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Iran : rappelons nous du massacre de 30 000 prisonniers politiques en 1988

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Une bande audio de l’Ayatollah Montazeri fait scandal

 

C’est avec consternation que les Iraniens ont découvert en aout 2016 la bande audio de l’ayatollah Montazéri dénoncant le massacre de 30 000 prisonniers politiques en 1988 en Iran. « C’est le crime le plus terrible perpétré en République islamique depuis la révolution et pour lequel l’histoire va nous condamner, » déclare-t-il dans cet enregistrement de 40 minutes de propos tenus lors d’une réunion à huis clos entre ce dauphin du fondateur de la République islamique et les quatre membres de la commission chargée de mener « l’épuration » des prisons iraniennes.

C’est la première fois que ce sujet sensible est évoqué dans les médias en Iran. Les autorités ont toujours cherché à éluder cet épisode sanglant de leur règne, de crainte d’éventuelles poursuites devant un tribunal pénal international pour ce qu’Amnesty International a décrit comme « crimes contre l’humanité ». Or depuis la publication de l’enregistrement audio publié par le fils de l’ayatollah Montazéri, à l’occasion du 28e anniversaire de « l’été sanglant », les appels des opposants, mais aussi des figures du régime, pour faire la lumière sur « le massacre des prisons » sont de plus en plus nombreux.

Dans cet enregistrement sonore, posté par son fils, on peut entendre les propos échangés, le 15 août 1988, entre Montazeri et les membres de la « commission de la mort ». Montazeri proteste contre le massacre des prisonniers politiques commencé quelques semaines plutôt :

« Le crime le plus important commis sous la République islamique et pour lequel nous serons condamnés par l’Histoire, c’est vous qui l’avez commis et c’est pourquoi l’Histoire enregistrera vos noms en tant que criminels (…) Notre peuple a (le principe) du Guide suprême en abomination. Ce n’est pas comme ça que je voulais que ça se passe. Dans 50 ans, Khomeiny sera jugé comme une figure sanguinaire et cruelle ».

 

Les réactions

Le député Ali Motahari, vice-président du parlement, a demandé des explications à trois des quatre membres de la « commission de la mort », qui continuent à détenir des postes clés au sein de l’État : Mostafa Pour-Mohammadi, actuel ministre de la Justice du gouvernement Rohani, était le représentant du ministère du renseignement (Vevak) au sein de la sinistre commission, Hossein-Ali Nayeri, actuel chef de la Cour suprême, était juge islamique et Ebrahim Raïssi, en charge de la puissante fondation Astane-Qods-Razavi, était procureur général. « MM. Raïssi, Nayeri et Pour-Mohammadi, qui étaient impliqués dans ces évènements, doivent s’expliquer et clarifier la question pour le peuple. Et, bien entendu, s’il y a eu lacune dans la manière d’appliquer les peines, ils doivent alors présenter des excuses », a déclaré Ali Motahari à la tribune du Majlis.

 

L’agence de presse gouvernementale ISNA, le 28 août 2016

« Dans une lettre, 30 députés du Majlis (Parlement) ont demandé à ce que soit menée une enquête sur l’aptitude de Montahari à en être le Vice-président. Mohammad-Ali Pour-Mokhtar a annoncé cette nouvelle, déclarant à l’ISNA : « 30 députés ont écris une lettre à la délégation en charge de l’application de l’article 26 du règlement du Majlis (la délégation qui lit la réclamation écrite aux responsables des comités concernés ainsi qu’aux membres du comité qui rédige le règlement intérieur) demandant qu’une enquête soit menée et qu’un vote de confiance soit prévu sur la qualité de vice-président d’Ali Montahari au Majlis. Selon l’ISNA, un certain nombre de membres du parlement ont réagi [ce] dimanche à la lettre d’Ali Motahari à Mostafa Pour-Mahammadi, réclamant des réponses aux questions soulevées ainsi qu’une explication concernant les exécutions de 1988. »

 

