AFP, 2 janvier 2009 – Par Lachlan CARMICHAEL : Six jours d’offensive israélienne contre le le mouvement islamiste Hamas soutenu par l’Iran ont jusqu’ici renforcé le front iranien anti-américain et risquent de compliquer la tâche du président élu américain Barack Obama, estiment des experts aux Etats-Unis.
Il y a un peu plus d’un an, le président George W. Bush avait soulevé l’espoir de contrecarrer l’influence croissante de Téhéran dans la région en relançant le processus de paix israélo-palestinien au cours d’une conférence internationale à Annapolis, près de Washington.
Mais l’offensive israélienne entamée samedi, a renforcé le Hamas pro-iranien, et affaibli l’autorité palestinienne, rivale du mouvement islamiste soutenue par Washington et partenaire des négociations avec Israël, selon des experts.
Et selon eux, l’opération a aussi provoqué d’autres dommages collatéraux dans la région.
L’Egypte et la Jordanie, partenaires clés des Américains et seuls alliés arabes en paix avec Israël, sont sur la défensive suite à des accusations d’Etats arabes, de groupes radicaux ou de l’opinion publique les accusant de ne rien faire pour arrêter Israël ou de tacitement accepter l’opération.
"Le camp centré autour de l’Iran et la Syrie, du Hezbollah et du Hamas, a plus d’influence maintenant à cause de ce qui se passe dans la rue arabe", estime Amr Hamzawy, expert du Carnegie Endowment for International Peace.
Mais, a-t-il ajouté au cours d’une conférence de presse téléphonique, l’Egypte et la Turquie – état musulman sunnite allié des Etats-Unis – peuvent encore renverser la situation s’ils parviennent à obtenir un cessez-le-feu "durable", comme prôné par Washington.
Le Hamas n’a pas rejeté cette possibilité, a-t-il noté.
Il a aussi souligné que la région était à nouveau clairement divisée entre les camps pro-iranien et pro-américain, l’Egypte, la Jordanie et l’Arabie saoudite accusant le Hamas sunnite de servir les intérêts de l’Iran chiite.
David Schenker du Washington Institute for Near East Peace s’attend pour sa part à ce que l’Iran réfrène le Hezbollah chiite libanais de renouveler sa guerre avec Israël après le conflit de l’été 2006, du moins tant que l’Etat hébreu n’envahit pas Gaza.
Pour le moment, le chef du Hezbollah Hassan Nasrallah "va continuer à critiquer et gêner les Etats arabes alignés sur l’Occident comme l’Egypte et la Jordanie, qui selon lui s’associent pour imposer les conditions de la reddition à ceux qui résistent au projet américano-sioniste", dit-il dans un article publié sur le site de l’institut.
"En fomentant la révolte civile dans ces Etats, Nasrallah engrange des soutiens pour le Hamas, fragilise les alliés de Washington et confirme son propre rôle pré-éminent au niveau régional", ajoute M. Schenker.
"Au lieu de lancer des roquettes sur Israël et d’entraîner le Liban dans une autre guerre coûteuse, cette stratégie est relativement efficace et une démonstration à moindre frais du sérieux de l’engagement du Hezbollah en faveur du nationalisme arabe et de la résistance pro-palestinienne", dit-il.
Steven Cook, du Council of Foreign Relations, estime également que la violence rend la tâche des Etats-Unis pour promouvoir la paix au Proche-Orient plus difficile, et permet à l’Iran de "jouer la carte arabe" et d’étendre son influence au détriment des intérêts américains.
"Déjà on voit les Syriens suspendre les discussions de paix indirectes avec Israël, via les Turcs, qui étaient prometteuses. (Le président élu Barack) Obama a dit qu’il s’agirait d’une des priorités de son administration", écrit-il sur le site de l’institut.
"La situation est extrême. A très court terme, il n’y a pas grand chose à faire, mais cela devrait être l’une des priorités lorsque le président (Obama) entrera dans le bureau Ovale", a-t-il souligné.