AFP, Washington, 21 octobre – Les Etats-Unis doivent cesser de lancer des menaces et commencer à négocier s’ils veulent éviter le scénario d’une Troisième Guerre mondiale évoqué par le président américain George W. Bush dans l’hypothèse où l’Iran posséderait l’arme nucléaire, estiment les experts.
« Si vous tenez à éviter la Troisième Guerre mondiale, il me semble que vous devriez veiller à empêcher (les Iraniens) d’avoir le savoir-faire nécessaire pour fabriquer l’arme nucléaire », a déclaré mercredi le président américain.
« Le régime iranien a besoin de savoir que s’il maintient sa politique actuelle, la communauté internationale est prête à lui faire subir de graves conséquences », a renchéri dimanche le vice-président Dick Cheney, le chef des faucons au sein de l’administration Bush, dans un discours prononcé devant le Washington Institute for Near East Policy à Lansdowne (Virginie, est).
Pour Mehrzad Boroujerdi, un universitaire iranien de Syracuse University, le ton de M. Bush reflète la frustration des Etats-Unis et des alliés européens sur leur incapacité à contenir les ambitions nucléaires de Téhéran.
« L’administration Bush a fixé des ultimatums et des dates limites à l’Iran qui sont passé sans être respectés et sans qu’il y ait eu des conséquences », indique-t-il.
« On ne risque sûrement pas d’amener les Iraniens à la table des négociations avec ce genre de menaces implicites », ajoute M. Boroujerdi.
Pour lui, « le langage du président américain est contreproductif » mais aussi une indication de la colère des Etats-Unis qui accusent l’Iran de soutenir militairement les groupes extrémistes chiites en Irak.
« Tout ce que cela fait, c’est de provoquer des spéculations et générer de l’anxiété », relève pour sa part John Calabrese, du Middle East Institute de Washington, à propos des déclarations du président Bush.
« C’est un choix de mot malheureux à un moment difficile », estime-t-il.
« Le coeur du problème, c’est comment faire en sorte de faire revenir les Iraniens à la table des négociations. La campagne électorale et la compétition entre les candidats pour savoir qui serait le plus dur avec l’Iran n’aide vraiment pas », estime M. Calabrese.
« Ce que nous pouvons espérer, c’est que dans le débat interne au sein de l’administration, des membres du cabinet qui ont la tête froide comme le secrétaire à la Défense Robert Gates prévaudront et feront réaliser la stupidité d’une attaque contre l’Iran », ajoute-t-il.
La Maison Blanche a tenté par la suite de minimiser les commentaires de M. Bush, indiquant qu’il s’agissait d’une observation rhétorique et non d’un plan de guerre.
La porte-parole Dana Perino a réaffirmé que M. Bush n’écartait aucune option, mais que le gouvernement américain croyait « qu’on peut résoudre ceci de manière diplomatique ».
Le secrétaire à la Défense, Robert Gates, a mis en garde jeudi contre un Iran doté de l’arme nucléaire, qui provoquerait une course aux armements dans la région et un risque de conflit majeur au Proche-Orient « avec qui sait quelles conséquences ».
« Les Etats-Unis pourraient s’en prendre militairement à l’Iran rapidement », estime quant à lui Alex Vatanka, un analyste iranien du Jane Information Group.
« Mais il n’est pas utile que des hommes politiques tiennent ce genre de discours alarmiste, même si Bush estime que la menace de l’Iran est une question urgente qui doit être résolue avant la fin de son mandat », a-t-il estimé.