Quelles sont les raisons de la méfiance de Paris à l’égard d’une organisation pourtant rayée de la liste noire du terrorisme international.
LHumanité, 16 février 2009 – Françoise Germain-Robin : Qu’est-ce qui pousse le gouvernement français à s’acharner sur l’Organisation des Moudjahidin du peuple d’Iran (OMPI) ? Cette question était au centre d’une conférence qui s’est déroulée la semaine dernière au Sénat, en présence de personnalités politiques et du monde judiciaire.
La France est en effet le seul pays de l’UE à continuer les poursuites contre des membres de cette organisation d’opposition iranienne dont plusieurs dirigeants et de nombreux cadres et militants sont installés depuis de longues années à Auvers-sur-Oise.
Ils y avaient été accueillis en 1981, avec leur chef, Massoud Radjavi, et l’ancien président iranien, Bani Sadr, alors qu’ils fuyaient la répression du régime. Quelques années plus tard, en 1987, ils feront les frais du rapprochement franco-iranien : le gouvernement Chirac fait expulser Massoud Radjavi et plusieurs dizaines de ses compagnons. Ils rejoignent en Irak le camp d’Ashraf, non loin de la frontière iranienne, d’où ils continueront, avec le soutien de Saddam Hussein (en guerre contre Téhéran – NDLR), leur lutte armée contre le régime.
En 1997, en pleine tentative de rapprochement entre l’administration Clinton et l’Iran, les États-Unis placent le Conseil national de la Résistance iranienne, dont l’OMPI est le coeur, sur la liste des organisations terroristes. Exemple bientôt suivi par l’UE. La France, qui fait du zèle, lance en 2001 une enquête pour terrorisme contre l’organisation. En juin 2003, le ministre de l’Intérieur, un certain Nicolas Sarkozy, lance sa police contre le siège des Moudjahidin à Auvers-sur-Oise : perquisitions, arrestations. Le maire d’Auvers, Jean-Pierre Becquet, raconte la stupéfaction des policiers : « Jusqu’ici, on les protégeait, maintenant on les arrête ! » et des habitants abasourdis.
Pourtant, six ans après, les autorités françaises refusent toujours de fermer le dossier. Les contrats pétroliers de Total et la fourniture de matériel nucléaire semblent peser lourd dans la balance.
À la réunion du Sénat, un appel à la vigilance a été lancé en ce qui concerne le sort qui sera réservé aux 3 500 membres de l’OMPI encerclés dans la base d’Achraf une fois que l’armée irakienne en aura pris le contrôle. Certaines déclarations inquiétantes ont pu laisser craindre qu’ils ne soient renvoyés en Iran, ce qui les condamnerait à une mort certaine.