The New York Times, Washington, 11 janvier Par Helene Cooper et Mark Mazzetti En sengageant à empêcher lIran dintervenir en Irak, le président Bush est revenue mercredi soir à une stratégie de confrontation avec Téhéran, mettant ainsi de côté une approche qui flirtait légèrement avec la diplomatie.
M. Bush a accusé lIran de fournir un soutien matériel dans les attaques menées contre les troupes américaines et a juré de réagir. « Nous allons mettre un terme aux attaques contre nos forces », a-t-il dit dans son discours. « Nous allons traquer et anéantir les réseaux qui fournissent de larmement sophistiqué et de lentraînement à nos ennemis en Irak. »
M. Bush a annoncé que les États-Unis enverraient un autre porte-avions et des navires de renfort dans le Golfe Persique. Les hauts responsables du gouvernement ont précisé que ce groupe de bataille serait stationné à une distance de navigation proche de lIran, en réponse aux inquiétudes croissantes autour du fait que lIran développe sa propre capacité de missiles et sa puissance navale dans le but de dominer militairement le Golfe.
M. Bush a également annoncé le déploiement de missiles Patriot pour protéger les alliés de lAmérique dans le Golfe. Une batterie de missiles de ce type se trouve déjà au Qatar, envoyée il y a plusieurs mois. Ce discours plus combatif reflète la frustration croissante du gouvernement face à lIran, accusé par les Américains dalourdir le bilan des victimes en Irak.
Les hauts officiers militaires à Bagdad disent avoir relevé une augmentation graduelle du nombre de bombes de bord de route sophistiquées utilisant des « charges façonnées », armes qui seraient importées dIran, selon les commandants. Daprès les statistiques militaires, 78 soldats de la coalition ont été tués et 243 ont été blessés par ces bombes entre septembre et décembre de lannée dernière, alors que 53 personnes sont décédées les neuf mois précédents à cause de ces bombes.
Les officiels américains ont présenté des informations aux membres du Congrès confirmant que lIran participe aux attaques contre les Américains en Irak ; cependant ladministration na pas rendu cette information publique.
Les Américains affirment que la Force Qods des Gardiens de la Révolution forme des hommes sur le territoire iranien avant de les envoyer en Irak et quelle se sert de ses relations avec les milices chiites irakiennes pour attaquer les troupes américaines.
« Ils entraînent des hommes pour tuer les forces de la coalition », a déclaré un haut responsable du contre-terrorisme américain, sous couvert de lanonymat. « Ces activités démentent leurs propos sur leur désir de voir un Irak stable. »
Le général Michael V. Hayden, directeur de la CIA (Central Intelligence Agency), a déclaré devant le Congrès à la fin de lannée dernière quil était autrefois sceptique quant aux informations sur des opérations iraniennes à lintérieur de lIrak, mais quil était désormais « absolument convaincu » de cette réalité.
Un haut responsable américain de retour de Bagdad a rapporté que les commandants américains en Irak estimaient que lIran se servait de son influence politique étendue pour faire pression sur les dirigeants
politiques chiites et les persuader de ne conclure aucune alliance à long terme avec les sunnites.
« Nous les avons pris sur le fait le mois dernier », a déclaré un haut membre de ladministration, en référence à larrestation de cinq Iraniens en Irak que les Américains ont accusés de passer des armes en contrebande et de planifier des attaques sectaires. Les autorités irakiennes ont finalement libéré les Iraniens.
Toutefois, les Américains soutiennent que ces dernières mesures ne doivent pas être considérées comme des préparatifs à une attaque militaire contre lIran. Ils ont avancé également que les hauts conseillers de M. Bush, tels que la secrétaire dÉtat Condoleezza Rice et le haut responsable de la Sécurité nationale Stephen J. Hadley, estimaient que les efforts américains pour coopérer avec lIran avaient suivi leur cours.
Les USA sont consternés face aux propos dun haut responsable du gouvernement qui a qualifié les efforts diplomatiques des Nations Unies de « mollasses » à imposer des sanctions étendues contre lIran et son programme nucléaire.
Le Conseil de sécurité a adopté le 23 décembre une résolution imposant des sanctions et visant à freiner le programme denrichissement duranium de lIran, que le pays dit pacifique, alors que les États-Unis et certaines nations européennes avancent quil est destiné à produire des armes nucléaires. Cette mesure interdit le commerce de matériels et de technologie liés au programme nucléaire de lIran.
Mais les dirigeants américains reconnaissent que cette résolution nest pas suffisante pour forcer lIran à abandonner son programme nucléaire et cherchent de leur côté à augmenter la pression économique et psychologique sur lIran. Les USA recommandent vivement aux gouvernements et aux institutions financières en Europe, au Japon et en Chine de rompre leurs liens financiers avec le pays.
Par exemple, lors de pourparlers la semaine dernière entre Mme Rice et le vice-ministre des Affaires étrangères chinois, Yang Jiechi, en visite à Washington, les dirigeants américains ont vivement conseillé à Pékin dabandonner le contrat dune valeur de 16 milliards de dollars entre la China National Offshore Oil Corporation et lIran pour lexploitation du champ de gaz naturel de North Pars en Iran. Les Chinois ont assuré aux États-Unis que leur décision nétait pas imminente, ont rapporté les
Américains.
Dans les prochains jours, M. Bush va tenter de convaincre dautres pays de limiter leurs transactions avec lIran. Les hauts responsables américains espèrent que la pression économique permettra de persuader lIran de ne pas sopposer activement à la nouvelle stratégie de Bush en Irak.