IranIran (actualité)Le polar persan de "Téhéran"

Le polar persan de « Téhéran »

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ImageJDD: Par Alexis Campion- Prix de la critique à Venise, une plongée édifiante dans les petits trafics à Téhéran. Un polar interdit de Nader Homayou.

 "Même si mon film n’est pas distribuable en Iran, j’estime avoir formulé une critique positive et je suis prêt à discuter avec les autorités." Calme et précis, Nader T. Homayoun n’est pas seulement un cinéaste extrêmement prometteur, c’est un diplomate né. Pour avoir passé le début de son enfance à Paris, il parle un français impeccable. En 1978, il a dix ans lorsque ses parents, opposants au shah, reviennent au pays chargés d’espoirs. "Je suis passé sans transition de Casimir et Goldorak à la Révolution islamique", raconte-t-il. Sauf que son père, intellectuel démocrate propulsé quelques mois au poste de vice-ministre de la Culture, a sitôt déchanté vu plusieurs de ses amis se faire fusiller ou choisir l’exil, avant d’être lui-même emprisonné quatre ans.

Nader T. Homayoun, lui, a fini sa scolarité en Iran et n’est retourné en France qu’en 1993 à la faveur de son intégration à la Femis, grande école parisienne de cinéma. Car sa double culture d’enfance est aussi cinéphile. Tout au long des années 1980, avide de copies de VHS occidentaux distribués sous le manteau, il s’improvise critique de films. "Le cinéma était le seul moyen de garder un contact avec l’extérieur et de ne pas se laisser enfermer mentalement.

Un tournage à risques
En 2004, basé à Paris, il signe un documentaire remarqué et organise au Forum des images un festival intitulé "Téhéran, portrait de la ville des années 1930 à nos jours". "J’avais réussi à montrer une cinquantaine de films de l’époque du shah." Des œuvres alors interdites en Iran. "Et pourtant très riches par leur aspect historique et documentaire. C’est là que mon envie de prendre la capitale pour décor et personnage principal s’est précisée." Et qu’il décide, avec le soutien de producteurs français, d’opter pour un polar. "En Iran, depuis la révolution, le discours nationaliste a enferré de nombreux créateurs dans un complexe que je n’ai pas. Ma culture occidentale m’a permis de tenter autre chose, sans pour autant porter préjudice à cette idée nationale."

Le tournage ne s’est pourtant pas fait sans risques. "Nous avons été contrôlés à plusieurs reprises, et même arrêtés une fois. Mais dans le feu de l’action, on oublie la peur. Ce qui-vive aiguise même la rigueur." Sans autre autorisation que celle de filmer des bâtiments publics pour un supposé documentaire, les scènes cruciales sont tournées au pas de charge, en intérieur ou loin de la ville. Une équipe, si légère soit-elle, attire toujours les regards et les questions d’indics en civil. "Le chef opérateur, Rémi Mazet, a de longs cheveux roux. On voit bien qu’il n’est pas iranien ! Mais cela nous a aussi attiré de la sympathie, une envie de dialogue, pas seulement de contrôle." Eternelle ambivalence d’une théocratie jalouse de son ordre mais fière de ses cinéastes, même interdits? "La plupart des Iraniens connaissent des festivals comme celui des 3 Continents à Nantes, car chaque fois que l’un de nos cinéastes y gagne un prix, on en fait écho dans la presse alors que le film ne sortira pas sur place! Cette immense fierté a, elle aussi, fait grandir mon désir de cinéma."

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