The Wall Street Journal, 5 décembre – Par Christopher Rhoads – La campagne iranienne visant à bloquer laccès à certains sites Internet populaires et à restreindre la circulation des messages textes reflète la capacité croissante du gouvernement à contrôler le contenu en ligne à lintérieur des frontières nationales.
Ces mesures de répression, évoquées plus tôt par le journal britannique The Guardian, font partie dune offensive plus large contre ce que les autorités considèrent comme la culture immorale de lOccident. Elle vise les sites Internet tels quAmazon.com, lencyclopédie publique en ligne Wikipedia.com, le site de films imdb.com, le portail de partage de vidéos YouTube.com, et bien dautres. Certains de ces sites fonctionnent à nouveau, mais les mesures répressives vont de pair avec un renforcement des informations en ligne en Iran qui a débuté il y a deux ans.
Cette fermeture nest pas hermétique, puisque les internautes les plus débrouillards du pays ont accès à des logiciels et autres procédés leur permettant de contourner les restrictions du gouvernement, selon les experts dInternet. Personne ne sait exactement combien de temps ces restrictions vont durer.
LIran est une des nombreuses nations à avoir adopté des mesures pour limiter laccès à Internet ou pour contrôler ce que les utilisateurs peuvent voir dans le cyberespace. Dautres ont pris des mesures similaires, comme par exemple la Chine, Cuba et la Corée du Nord. Mais les actions récentes de Téhéran sont notables en raison de la culture Internet florissante et relativement libre du pays de ces dernières années. LIran compte approximativement 7,5 millions dutilisateurs dInternet, alors quils nétaient que 250 000 il y a six ans, selon InternetWorldStats.com. Le nombre de blogs a explosé ces dernières années, en raison du contrôle strict de lEtat sur les médias imprimés traditionnels du pays.
Arash Sigarchi, était membre de la presse réformiste qui sest développée sous le président Mohammad Khatami à la fin des années 1990. Lorsque ces médias ont fermé en 2000, M. Sigarchia commencé à publier des blogs sur un site collectif baptisé « LHomme de Gilan » et plus tard sur son site personnel appelé « La Fenêtre de lespoir ». M. Sigarchi, 28 ans, a été arrêté début 2005 et condamné à 14 ans de prison pour « propagande contre le régime », selon Reporters sans frontières, groupe de défense des libertés de la presse basé à Paris.
Alors que lutilisation dInternet prend son envol dans un nombre toujours croissant de pays, les gouvernements acquièrent parallèlement la possibilité de contrôler le contenu en ligne à lintérieur de leurs frontières.
« Les pays ayant la capacité politique et le désir de limiter linformation peuvent le faire », a affirmé Robert Faris, directeur de la recherche sur un projet mondial de filtrage dInternet au Berkman Center for Society and Internet à la Harvard Law School. « Les moyens techniques existent désormais. »
Les mesures répressives visant Internet en Iran reflètent les efforts du gouvernement islamiste du président Mahmoud Ahmadinejad de débarrasser lIran de ce que ses dirigeants qualifient de culture occidentale décadente, qui comprend la musique et les films. Ces derniers jours, les autorités gouvernementales ont introduit plusieurs nouvelles mesures, telles quexiger des blogueurs et des propriétaires de sites Internet quils senregistrent auprès dun organisme officiel et renforcer la capacité du gouvernement à surveiller de près ce qui est considéré comme un contenu répréhensible.
Le gouvernement a jeté son dévolu sur Internet il y a deux ans et a arrêté plusieurs blogueurs et autres individus dont les écrits étaient considérés offensants, selon Reporters sans frontières. Un dentre eux, Mojtaba Saminejad, a risqué la peine de mort pour avoir insulté les prophètes, mais a été finalement jugé coupable dune accusation moins grave.
Le mois dernier, le gouvernement a bloqué laccès à deux sites, tik.ir et meydann.com. Le premier contenait des critiques du gouvernement et de son guide spirituel, tandis que le second publiait des articles appelant à la fin de la lapidation des femmes, explique Reporters sans frontières.
Le gouvernement a également pris linitiative inhabituelle de tenter de réduite la vitesse dInternet, en interdisant essentiellement le haut débit.
« Cest surprenant », affirme Julian Pain, responsable du bureau de la liberté dInternet pour Reporters sans frontières, parce que limiter la vitesse de connexion ne fait pas que gêner les dissidents, mais cela a aussi un « impact économique énorme ». Les commerces, les activités commerciales du gouvernement et du secteur privé peuvent tous être touchés par cette mesure, a-t-il déclaré.
Les outils permettant de contourner ces restrictions se propagent rapidement. LUniversité de Toronto, par exemple, a annoncé le mois dernier la création dun programme nommé psiphon fonctionnant sur le principe du réseau de relations sociales. Il permet à une personne située dans un pays censuré qui a téléchargé le logiciel de transformer son ordinateur en point daccès pour dautres utilisateurs dans les pays censurés. Ces personnes peuvent utiliser lordinateur pour accéder à Internet sans restrictions et sans être détectées par les autorités.