The Associated Press, 7 novembre – Les Etats-Unis intensifient leur pression sur la lucrative industrie pétrolière iranienne en visant des entreprises pour la première fois depuis le début de la crise nucléaire. Mais l’attaque reste limitée par crainte que des mesures trop radicales se révèlent in fine plus dommageables pour l’économie américaine que pour l’Iran.
Washington est en effet confronté à un dilemme. En imposant des sanctions lourdes à l’industrie énergétique iranienne, les Américains risquent de faire bondir les cours du pétrole, déjà à des niveaux records, et donc, par contrecoup, d’enrichir Téhéran. Avec un baril approchant des 100 dollars, les Etats-Unis ont peu de marge de manoeuvre.
« Si le baril atteint les 100 dollars, il est probable que les Iraniens se disent -et pas forcément à tort- que le régime parviendra toujours à s’en sortir, quelle que soit la sévérité des sanctions », explique Matthew Levitt, ancien expert en terrorisme au département du Trésor, désormais à l’Institut Washington sur le Proche-Orient.
Les spécialistes estiment qu’il reste essentiel de porter un coup à la rente pétrolière iranienne, même si cela doit se faire à long terme. Les exportations, qui drainent des milliards de dollars dans les caisses de l’Etat, confortent en effet le pouvoir de Mahmoud Ahmadinejad et l’incitent à défier la communauté internationale.
Pour Matthew Levitt, les sanctions annoncées la semaine passée par Washington à l’encontre d’une dizaine d’entreprises iraniennes du secteur pétrolier soupçonnées d’avoir des liens avec les Gardiens de la Révolution, corps d’élite iranien impliqué dans le terrorisme et la prolifération nucléaire selon la Maison Blanche, relevaient du simple « avertissement ».
Mais même si les Etats-Unis voulaient se montrer plus dur dans leurs sanctions, il resterait difficile d’entraver les ventes de pétrole iranien alors que la demande mondiale est en pleine croissance. « A moins d’un blocus terrestre et maritime, il se trouvera toujours des acheteurs pour le pétrole iranien », constate Karim Sadjadpour, spécialiste de l’Iran à la Fondation Carnegie pour la paix internationale. Le pétrole est en effet une matière première négociable: si des pays suivaient la voie du boycott, Téhéran trouverait facilement d’autres acquéreurs, notamment des entreprises européennes ou chinoises.
Karim Sadjadpour considère qu’il serait plus efficace de faire pression sur l’Iran en abaissant les cours mondiaux du pétrole. « Si vous parvenez à descendre le cours à 60 dollars le baril, (Téhéran) pourrait revoir ses calculs. »
Reste que les Américains n’ont guère les moyens d’y parvenir. A court terme, la seule option consisterait à persuader l’Arabie saoudite d’augmenter fortement sa production, poursuit l’expert. Il reste toutefois douteux que Riyad souhaite et puisse suivre cette voie. En outre, rien n’indique que Washington se dirige vers cette stratégie.
Face à toutes ces contraintes, les Etats-Unis ont choisi la voie médiane.
Même parmi les adeptes des nouvelles mesures, comme Levitt, certains reconnaissent que les sanctions américaines unilatérales n’ont aucune chance de modifier l’attitude de l’Iran à elles seules.
Les responsables américains semblent néanmoins compter sur le pétrole et sur d’autres sanctions pour exploiter la principale faiblesse du président iranien: la colère croissante de la population face au mauvais état de l’économie et le mécontentement des politiques, déçus par la mauvaise gestion de Mahmoud Ahmadinejad. AP