La fierté du Ministre de la Justice face au massacre de 1988

Le Ministre de la Justice iranien, Mostafa Pour-Mohammadi, qui fut l’une des personnalités impliquées dans le déroulement du massacre et dont la voix aurait été entendue sur l’enregistrement de Montazeri a déclaré : « Les commandements de Dieu n’accordent aucune merci aux non croyants parce qu’ils ne vous en accordent pas non plus, et nous ne devrions pas en accorder au CGRI puisque s’il le pouvait, il ferait couler votre sang, comme il l’a fait. (…) Nous sommes fiers d’avoir appliqué le commandement de Dieu à l’égard des hypocrites (Moudjahidine du peuple) , de s’être levés avec force et d’avoir combattu les ennemis de Dieu et du peuple. ». (L’Agence de presse Tasnim, affiliée à la force Qods du CGRI, le 28 août 2016)

 

Le Guide suprême des mollahs reconnait le massacre de 1988

Lors d’une réunion avec le gouvernement d’Hassan Rohani le 24 août 2016, le guide suprême des mollahs, Ali Khamenei, fit référence à l’enregistrement de M. Montazeri et fit part de son inquiétude quant aux « efforts faits pour disculper les hypocrites (Moudjahidine du peuple) ». D’après son site officiel, « … en faisant référence à cette tentative de blanchiment des Moudjahidines, responsables de ce crime, il dit : « Malheureusement, certaines personnes essaient de laisser croire à l’innocence de criminels responsables de la mort de milliers de personnes ordinaires et d’officiels et de dignitaires reconnus, et de ternir l’image radieuse du dernier Imam (Khomeiny). Mais ces personnes malveillantes ne parviendront pas à leur fin et échoueront comme elles ont échoué auparavant. » 

La reconnaissance du massacre de 1988 par Hachemi Rafsandjani
Lors d’un rassemblement du Conseil de discernement le 27 août 2016, Ali Akbar Hashemi Rafsandjani, le président du conseil et ancien président du régime iranien, a exprimé son profond regret face à cette nouvelle vague d’attaques dirigées envers (le fondateur de la république islamique) Khomeiny.

L’Agence de Presse Fars, affiliée aux pasdaran, cite les propos suivants tenus par Rafsandjani le 27 août 2016 : « La vague qui submerge actuellement tous les médias étrangers de l’opposition, à tel point qu’une exposition, autorisée par la maire de la ville, s’est tenue à Paris, transposant les scènes d’exécutions à notre époque. L’importance du soutien dont a bénéficié ce groupe terroriste à l’époque implique nécessairement une certaine modération. » Il a poursuivi comme suit: « L’objectif principal de nos ennemis nationaux et internationaux est de prendre leur revanche sur le rôle et le statut sans précédent tenus par l’Imam (Khomeiny) dans l’histoire contemporaine de l’Iran et du monde. ». Rafsandjani ajoute enfin : « Nous devons agir avec précaution et exposer le parcours de l’Imam de manière à ce qu’il ne puisse pas être détourné par ses opposants. ».

L’Assemblée des Experts exprime son soutien au massacre de 1988
Site internet de l’Assemblée des Experts, le 28 août 2016
Le Secrétariat de l’Assemblée des Experts (responsable notamment de la désignation du futur Guide suprême) a pris position sur le scandale autour de l’enregistrement de Montazeri de la manière suivante : « Peut-être est-il encore difficile pour certains de comprendre la décision, historique et révolutionnaire, de son Excellence l’Imam Khomeiny d’agir de manière si déterminante et intransigeante à l’égard de l’OMPI et de poursuivre les chefs ainsi que certains membres de l’OMPI en 1988, tout comme il peut leur être encore difficile de saisir le savoir et la prévoyance de cet homme divin dans la manière de sauvegarder le régime islamique qui est le fruit d’une lutte et d’efforts de l’ancienne et de la nouvelle générations de ce pays. Par cette décision opportune, prise à un moment critique, l’Imam a su éviter la sédition. »

