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Sujet de réflexion : pourquoi l’Iran est-il aussi intransigeant ?

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Analyse

Iran Focus, Londres, 31 octobre – Est-ce idéologique ? Est-ce dû à des querelles internes entre les factions ? Ou peut-être est-ce simplement une attitude suicidaire ? Quelle qu’en soit la cause, le rejet répété du gouvernement iranien des offres de compromis des nations occidentales déconcerte les plus grands experts et observateurs de l’Iran à travers le monde. Personne ne semble être certain de ce que les dirigeants cléricaux d’Iran sont capables.

Cela fait maintenant 14 mois que le président Mahmoud Ahmadinejad a été placé au pouvoir et un seul mot est suffisant pour caractériser la politique étrangère de l’Iran sous l’emprise de l’islamisme radical : intransigeance. Avec l’entière bénédiction du guide suprême de l’Iran, Ali Khamenei, Ahmadinejad fonce à pleins gaz en faisant monter les enchères nucléaires par l’expansion des programmes existants, en amplifiant l’ingérence de l’Iran en Irak, en radicalisant l’opinion musulmane par un discours anti-israélien virulent et en se servant des agents de Téhéran dans la région pour semer le trouble au Liban et dans les territoires palestiniens.

Parallèlement, Téhéran fait part de son désir indomptable de négociations peu concluantes sur son programme nucléaire tout en rejetant systématiquement tous compromis.

Qu’est-ce qui se cache derrière cette apparente invulnérabilité qui donne aux dirigeants iraniens suffisamment d’assurance pour faire un pied de nez à l’Occident et pour défier les résolutions du Conseil de Sécurité de l’ONU en toute impunité ? D’où vient cette intransigeance ?

Dans une certaine mesure, la réponse réside dans la division et l’indécision qui caractérisent la réaction de la communauté internationale à l’attitude de défi de l’Iran. Les leaders iraniens savent comment gagner le jeu du processus diplomatique international et gagner du temps pendant que leur programme nucléaire progresse inexorablement.

Les dirigeants iraniens sont rassurés par le soutien sans faille que leur apportent la Russie et la Chine. Ils sont parfaitement conscients que les difficultés que rencontrent les Etats-Unis en Irak limitent de manière significative les chances d’intervention militaire contre Téhéran. Ils trouvent également rassurant de savoir que des facteurs politiques, économiques et géopolitiques dissuadent l’Occident d’aggraver les tensions avec l’Iran.

Tout ceci explique pourquoi Téhéran n’est pas perturbé par les menaces de sanctions économiques de l’Occident ou même de frappes militaires. Mais pourquoi l’Iran a-t-il rejeté l’éventail considérable d’avantages et de concessions que les gouvernements occidentaux lui ont offert en juin, alors qu’il y a deux ans (en octobre 2003), il avait accepté pour beaucoup moins de signer un accord avec les 3E et de suspendre son programme nucléaire ?

Cette question est importante car on peut y répondre de deux façons radicalement opposées desquelles émergent des conclusions significatives. On peut penser que Khamenei et ses alliés ont monté de toutes pièces l’accession d’Ahmadinejad à une position de force, consolidant ainsi la mainmise des radicaux sur le pouvoir, prenant de l’avance dans leur politique radicale et rejetant les concessions de l’Occident parce qu’ils pensent que le régime est tellement solide qu’ils n’ont nul besoin de compromis.

Selon l’autre point de vue, le régime clérical fait face à une crise croissante dans le pays et à l’étranger et les mollahs se sentent vulnérables face aux forces américaines qu’ils voient postées tout autour de l’Iran. Les radicaux sont en fait en train de « se serrer les coudes pour faire front » et de se préparer à résister aux vagues de changement venant de l’intérieur comme de l’extérieur du pays. L’intransigeance de l’Iran reflète la faiblesse et la fragilité du pouvoir clérical, non sa force.

En réponse aux voies qui s’élevaient plus tôt cette année à l’intérieur du régime et qui appelaient à un compromis avec l’Occident en échange de concessions lucratives, Khamenei a déclaré, de manière plutôt révélatrice : « Tout repli à ce stade nous mènerait à un cycle sans fin de pressions supplémentaires et de nouveaux retours en arrière. La voie (que nous avons choisie) est une voie de non-retour ».

Ahmadinejad a eu un raisonnement similaire dans un discours récent dans lequel il a affirmé que « faire marche arrière mènerait à notre perte ».

Derrière ce raisonnement se cache la prise de conscience par les dirigeants iraniens qu’ils manquent de stabilité et de force pour transiger avec l’Occident. Si le régime clérical était suffisamment stable pour permettre un tel compromis, les années suivant l’invasion menée par les USA en Irak présenteraient une occasion en or pour les mollahs. Ils pourraient conclure un grand marché avec l’Occident, y compris les Américains, et garantir la stabilité à long terme et la prospérité de la République islamique. Même en l’absence d’accord, la moindre souplesse de la part de Téhéran lui aurait permis de rechercher les faveurs des Européens.

D’un point de vue plus large, l’histoire du siècle passé suggère que les Etats révolutionnaires entrent dans une ère de détente et de relations stables avec le monde extérieur une fois qu’ils sont parvenus à une certaine stabilité et à un renforcement du pouvoir dans le pays. Sans stabilité et sans pouvoir sur la scène nationale, les Etats révolutionnaires continuent d’exporter la crise et les tensions en dehors de leurs frontières. Un exemple clair étant la décision de la Chine communiste en 1972 d’accueillir le président américain Richard Nixon et d’entrer dans une nouvelle ère aux côtés de l’Occident.

Les dirigeants iraniens ne méconnaissent pas les bénéfices potentiels énormes d’un grand marché avec l’Occident. Mais ils ne savent que trop bien que leur théocratie ne dispose pas des conditions nécessaires pour résister à une telle initiative. D’où les avertissements répétés des dirigeants iraniens selon lesquels tout « retrait » mènerait à la désintégration de la théocratie.

On peut saluer les talents politiques des dirigeants iraniens qui ont été capables de masquer cette faiblesse inhérente et de projeter à la place une image de force en adoptant une attitude de défi. Bien entendu, les difficultés de l’Amérique en Irak les ont bien aidés, tout comme le conflit arabo-israélien et la montée générale du fondamentalisme islamique dans le monde musulman.

La plus grande erreur des gouvernements occidentaux est d’interpréter les actes de l’Iran comme un signe de force et d’adopter une attitude défensive, envoyant ainsi de façon catastrophique un message erroné à Téhéran. En offrant concessions après concessions, l’Occident joue le jeu des mollahs et encourage les ecclésiastiques à continuer sur la voie de l’impunité. Le temps est venu pour l’Occident de mettre les mollahs au pied du mur en adoptant une position ferme et décisive, en fixant bien précisément les limites à ne pas dépasser et en montrant à Téhéran que leur patience a des limites. C’est là la seule façon de faire barrage à une théocratie islamique nucléaire imposant son influence sur la région la plus sensible du globe.

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