Reuters, Téhéran, 9 mars — Des responsables iraniens ont menacé hier de quitter les négociations engagées avec la France, la Grande-Bretagne et l’Allemagne si la «troïka» européenne continuait de réclamer l’abandon par Téhéran de toutes ses activités nucléaires sensibles.
«Si les Européens refusent nos propositions dans les prochains jours, leurs propositions seront en retour fermement rejetées par l’Iran», a déclaré le porte-parole du ministère iranien des Affaires étrangères, Hamid Reza Asefi, cité par l’agence de presse estudiantine ISNA. Des responsables européens ont entamé un nouveau cycle de négociations avec les autorités iraniennes à Genève.
Washington, qui accuse Téhéran de vouloir se doter de l’arme atomique sous couvert d’un programme nucléaire civil, souhaite que le dossier soit transmis au Conseil de sécurité des Nations unies en vue d’éventuelles sanctions.
Des diplomates européens proches des négociations ont déclaré, sous le couvert de l’anonymat, qu’aucune avancée n’était attendue.
«Les pressions sur l’Iran ne seront d’aucune utilité et nous espérons qu’elles vont cesser. Il serait bon que l’Europe résiste aussi à la pression américaine», a quant à lui déclaré le président iranien, Mohamed Khatami, en visite en Croatie. «L’Iran ne renoncera pas à maîtriser la technologie nucléaire parce qu’il a le droit moral de le faire et qu’aucune force ne peut l’en empêcher», a-t-il ajouté.
Le Parlement iranien a, en outre, assorti le projet de budget 2006 d’une clause imposant au gouvernement de mener à bien des études de faisabilité en vue de la mise en chantier d’une centrale de 20 GW. Le premier réacteur iranien, d’une puissante de 1 GW, doit entrer en service en 2006 et Téhéran n’envisageait jusqu’ici rien d’autre que la construction d’une centrale de 7 GW à l’horizon 2020.
L’Union européenne affirme que la République islamique doit fournir des «garanties objectives» prouvant qu’elle ne poursuit aucun programme d’armement nucléaire. Pour l’UE, cela signifie un arrêt définitif des activités d’enrichissement d’uranium. L’Iran rétorque que des inspections sur son sol et une limitation des niveaux d’enrichissement pourraient suffire.
À Washington, Richard Boucher, porte-parole du département d’État, a estimé que Téhéran se devait d’apporter à la communauté internationale la preuve que son programme nucléaire n’a d’autre objectif que la production d’énergie.
«Si des ambiguïtés subsistent sur les garanties, la poursuite des pourparlers n’aura plus aucune signification», a prévenu Sirus Naseri, un négociateur iranien cité par la télévision publique. Son point de vue a été relayé à Téhéran.
«Si les Européens demandent et insistent pour obtenir l’arrêt [des activités nucléaires »>, cela signifiera la fin des négociations», a déclaré Ali Aghamohammadi, chef du bureau de propagande du Conseil suprême de sécurité nationale. «Dans ce cas, nous reprendrons certainement nos activités d’enrichissement. Nous accélérerons aussi nos activités pour maîtriser le cycle du combustible nucléaire», a-t-il ajouté.
La France, l’Allemagne et la Grande-Bretagne ont entrepris, fin 2003, des négociations avec l’Iran qui a accepté, en novembre dernier, de geler ses activités d’enrichissement d’uranium afin de dissiper les craintes de la communauté internationale.
L’accord avec la «troïka» comprenait en échange des mesures incitatives politiques et économiques, notamment une offre de reprise des négociations commerciales avec l’Union européenne.
Les États-Unis se sont dit prêts à soutenir les mesures incitatives préconisées par les pays européens, à condition que la «troïka» s’engage préalablement à soutenir un transfert du dossier iranien devant l’ONU.