« Ces cruels [OMPI], dont les crimes et la trahison contre cette terre sont bien connus, n’ont-ils pas de temps à autres, soutenus par l’Arrogance (l’Occident) et par certains États réactionnaires, cherché à faire renaître leurs existences maléfiques et pourries ? Un jour à Paris, l’autre en tant qu’invité spécial du criminel le roi d’Arabie saoudite en pèlerinage à la Mecque, et un autre jour encore en répandant de fausses informations sur notre régime et notre guide suprême, ils cherchent à se faire connaître. »
« Quel esprit équitable, quelle conscience éveillée ne pourrait douter du fait que l’enregistrement d’une réunion soit publié après presque trois décennies à des fins maléfiques ? Ce n’est pas le fait que les Etats-Unis, criminels, essayent de temps à autres et sous divers prétextes d’influencer ses agents et ses mercenaires de manière à ce qu’ils puissent assouvir leurs ambitions illusoires d’affaiblir le régime islamique, le principe du Velayat-e Faqih (la suprématie du Guide suprême), et la place honorable du guide suprême religieux dans l’esprit des croyants et, en même temps, de blanchir l’OMPI en la faisant passer pour une victime. Ils ne réalisent pourtant pas que le fait de ressusciter une fausse entité par le biais de revendications telles que la défense des droits de l’Homme n’est qu’un complot bâclé et voué à l’échec. »

« Tout en condamnant les crimes funeste de [l’OMPI] en Iran et en Irak, l’Assemblée des Experts condamne la publication par les partisans de cette organisation, de cette bande audio, ce qui ne fait porter de l’eau au moulin de l’ennemi, et avertissons les personnes raisonnables, en particulier la chère jeunesse de l’Iran islamique, que l’OMPI, avec ses crimes et son faible niveau d’organisation, est sur le point de s’effondrer et n’ira nulle part par le biais de telles tentatives, sans espoir, de souiller la véritable image de son Excellence l’Imam (Khomeiny) et du saint régime de la République islamique d’Iran, et ils ne parviendront pas à réduire d’un iota la profonde croyance de vous, peuple pieux et raisonnable, qui suit la voix de l’Imam et de la révolution. »

 

Un ancien responsable du cabinet de la Présidence révèle de nouvelles informations sur le massacre de 1988

Mehdi Khazali, qui travaillait dans le cabinet de la Présidence sous Ali Khamenei et Hashemi Rafsandjani, a décrit diverses scènes du massacre de 1988 à Evin. Il est le fils du mollah Abolqasem Khazali qui était à la tête du Conseil des Gardiens du régime dans les années 1980. Lors d’une apparition télévisée sur Dorr TV, Mehdi Khazali, a déclaré : « Le groupe le plus important qui s’opposa à l’État fut l’Organisation des Moudjahidines du Peuple… Il ne pouvait être anéanti que sur autorisation de l’Imam (Khomeiny). En réalité, ils (les responsables du régime) voulaient le faire disparaître pendant que l’Imam était encore en vie. Ils disaient que quiconque serait relâché se rebellerait ; nous serions ensuite plongés dans une situation nous opposant à un nombre important de personnes. Dès lors, nous exécutions ces personnes, ces exécutions terrifieront les familles et personne n’osera se rebeller. » Khazali ajoute : « Selon un ancien directeur du Ministère du Renseignement, quelques 20 000 personnes [furent exécutées] à Téhéran et aux alentours. Cela veut dire que les 4 000 (mentionnées par M. Montazeri) venaient de Téhéran et que selon un certain M. Maleki, près de 33 000 personnes furent pendues en l’espace d’un mois environ. (Le Dr Mohammad Maleki était le Président de l’Université de Téhéran après la révolution de 1979).

 Ahmad Khatami, responsable de la prière du vendredi à Téhéran, le 19 août 2016

« … Ceux qui ont collaboré (avec l’OMPI) dans les prisons et affirmé leur détermination, sont eux aussi Mohareb (en guerre avec Dieu). Ce que le feu Imam a fait en 1988 constituait un acte religieux, coranique et révolutionnaire et rendit un grand service à la nation iranienne musulmane. Si l’Imam n’avait pas agi de manière si courageuse, nous ferions aujourd’hui face à d’importants problèmes; nous ne serions pas en sécurité. Nous devons notre sécurité actuelle à cette décision révolutionnaire de l’Imam (…) Les gens ne devraient pas croire ce qui est répandu par les réseaux satellites étrangers. »

 Sadeq Larijani, Chef du pouvoir judiciaire, le 15 août 2016

« … Les pays occidentaux et leurs alliés régionaux essayent d’apporter leur soutien à l’OMPI en les invitant à Paris et en organisant des rassemblements et, malheureusement, certains à l’intérieur même du pays tentent également de participer à ces campagnes et troubler l’opinion publique. Mais ils doivent savoir que le pouvoir judiciaire agira avec fermeté et que tout trouble apporter à l’ordre public sur ces questions de sécurité engendrera des poursuites judiciaires… Ce qui a été fait sous ordre de la Cour ne peut être remis en cause, et le verdict donné à l’égard des groupes qui sont mohareb est très clair, mais certains empruntent malheureusement de mauvais chemins et disent d’étranges choses… ».

