Le Monde, 6 janvier – Par Jean-Pierre Stroobants – Les universités néerlandaises s’inquiètent de la présence en leur sein d’étudiants iraniens qui pourraient s’initier aux techniques du nucléaire. L’une d’entre elles, au moins, l’université technique publique de Twente-Enschede, a fait savoir par courrier à trois candidats qu’ils ne pourraient être inscrits, même si l’un d’eux avait déjà décroché une bourse. Le même établissement pourrait décréter une interdiction générale pour tous les étudiants venus d’Iran.
L’université publique technique d’Eindhoven aurait pris des décisions semblables mais nie « refuser d’accueillir des étudiants ». L’Institut de physique nucléaire de l’université de Groningue a déjà annulé une inscription lors de la rentrée 2006-2007. A Amsterdam, une liste en cours d’élaboration, reprenant le nom de tous les étudiants iraniens, a finalement été bloquée par la direction.
FAIRE PREUVE DE « RETENUE »
Les établissements expliquent que ce sont les pouvoirs publics qui les forcent à respecter de nouvelles règles. Les universités, les écoles supérieures et les centres de recherche ont été invités, en septembre 2007, à faire preuve de « retenue » dans l’accueil de jeunes Iraniens.
Mardi 2 janvier, les responsables des départements des affaires étrangères et de l’éducation nuançaient. Ils évoquaient une simple « information » relative, notamment, à la résolution 1 737 votée par les Nations unies en décembre 2006. Ce texte attirait l’attention des Etats sur la nécessité de ne pas faciliter l’acquisition des techniques nucléaires par le régime de Téhéran.
Les ministères concernés soulignent qu’ils voulaient seulement poser aux responsables de l’enseignement supérieur « des questions sur la nécessité de mesures éventuelles ». L’interprétation n’est pas la même à Twente. On y souligne que les ministères réclament des « garanties » que les Iraniens ne peuvent acquérir de connaissances dans le domaine nucléaire. Incapable de les fournir, l’université se dit « obligée jusqu’à nouvel ordre » de refuser des candidats.
« Les étudiants ont le droit de suivre en toute liberté les enseignements proposés. Nous ne pouvons en outre contrôler quelle formation précise ils reçoivent », a expliqué Menno van Duuren, de l’université de Twente.
Les établissements doivent, en principe, présenter les mesures qu’ils appliquent aux services de l’immigration et de la naturalisation (IND), qui décident en dernier recours d’octroyer ou non les visas.
Le Parti socialiste (SP), principale force d’opposition de gauche au gouvernement de Jan Peter Balkenende, estime qu’on « tire au canon sur une mouche ». « Aucune université ne dispense une formation sur le thème « comment puis-je fabriquer ma bombe ? » », raille le député Harry van Bommel. Il souligne que ces connaissances peuvent être acquises plus facilement via Internet que sur les bancs d’un amphi.