Iran Focus, Londres, 13 mars De John Hansen Les hauts responsables iraniens, menés par le guide suprême Ali Khamenei, se sont ralliés pour déclarer leur soutien à la position de défi choisie par lIran dans la poursuite de son programme nucléaire à la suite de la décision du conseil des gouverneurs de lAgence internationale de l’énergie atomique de renvoyer lIran devant le Conseil de Sécurité.
Layatollah Ali Khamenei a déclaré lors dune réunion de dignitaires religieux jeudi à Téhéran que la théocratie prendrait de lavance dans son programme nucléaire.
« La population et les dirigeants de la République islamique dIran vont lutter avec plus de force que jamais et avec une volonté de fer face aux pression et aux conspirations et ( ) vont continuer leur chemin vers lacquisition de technologies avancées, dont lénergie nucléaire », a déclaré Khamenei.
Le président radical iranien, Mahmoud Ahmadinejad, a affirmé lors dun meeting dans louest de lIran : « Certaines puissances croient quelles peuvent se réunir, organiser une session [du Conseil de Sécurité »> et forcer la nation iranienne à battre en retraite ». Il a poursuivi en disant : « Le temps des menaces est terminé ».
Mais ce flot de déclarations rigides ne parvient pas à camoufler les signes indubitables de la détresse et de lanxiété à lintérieur et à lextérieur de la théocratie au pouvoir, tandis que lorganisme mondial sapprête à se réunir à propos de lIran la semaine prochaine.
« La plus grande défaite diplomatique »
« Cest la plus grande défaite diplomatique quait jamais connu la République islamique », a déclaré dun ton découragé Mohsen Aminzadeh, ancien vice-ministre des Affaires étrangères sous Khatami. Lancien président Mohammad Khatami a lui-même averti que « les relations étrangères de lIran sont en proie à une crise » et que la théocratie faisait face à « de grands problèmes pour lavenir ».
« Nous ne devons pas donner à nos adversaires des excuses pour augmenter la pression internationale sur lIran », aurait affirmé Khatami selon le journal Charq.
Kayhan, un quotidien influent, a descendu en flammes « des soi-disant réformateurs, franchement effrayés et intimidés, comme si la politique [de lIran »> allait mener à une grande calamité qui retomberait sur le pays ».
Le journal cherchait à rassurer les Iraniens en affirmant que ces risques en valaient la peine parce qu « un Iran qui détient la capacité nucléaire serait une puissance régionale sans égale ».
« On ne peut évaluer le prix dun tel atout », a conclu le quotidien.
Malgré les déclarations inflexibles des dirigeants radicaux iraniens, le ministre du Pétrole iranien a rapidement réagi pour assurer au marché mondial que les exportations de pétrole iranien continueraient, même si le Conseil de Sécurité imposait des sanctions à Téhéran. Ses propos ne cadrent pas avec les menaces proférées par un certain nombre de hauts responsables, dont le président, qui ont fait allusion à lusage de larme du pétrole si des mesures punitives étaient adoptées contre lIran.
Un désarroi croissant
Ces signaux contradictoires provenant de Téhéran suggèrent que derrière un vernis de fanfaronnades rebelles, se cache un désarroi croissant au sein du régime théocratique du pays. Les tensions parmi les factions au pouvoir sont exacerbées par un mécontentement public généralisé envers le gouvernement du pays.
« Tout semble indiquer très clairement que la population voit la politique du gouvernement vis-à-vis du nucléaire avec un scepticisme grandissant », a déclaré Morteza Ghorbani, analyste politique basé à Dubaï et qui voyage fréquemment en Iran. « Lidée selon laquelle les dirigeants religieux ont fait une énorme erreur de calcul dans la stratégie quils poursuivent depuis neuf mois se répand à vive allure.
De plus en plus de gens dans les taxis, les queues des bus et dans les bureaux se demandent ce qui va se passer si on les bombarde ou si on leur impose des sanctions. Et cest aux dirigeants iraniens que revient cette responsabilité à lheure actuelle. »
Fariba Javadi, architecte née en Iran qui est retournée cette semaine à son domicile à Paris après un bref séjour en Iran, est daccord avec cette thèse. « Les gens ont peur dexprimer leur opinion ouvertement, bien entendu, mais les Iraniens ont leur propre façon dexprimer leur mécontentement envers le gouvernement en blaguant sur Ahmaghi-Nejad (Ahmagh voulant dire stupide en persan) et lenrichissement clérical, en référence à la corruption endémique parmi les mollahs au pouvoir », a-t-elle affirmé.
Lanxiété croissante des Iraniens ordinaires était évidente lors de cette manifestation spontanée contre le président Ahmadinejad pendant sa visite dans la ville de Khorramabad, à louest du pays, mercredi dernier. Tandis quil prononçait un discours enflammé contre lOccident, en défense de son programme nucléaire, des centaines de jeunes dans la foule ont commencé à scander « mensonges, mensonges, mensonges », selon des témoins.
« Les Iraniens qui suivent les émissions de radio et de télévision en langue persane émises à létranger expriment de plus en plus leur désaccord face au programme nucléaire du pays », selon Mohsen Fazaeli, analyste iranien des médias, basé à Berlin. « Une enquête dopinion publiée récemment par des sites en langue farsi montre que 69% des Iraniens ne considèrent pas le programme nucléaire comme une question patriotique. »
La crainte que la population inquiète dirige sa colère contre le gouvernement a conduit les dirigeants iraniens à tenter de calmer lopinion publique. Les médias contrôlés par lÉtat essaient dassurer aux Iraniens que les menaces de sanctions ou de frappes militaires ne sont que du « bluff » des États-Unis et de ses alliés qui « veulent que nous nous suicidions de peur de la mort ».
Pour le moment, le gouvernement a réussi à contenir fermement la population. Les experts avancent cependant que tandis que la communauté internationale se dirige vers une action plus sévère pour contrecarrer les ambitions nucléaires de lIran, la situation internationale pourrait réserver encore plus de surprises.