AFP, Washington, 15 novembre – Les hauts dirigeants militaires américains affichent une position moins belliqueuse envers l’Iran que le président George W. Bush, et tentent plutôt de dissiper les craintes d’une action militaire imminente contre Téhéran.
M. Bush a agité le chiffon rouge le mois dernier en évoquant le risque d’une « Troisième Guerre mondiale » si l’Iran parvenait à fabriquer des armes nucléaires.
Quelques jours plus tard, le vice-président Dick Cheney prenait le relais en assurant à un centre de réflexion de Washington: « Nous ne laisserons pas l’Iran avoir des armes nucléaires ».
Depuis, toutefois, les plus hauts dirigeants militaires ont fait savoir qu’une action militaire contre l’Iran était « un dernier recours » qui risquerait de compliquer considérablement la tche de troupes américaines déjà fortement mobilisées en Irak et en Afghanistan.
Traiter le dossier iranien représente « un défi », a souligné l’amiral William Fallon, chef des opérations militaires américaines au Moyen-Orient, dans une interview au Financial Times lundi.
« Et tout cela n’est pas facilité par les articles incessants selon lesquels il va y avoir une nouvelle guerre d’un jour à l’autre, ce qui n’est tout simplement pas la direction que nous voulons prendre », a-t-il déploré.
« Généralement », les « commentaires belliqueux ne sont pas très utiles », a ajouté l’amiral.
Depuis sa prise de fonction le 1er octobre, l’amiral Michael Mullen, nouveau chef d’état-major interarmées, s’est également montré sceptique quant à une action militaire contre l’Iran.
« Nous devons être conscients des risques que nous prendrions en nous engageant dans un pays tiers, dans cette partie du monde, dans n’importe quel type de conflit », a-t-il récemment fait valoir devant des experts en défense.
Le secrétaire américain à la Défense, Robert Gates, ne cesse quant à lui de répéter que des pressions économiques envers l’Iran restent la meilleure solution.
Attaquer l’Iran « est une alternative, si l’Iran faisait quelque chose de stupide », a affirmé mercredi le porte-parole du Pentagone, Goeff Morrell. « Mais pour l’instant nous concentrons nos efforts sur les sanctions diplomatiques et économiques », même si Téhéran semble peu disposé à céder sur son programme d’enrichissement d’uranium.
En parallèle, l’armée américaine multiplie déclarations et initiatives propres à décrisper les tensions entre l’Iran et Washington.
Les Américains viennent de libérer neuf Iraniens arrêtés en Irak pour leur soutien présumé à l’insurrection irakienne, en estimant « qu’ils ne représentaient plus une menace à la sécurité de l’Irak ».
A Bagdad, les militaires font par ailleurs état d’une tendance à la baisse des envois d’armes iraniennes en Irak.
Le numéro deux de l’armée américaine en Irak, le général Ray Odierno, a récemment assuré avoir constaté une diminution constante depuis trois mois de l’utilisation des engins piégés iraniens, même s’il est selon lui « trop tôt » pour en conclure que Téhéran a cessé ses envois en Irak.
Quelle qu’en soit l’explication, les Etats-Unis bénéficient d’une baisse continue des violences en Irak, qui permet d’envisager plus sereinement le retour partiel des 167.000 soldats à partir de l’an prochain.
Or, selon des experts, l’Iran pourrait contribuer à embraser de nouveau l’Irak si l’administration Bush tape trop sur les doigts de Téhéran.
« Peut-être que certains, comme l’amiral Fallon, disent en coulisses aux Iraniens: +Si vous arrêtez (vos activités en Irak), on ne vous attaquera pas l’année prochaine », commente l’expert américain en défense Michael O’Hanlon, de la Brookings Institution.