Washington Post, 12 janvier, Éditorial – LA REPRISE EN IRAN de lenrichissement de luranium réduit de façon spectaculaire les options des gouvernements occidentaux qui espèrent empêcher le régime islamique de se procurer des armes nucléaires. La levée des scellés à son usine de Natanz mardi viole directement un accord que Téhéran a signé avec la Grande-Bretagne, la France et lAllemagne en 2004 prévoyant la suspension de son programme denrichissement ; lEurope devrait alors cesser de croire que des faveurs économiques puissent être échangées contre un gel permanent.
La proposition russe relative à lenrichissement de luranium iranien na pas plus de chances daboutir : Téhéran a annoncé la reprise des travaux, soi-disant de recherche, avant de donner sa réponse à Moscou. Lidée dun « grand marché » conclu entre lIran et lOccident a été tournée au ridicule par les tirades du président Mahmoud Ahmadinejad, qui a nié lexistence de lholocauste de manière encore plus énergique que lorsquil nie que lIran a lintention de devenir une puissance nucléaire. De plus, grâce à une meilleure stratégie de la part de ladministration Bush, les gouvernements européens ne disposent plus désormais de loption de blâmer les États-Unis pour léchec de la diplomatie.
Ce qui laisse place à la stratégie pour laquelle les États-Unis faisaient pression pendant tout ce temps : le renvoi du dossier de lIran devant le Conseil de Sécurité. Un tel renvoi, qui doit être décidé par le conseil des gouverneurs de lAgence Internationale de lÉnergie Atomique, ne changera probablement pas le comportement de lIran, ni ne mènera à une action de la part du Conseil de Sécurité : cela fait trois ans que la Corée du Nord comparait devant le conseil et sans aucun résultat. Mais ayant promis une telle réponse dans le cas dune reprise de lenrichissement, les gouvernements européens doivent maintenant avancer. Sils reculaient devant lidée de renvoyer lIran devant le Conseil de Sécurité, lOccident perdrait le peu de crédibilité quil lui reste aux yeux de Téhéran et éliminerait pratiquement la possibilité dune solution pacifique.
Dans létat actuel des choses, la réponse faible à la dernière provocation en date de lIran, cest-à-dire la réouverture de son site de conversion duranium en août, a probablement encouragé lescalade de cette semaine. Les gouvernements européens ont délivré des déclarations furieuses et ont soutenu une résolution de lAIEA relative au renvoi de lIran devant le conseil à un moment indéfini. Dans les semaines qui ont suivi, toutefois, ils sont revenus à la même stratégie de négociations qui avait déjà échoué, proposant de reprendre les pourparlers avec lIran et appuyant lintervention de la Russie. Ladministration Bush, elle aussi, a soutenu cette mesure, tout en conservant sa stratégie visant à former une coalition plutôt que de se disputer avec les alliés à propos de tactiques. Et finalement, la réponse à la belligérance de lIran a été encore plus dapaisement.
Les mollahs comptent sur le fait que la même chose se produira encore dans ce cas : les gouvernements européens vont une fois de plus chercher à gagner du temps, ou bien la Russie et la Chine vont bloquer toute action significative devant le Conseil de Sécurité. Même si les Européens réagissent fermement et que lAIEA adopte une résolution, ce dernier calcul est probablement juste. La Russie, qui vient de signer un contrat de vente darmes d1 milliard de dollars avec lIran, est de plus en plus hostile aux initiatives de lOccident ; et la Chine est un grand consommateur de pétrole iranien. Alors que les ressources du Conseil de sécurité doivent être testées, les gouvernements occidentaux devraient aussi commencer à façonner une politique de sanctions et dendiguement de lIran quune coalition pourrait faire appliquer. A cela devrait sassocier un effort plus concerté pour soutenir la grande majorité de la population iranienne qui aspire à se libérer de la loi cléricale répressive. Sil doit y avoir une alternative crédible à la frappe militaire contre les installations iraniennes, ou la concession darmes nucléaires à un régime qui réclame ouvertement quIsraël soit rayé de la carte, il est temps désormais que lEurope et les États-Unis se mettent daccord sur celle-ci.