AFP : Bam (sud-est de l’Iran) et sa région se recueillent samedi sur les tombes des 30.000 victimes du séisme de 2003, mettant fin au deuil rituel d’un an entre volonté de vivre et amertume de se sentir oubliés par les autorités.
Les Bamis devraient se rendre dans les cimetières honorer leurs morts, sur les tombes dans lesquelles les corps ont été disposés à la hâte, seuls ou à plusieurs, quand ils n’ont pas été mis en terre sans être identifiés.
Le séisme du 26 décembre 2003, l’un des plus terribles du quart de siècle, « a fait 31.884 morts, près de 18.000 blessés, dont beaucoup lourdement handicapés, 5.000 orphelins, 1.700 veuves », dit à l’AFP le gouverneur de Bam, Ali Mohammad Rafizadeh, se fondant sur les chiffres de l’Office national notarial des certificats de naissance.
Les statistiques n’ont cessé d’évoluer. Il est vrai que la secousse, d’une magnitude de 6,3 ou 6,7 sur l’échelle ouverte de Richter selon les sources, a semé la dévastation. Elle a décimé les administrations en même temps qu’elle ruinait l’une des cités les plus riantes du pays, surprenant ses 90.000 habitants dans leur sommeil, elle a anéanti la fameuse citadelle, joyau du patrimoine mondial, et dévasté l’économie locale.
Selon l’Unicef, 9 ou 10.000 enfants ont été tués, 85% des maisons ont été détruites.
L’ampleur du cataclysme à elle seule dissuade de toute célébration. La visite du président Mohammad Khatami depuis mercredi a été plutôt discrète.
Les Bamis s’affligent de la lenteur de la reconstruction. La ville est toujours un champ de ruines. Des dizaines de milliers de personnes vivent dans des camps de préfabriqués dans les faubourgs. Ils disent ne pas manquer de l’essentiel, mais, comme le dit le docteur Hamid Barani aux urgences du Croissant-Rouge, « les Bamis n’ont pas mérité d’être traités comme ça ».
« Nous restons inquiets de trafics en tout genre », dit le coordinateur de l’Onu en Iran Frederick Lyons. La ville, sur la route de la drogue venue de l’Afghanistan et du Pakistan voisins, y serait livrée désormais bien plus encore.
« On nous a signalé qu’on se servait des enfants pour les trafics, nous sommes très soucieux de cette situation », ajoute Kari Egge, la représentante de l’Unicef.
L’alcool, prohibé, « coule comme au robinet », dit un médecin. Il a été question de trafics d’organes, d’enfants pour la prostitution. « Pour autant que nous sachions, il n’y a pas de preuve de trafics d’enfants », dit Kari Egge sans les réfuter catégoriquement.
Le gouverneur, lui, dément formellement. La presse iranienne a fait état en mars d’émeutes provoquées par la précarité. Les sentiments sont exacerbés par l’arrivée d’étrangers à la ville, poussés là par la catastrophe mais aussi attirés par l’aide internationale.
Le président Khatami, déjà passablement contesté, a reconnu jeudi qu’il était « impossible de satisfaire pleinement la population ». Mais « il faut que les choses aillent plus vite ». « Le cadre général de la ville sera achevé l’été prochain, avec la construction de bâtiments publics, de stades, de centres de loisirs et culturels ». La construction du nouvel hôpital sera terminée sous 45 jours, a-t-il promis.
Le séisme a suscité un élan de solidarité internationale sans précédent sous la République islamique. L’Onu et les organisations gouvernementales continuent à travailler sur place pour reconstruire, restaurer l’économie, scolariser les enfants, aider à surmonter le traumatisme.
« Un an après, les signes de dévastation sont toujours patents, pas seulement dans les bâtiments effondrés, mais dans les esprits des gens », dit Mohammed Mukhier, chef des opérations en Iran de la fédération des Croix-Rouge.
Cependant, les humanitaires soulignent aussi l’ampleur de la tâche accomplie.
Le 1er anniversaire du cataclysme survenu le 26 décembre 2003 tombe samedi 25 et non dimanche selon le calendrier iranien. L’ajout d’une journée au calendrier occidental en cette année bissextile a causé un décalage.
Bam martyrisée se recueille samedi sur les tombes de ses 30.000 morts
-