Christian Science monitor, 20 juillet Par John Hughes * Depuis Paris au téléphone, dans un anglais tinté dun fort accent étranger, Maryam Radjavi déclare : « Jespère quun jour nous pourrons nous voir à Téhéran ». Puis, sexcusant pour son anglais, elle ajoute : « Nous continuerons cette interview [par le biais dun interprète »> en persan. »
Mais quel que soit la langue dans lequel il est présenté, son message est celui de la frustration face à lorientation extrémiste dans sa patrie iranienne, et celui de lespoir de voir ce quelle appelle « lapaisement » de lIran par une action plus agressive.
Mme Radjavi dirige le Conseil national de la résistance iranienne (CNRI), le front politique des militants des Moudjahidine du peuple, qui avec des milliers dautres Iraniens en exil, aspirent au renversement du régime des mollahs en Iran.
Lélection récente du président Mahmoud Ahmadinejad, un ultra, est largement interprétée comme une mesure des mollahs pour consolider leur pouvoir. Mme Radjavi lappelle un « terroriste » qui, dit-elle, a été impliqué dans une tentative dassassinat de Salman Rushdie et dautres ennemis du régime iranien. Elle a rejeté lélection comme une mascarade, manipulée par « un bourrage des urnes » et limpression de « 5 millions de fausses cartes didentité », et « 15 millions de dollars aux gardiens de la révolution pour produire de faux bulletins de vote ». Mais elle pense que le régime est sur la défensive, opérant sur une « base amaigrie » et donc vulnérable à une nouvelle politique agressive de lOccident.
Comment voit-elle cela évoluer ? Une offensive de propagande ? Un programme de diffusion par les ondes de valeurs démocratiques en Iran ? Des incursions frontalières par des militants des Moudjahidine ? Tout cela est possible, songe-t-elle, mais elle rejette les options dune « intervention militaire étrangère » et de la « complaisance occidentale ».
Il y a une troisième option, dit-elle : le soutien de loccident au peuple iranien et au mouvement de résistance une « énorme libération dénergie qui est enfermée » – en soutien à un changement démocratique en Iran.
L « énergie enfermée » à laquelle elle fait allusion comprend les 3500 et quelques combattants Moudjahidine retenus en détention protectrice par les forces américaines en Irak. Sous Saddam Hussein, ils étaient autorisés à utiliser lIrak comme une base pour les opérations de guérilla contre le régime iranien. Mais avec linvasion américaine, ils ont été neutralisés et limités. Les Américains ont mis depuis longtemps les Moudjahidine sur leur liste dorganisations terroristes pour leur soutien à la prise de lambassade américaine à Téhéran en 1979. Mais leurs dirigeants avancent que les temps ont changés, la marque de terroriste peut être retirées et les Moudjahidine libres dopérer contre le régime iranien actuel.
Particulièrement, Radjavi veut que les Etats-Unis dirigent les efforts pour déférer lIran devant le Conseil de sécurité de lONU pour son « soutien au terrorisme, son développement des armes atomiques et ses violations des droits de lhomme ». Cela, dit-elle, enverrait un signal stimulant à lopposition en Iran, donnerait de lénergie aux cellules en Iran avec lesquelles le CNRI est en contact et rapprocherait la perspective dun changement de régime.
« Lintégrisme et la terreur islamistes sont en pleine croissance », dit-elle « et lépicentre se trouve à Téhéran. »
La réponse, avance-t-elle, nest pas une invasion militaire étrangère de lIran mais une « solution politique, culturelle et idéologique ». Cela doit venir de lémergence dune force musulmane vouée à la démocratie et de « larrêt de lhorloge nucléaire ».
On pense que les agents des Moudjahidine en Iran ont été essentiels pour fournir des informations sur les sites denrichissement de luranium montés par le régime dans sa quête darmes nucléaires. Dans le cas de lIrak, ladministration Bush sest faite fourvoyée par des groupes en exil prétendant avoir des preuves darmes de destruction massive qui se sont avérées fausses.
On comprend donc quil y ait des questions sur la qualité des renseignements offerts par les Iraniens en exil. Des experts à Washington traitent les informations des Moudjahidine iraniens avec scepticisme, dautres avancent que les Moudjahidine ont un bon bilan avec ce genre dinformations révélées par le passé.
Il y a des divisions similaires à Washington sur la valeur politique du CNRI. Certains membres du Congrès sont pour débarrasser lorganisation de toute connotation terroriste, comme certains dans laile droite du gouvernement Bush. Dautres voient lorganisation dun mauvais il.
Cependant, alors que lIran semble durcir sa position sur le droit de développer son programme denrichissement, et que les Etats-Unis et leurs alliés européens réfléchissent sur une alternative davantages ou de pressions qui pourraient pousser Téhéran à se désister, le rôle dorganisations iraniennes en exil comme le CNRI va continuer dêtre un sujet de discussion.
* John Hughes, un ancien rédacteur du Monitor, a été sous-secrétaire dEtat dans le gouvernement Reagan.