 Le mollah Mohammad Jafar Montazeri, Procureur général, le 17 août 2016

« … Nous sommes désolés de voir au sein même de la République islamique d’Iran certaines personnes se positionner du côté de l’ennemi et en accord avec la musique jouée par Israël, les Etats-Unis, le monde occidental et leurs alliés régionaux. Ils blanchissent, malheureusement, l’organisation criminelle qu’est l’OMPI. »

 Le mollah Qolam-Hossein Mohseni-Ejei,

Site internet de la chaîne d’information de l’Etat (IRINN), le 28 août 2016
Le site internet de la chaîne d’informations iranienne a cité l’ancien Ministre du Renseignement et actuel porte-parole du système judiciaire, le mollah Qolam-Hossein Mohseni-Ejei : « Le bilan sombre de l’OMPI ne peut être blanchi de cette manière mensongère. » L’IRINN a ajouté : « Ejei a fait référence à un enregistrement audio dont le but était de blanchir l’image de l’OMPI et qui a été mise en ligne. Il a déclaré : « Les crimes et la trahison de l’OMPI contre le peuple iranien sont si forts et si répandus qu’ils ne peuvent être parfaitement compris par la nouvelle génération. »

 L’Agence de Presse Fars, affilée aux Pasdarans, le 27 août 2016

Majid Ansari, conseiller juridique d’Hassan Rohani et membre du Conseil de discernement, a déclaré lors d’une réunion du conseil le 27 août 2016 : « En plus de la distorsion de l’image de Khomeiny, une conspiration complexe s’établie au niveau international dans le but de présenter l’organisation terroriste [l’OMPI] comme une organisation civile et légitime. »

 Mohammad Ali Ansari, membre du Cabinet du Guide suprême à l’époque de Khomeiny, le 10 août 2016

« Ces déclarations de l’Ayatollah Montazeri ne sont pas justes et comprennent des préjugés que certaines personnes malintentionnées de son entourage ont provoqués… Ceux qui ont occupés l’esprit de M. Montazeri avec de faux problèmes l’ont poussé à défendre les libéraux et les Moudjahidine, et ont permis la publication de ces enregistrements… La publication de cette bande audio, 28 ans plus tard, à un moment où les leaders du Monde de l’Arrogance (les Etats-Unis) et les apostats sont engagés auprès des hypocrites (Moudjahidine du peuple), permet leur réhabilitation et leur apporte de la légitimité… ».

 L’ancien ministre des Gardiens de la Révolution, l’agence de presse Tasnim, le 28 août 2016 :

Mohsen Rafiqdoost, ancien Ministre des Gardiens de la Révolution pendant la guerre Iran-Irak (1980-1988) : « L’Imam a écrit dans son testament qu’il quitte ce monde avec l’esprit tranquille, car il avait réglé la question des Monafeghine [OMPI]. Parce qu’il était conscient que sans le règlement du problème de Monafeghine, la révolution se trouverait en difficulté. (…) L’enregistrement de Montazei révèle le désespoir des Monafeghine. »

 Ali Razini, un responsable du système judiciaire, le 16 août 2016

« … Il y a malheureusement à l’intérieur et à l’extérieur du pays des politiques qui permettent d’une certaine manière la réhabilitation des hypocrites (Moudjahidine du peuple) … Ceux qui ont été reconnu comme ennemi de Dieu ont vu leur peine appliquée et l’émergence de nouveaux problèmes fut combattu. La sécurité dont nous jouissons désormais en Iran, qui se présente comme une île tranquille au milieu de tous les pays instables de la région, est le fruit de cette application des sanctions par l’Imam Khomeiny… Nous sommes reconnaissants à l’égard du père de la révolution islamique qui a agi avec tant de détermination et a empêché l’importation de l’insécurité…»

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