Le Monde, 15 janvier – En tournée dans les pays du Golfe, George Bush a accusé l’Iran, dimanche 13 janvier, d’être « une menace pour la sécurité des nations » et « le premier parrain étatique du terrorisme ». Il faut prendre garde à ces propos parce que M. Bush, si affaibli soit-il dans sa dernière année de présidence, n’en est pas moins responsable de la politique américaine, notamment sur le dossier iranien. Or ce problème n’a pas disparu, loin s’en faut.
Plusieurs événements viennent de rappeler l’ampleur des défis posés par l’Iran aux Etats-Unis, aux pays voisins et à la sécurité internationale. Dans les eaux du détroit d’Ormuz, le 6 janvier, un incident naval dont les détails restent à éclaircir a mis aux prises des bâtiments militaires américains et des vedettes des Gardes révolutionnaires iraniens. Dans le face-à-face entre l’Iran et les Etats-Unis, le danger qu’un accrochage militaire mette le feu aux poudres reste une réalité.
M. Bush a haussé le ton contre la République islamique alors qu’il se trouvait à Abu Dhabi. Le président américain voulait sans doute rassurer les pays arabes sunnites, qui craignent un affrontement général avec l’Iran, puissance chiite montante. Au Liban, aussi, le poids de l’Iran se fait sentir via le relais du Hezbollah. L’impasse politique perdure dans ce pays, où le scrutin présidentiel, prévu depuis novembre, a de nouveau été reporté, cette fois au 21 janvier.
Le regain rhétorique américain contre l’Iran rappelle aussi que la diplomatie n’est toujours pas parvenue à résoudre l’imbroglio nucléaire. Le 3 décembre, un rapport des agences de renseignement américaines affirmait que l’Iran avait arrêté à l’automne 2003 ses activités nucléaires de nature militaire. La pression diplomatique que Washington, Londres et Paris voulaient maintenir sur Téhéran, avec une menace de nouvelles sanctions à l’ONU, s’en est trouvée singulièrement affaiblie. Mais il faut regarder de près le texte de ce rapport, ainsi que ses notes de bas de page, pour comprendre qu’un seul des volets problématiques du programme iranien a peut-être été arrêté, celui qu’il est le plus facile de reprendre. La partie la plus difficile du travail pouvant conduire à une bombe nucléaire, à savoir l’enrichissement d’uranium, continue.
Le directeur de l’Agence internationale de l’énergie atomique, Mohamed ElBaradei, vient de se rendre à Téhéran, où il a conclu un accord sur un délai de quatre semaines pour que les Iraniens expliquent leurs activités scientifiques passées. Ce délai sera-t-il respecté ? Le calendrier, initialement fixé au mois de décembre 2007, ne cesse de glisser. L’Iran, pendant ce temps, ne s’est toujours pas conformé aux demandes du Conseil de sécurité de l’ONU, qui exige la suspension de l’enrichissement. Sur le front nucléaire, comme sur les autres enjeux régionaux dans lesquels l’Iran est impliqué, rien n’est réglé.