Bertranddelanoe.net: Par le maire Bertrand Delanoë – LIran sembrase. A Téhéran, à Qom, à Ispahan, à Chiraz, à Qasvin, à Tabriz, le peuple se lève, descend dans la rue, se saisit de tous les moyens à sa disposition (notamment Internet, qui contribue à donner à sa révolte un écho planétaire), et entend dire quil est décidé à ne plus abdiquer sa liberté ni sa dignité.
Que peut faire, face à une telle vague, un pouvoir qui sest réduit lui-même à sa dimension dagressivité militaire et policière ? Il peut frapper, bien sûr, et il ne sen prive pas : la milice du régime blesse et tue, dans lombre, dhumbles citoyens qui ne demandaient quà vivre debout. Il peut emprisonner, enfermer: la sur de Shirin Ebadi, cette grande voix de la liberté, vient ainsi dêtre arrêtée, dans larbitraire le plus complet. Il peut aussi diffamer, il peut calomnier, il peut, avec la fièvre et lirrationalité des vraies paniques, chercher désespérément des boucs émissaires de circonstance. Cest ainsi que le secrétaire du « Conseil des gardiens de la Constitution », limam Ahmad Jannati, a accusé Moussavi, le « chef de la sédition » dêtre un agent « à la solde » de létranger
Mais en réalité, ce parti de létranger, cette faction marginale, cest un peuple en marche, et désormais en lutte. Contre un régime qui nen finit plus daccentuer ses dérives mortifères. Contre des dirigeants enfermés dans une logique de destruction. Contre des mercenaires entraînés à menacer et à tuer, ces bassidji qui sont organisés comme une armée et se comportent comme des bandits.
Cest un combat à mains nues, mais qui a pour lui le courage de la liberté. Cest aussi la lutte dune jeunesse (les deux tiers des Iraniens ont moins de trente ans) à qui il ne faut plus raconter dhistoires sur la glorieuse révolution de 1979, parce quelle ne voit que ce qui est.
Ce qui est en jeu est considérable : ce nest rien de moins quune certaine conception de lHomme et de luniversalité de ses droits. Cest aussi le rêve dune société plus sécularisée, plus ouverte, où les femmes retrouveraient la possibilité de vivre la vie quelles choisissent : quand on pense à lHistoire, celle qui est faite et celle qui reste à faire, on ne peut quêtre profondément ému par ces images des manifestations de la semaine dernière, où ce sont les hommes qui, par une forme de défi sans violence, avaient choisi de porter le foulard, tandis que les femmes défilaient tête nue.
Aujourdhui, je veux dire mon admiration à ces foules sans armes, et ma solidarité à ce grand peuple fier, à lIran de la liberté.