AFP: Par Simon MORGAN – L’Iran ne coopère toujours pas avec l’Agence internationale de l’énergie atomique sur son dossier nucléaire controversé, ce qui empêche l’AIEA de confirmer que les objectifs de Téhéran sont purement pacifiques, a déclaré lundi son nouveau directeur, le Japonais Yukiya Amano.
"L’Agence continue (…) de vérifier que les matériaux nucléaires en Iran ne sont pas détournés, mais nous ne pouvons pas confirmer que tous les matériaux nucléaires sont utilisés à des fins pacifiques parce que l’Iran n’a pas fait preuve de la coopération nécessaire", a constaté M. Amano en ouvrant à Vienne la réunion de mars du Conseil des 35 gouverneurs de l’agence onusienne, largement consacrée à l’Iran.
Depuis février 2006, l’AIEA et le Conseil de sécurité de l’ONU, avec le vote de trois séries de sanctions, examinent tous les deux le dossier iranien sans avoir pu jusqu’ici confirmer que Téhéran ne cherche, comme il l’affirme, qu’à produire de l’électricité dans sa centrale nucléaire et des isotopes dans son réacteur de recherche, et non à se doter de l’arme atomique comme l’en soupçonnent les puissances occidentales.
Devant la presse, M. Amano a expliqué que l’Iran avait partiellement coopéré, mais "que dans d’autres domaines cette coopération était insuffisante". Il a une nouvelle fois enjoint à la république islamique de respecter les résolutions du Conseil de sécurité demandant le gel de ses activités d’enrichissement d’uranium et l’accès des inspecteurs de l’AIEA aux sites nucléaires pour des missions inopinées. Il a aussi souhaité "des clarifications sur des points liés à d’éventuelles dimensions militaires du programme nucléaire iranien".
Le directeur de l’AIEA a ajouté que la proposition, faite en octobre par Washington, Moscou et Paris, sous les auspices de l’agence, d’échanger de l’uranium enrichi iranien, hors d’Iran, contre du combustible pour son réacteur de recherche médicale, "était toujours sur la table".
Cette proposition avait été faite pour "assurer la poursuite des opérations du réacteur de recherche de Téhéran" et si l’Iran l’acceptait, cela "servirait à créer un climat de confiance", a-t-il poursuivi.
Dans sa seule réponse écrite à l’offre internationale, Téhéran a indiqué le 18 février qu’il envisageait soit d’acheter le combustible nucléaire nécessaire pour ce réacteur de recherche sur le marché, soit de procéder sur son sol à un échange d’uranium faiblement enrichi contre le combustible en question.
Mais Washington, Moscou, Paris et l’AIEA ont refusé un tel échange en Iran car cela ne permettrait pas d’éloigner l’uranium enrichi d’Iran pendant une longue période.
Dans son rapport sur le dossier nucléaire iranien, discuté cette semaine par les gouverneurs et qui a circulé il y a dix jours à Vienne, M. Amano avait fait état des "inquiétudes" de l’agence quant aux capacités actuelles de l’Iran de fabriquer des têtes nucléaires. Sa position contrastait avec celle de son prédécesseur, l’Egyptien Mohamed ElBaradei, qui n’avait pas exprimé ses craintes aussi clairement.
Le représentant iranien auprès de l’agence, Ali Asghar Soltanieh, a qualifié lundi ce rapport d’"injustifié et inacceptable", alors que le chef de la diplomatie iranienne, Manouchehr Mottaki, rétorquait depuis Genève que l’Iran coopérait "pleinement" avec l’AIEA et qu’il allait "continuer" à le faire.
Le rapport pourrait ouvrir la voie à l’adoption à l’ONU de nouvelles sanctions contre Téhéran mais, selon les diplomates, le Conseil des gouverneurs de l’AIEA ne devrait pas voter de nouvelle résolution, comme en novembre, condamnant l’attitude de Téhéran.