Le Figaro, 9 août – L’Iran a choisi la confrontation avec l’Occident afin de poursuivre son programme nucléaire. Même si Téhéran nous a habitués à la dramatisation, même si la diplomatie européenne cherche une issue pour masquer son échec, la reprise de la conversion d’uranium à l’usine d’Ispahan est un acte sans retour, annonciateur d’une grave crise internationale.
Les Iraniens diront qu’ils n’ont pas repris l’enrichissement de l’uranium. Mais l’on ne transforme pas le minerai en gaz si ce n’est pour l’enrichir, opération nécessaire à la fabrication de la bombe. Et l’Iran, deuxième puissance pétrolière au monde, ne trompe personne en prétendant que tout cela ne vise qu’à produire de l’électricité.
Les Européens ont convoqué pour aujourd’hui une réunion du conseil des gouverneurs de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA). Ils ont prévenu qu’ils recommanderaient la saisine du Conseil de sécurité de l’ONU en vue de l’adoption de sanctions contre l’Iran, comme le préconisaient depuis longtemps les Etats-Unis. Vu l’intransigeance de Téhéran, inutile de tergiverser. Il n’y a pas d’autre voie.
Les Iraniens n’agissent pas sur un coup de tête. S’ils lèvent la suspension des activités d’enrichissement qu’ils s’étaient imposée il y a huit mois, c’est qu’ils y voient leur intérêt. Des négociations avec les Européens, ils ne pouvaient attendre davantage que les offres qu’ils viennent de refuser : une coopération politique, commerciale et énergétique très détaillée, avec la garantie de fourniture de combustible nucléaire pour un programme civil.
Le régime des mollahs flatte le nationalisme de son opinion en faisant du droit à l’enrichissement plus exactement à l’arme atomique un thème rassembleur. Le durcissement perceptible depuis l’élection du président Ahmadinejad répond à cet impératif de politique intérieure.
Plus inquiétantes sont les motivations techniques qui ont pu présider au choix de la confrontation. Qu’ils mènent ou non un programme nucléaire clandestin, les Iraniens ont voulu se libérer de toute contrainte. Une fois acquis le savoir-faire nécessaire à l’enrichissement, il leur sera facile de produire très vite une bombe atomique. Dans quelques mois ou quelques années ? Le compte à rebours est lancé.
Le ton de la réponse iranienne aux Européens est intraitable et montre combien Téhéran se sent en position de force. Les Etats-Unis sont trop occupés en Irak pour envisager une frappe militaire. L’attention d’Israël est toute tournée vers le retrait de Gaza. La Grande-Bretagne est absorbée par la chasse aux terroristes. Quant aux sanctions éventuelles, la flambée du cours du pétrole met l’Iran à l’abri d’un embargo qui pénaliserait les pays consommateurs.
Il ne reste plus aux pays occidentaux qu’à rester unis dans leur détermination. Il n’y a pas de cause plus légitime que d’empêcher un régime proclamant sa volonté de détruire Israël et soutenant des mouvements terroristes de se doter de l’arme nucléaire.