il trouve « personnellement tout à fait intéressante » : celle qu’a entrepris d’explorer le directeur de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) Mohamed ElBaradei. Celui-ci a conclu, le 21 août, un accord avec la république islamique sur la mise au jour par l’Iran de son programme nucléaire antérieur à 2002. L’initiative de M. ElBaradei avait été désapprouvée mi-septembre par les Etats-Unis mais aussi par la France. Lors d’une conférence de presse, jeudi, M. Kouchner a indiqué qu’aucune résolution ne pourrait être adoptée tant que M. El-Baradei n’aurait pas fait sa première évaluation du degré de coopération des Iraniens en novembre.
Alors que les Etats-Unis poussent à accentuer l’étranglement de l’Iran, le Wisconsin Project on Nuclear Arms Control, un organisme indépendant spécialisé dans les questions de non-prolifération, vient de montrer qu’ils n’ont pas encore réussi à appliquer les sanctions précédentes. Sur les 25 individus désignés par le Conseil de sécurité, deux seulement ont jusqu’à présent été soumis à restrictions aux Etats-Unis. Sur les 25 compagnies répertoriées, 8 n’ont pas vu leurs avoirs gelés.
Les raisons invoquées sont d’ordre pratique, liées à la bureaucratie et à l’absence de relations diplomatiques entre Washington et Téhéran. Les Etats-Unis estiment manquer de précisions suffisantes sur les identités et les numéros de passeport. Les formalités sont aussi ralenties par le fait que le dossier est géré à la fois par le département du Trésor et par le département d’Etat. Les experts du Wisconsin Project sont d’autant plus étonnés que les listes de l’ONU sont généralement réalisées à partir des listes américaines.