Les Echos, 21 novembre 2008 – Confronté à de sérieux problèmes budgétaires en raison de l’effondrement de ses recettes pétrolières, Téhéran redouble d’efforts pour contourner les sanctions internationales.
L’Iran se débat dans des difficultés financières de plus en plus inextricables. Le vice-ministre du Pétrole, Akbar Torkan, a reconnu il y a quelques jours qu’il manquait 5 milliards de dollars pour régler les importations de carburants de l’exercice en cours, qui s’achève en mars prochain. Le pays a beau être le quatrième exportateur mondial d’or noir, il importe, faute d’investissements dans le raffinage, l’essentiel de son essence. Cette dernière est vendue à un prix dérisoire afin de soutenir le pouvoir d’achat des ménages, grâce à des subventions pour lesquelles Téhéran avait initialement budgété 3,3 milliards de dollars mais qui devraient lui coûter finalement 8 milliards.
Ce surcoût s’ajoute aux dépenses exceptionnelles qu’impose la crise financière mondiale. Le régime aurait ainsi dépensé 10 milliards de dollars en octobre pour stabiliser son système bancaire. Et le poste budgétaire des subventions aux produits alimentaires flambe, alors que l’inflation dépasse 30 %. Et les recettes pétrolières, qui représentent 85 % des revenus à l’exportation et l’essentiel des rentrées fiscales de l’Etat, fondent rapidement. Le prix auquel Téhéran vend officiellement son or noir a été divisé par 2,5 depuis le record de l’été dernier. Certes, à 50 dollars le baril, il est toujours dans la moyenne constatée ces dernières années, mais se situe en dessous de l’hypothèse de 65 dollars sur laquelle le budget 2008-2009 aurait été établi. Le gouverneur de la banque centrale a évalué récemment à 54 milliards de dollars la chute des revenus pétroliers cette année par rapport à ce qui était espéré.
Contourner les sanctions
Confronté, en outre, à des sanctions internationales du fait de son programme nucléaire qui l’obligent à recourir à des circuits de financements longs et coûteux, le régime redouble d’efforts pour sortir de son isolement. Non sans succès. Ankara a signé lundi un accord prévoyant des investissements turcs de 12 milliards de dollars pour le développement de champs gaziers iraniens offshore, à South Pars, ainsi que la construction d’un gazoduc de 1.850 kilomètres pour acheminer du gaz iranien et turkmène en Europe occidentale. Téhéran s’efforce aussi d’améliorer ses relations économiques avec les pays européens.
De source généralement bien informée à Téhéran, on indique que le Conseil suprême de sécurité nationale a décidé il y a quelques mois qu’il fallait développer des contacts systématiques avec d’anciens dirigeants suisses, autrichiens, italiens ou allemands, notamment, pour trouver les moyens de contourner les sanctions internationales. Ces dernières interdisent les opérations commerciales avec des entités du complexe nucléaire iranien et certaines organisations, dont les Gardiens de la révolution.
Le Conseil suprême a salué récemment la signature d’un accord secret pour la fourniture de pièces détachées d’un constructeur européen à Iran Khodro, le numéro un iranien de l’automobile, déjà partenaire de Renault et de PSA en France. Et une entreprise publique, qui aurait des liens avec les Gardiens de la révolution.
YVES BOURDILLON