AFP: Par Nicolas CHEVIRON – Plusieurs blessés syriens venus se faire soigner en Turquie affirment avoir été les victimes de soldats iraniens participant à la répression de la contestation contre le président Bachar al-Assad.
Les faits remontent au 20 mai, pendant la « semaine de la liberté », durement réprimée par les forces de sécurité à Idlib, une ville du nord-ouest de la Syrie.
« Le vendredi, à la sortie de la mosquée, nous manifestions en criant des slogans comme +A bas le régime+. Les forces de sécurité ont bloqué les accès de la ville et ils nous ont tiré dessus », relate Mustafa, 23 ans, vendeur de métaux, blessé par balle à la jambe gauche et au bras gauche, qui est soigné dans un hôpital d’Antakya (sud de la Turquie).
« Il y avait des policiers en civil, mais aussi des soldats iraniens », poursuit le jeune homme. « Je les ai vus de mes propres yeux: la veille, on leur avait demandé de ne pas nous attaquer, mais ils ne parlaient pas l’arabe ».
« Ils portaient la barbe, alors que dans l’armée syrienne, c’est interdit », ajoute le commerçant, évoquant également un uniforme noir inconnu en Syrie.
Akram, un étudiant de 17 ans rencontré dans un deuxième hôpital d’Antakya, dresse le même portrait d' »hommes en noir » qui ont tiré sur les habitants de son village proche d’Idlib.
« Il s’agissait surtout de snipers. Ils ne parlaient pas l’arabe. En plus, ils avaient des armes d’un modèle que nous ne connaissions pas », explique le jeune homme, atteint à la jambe gauche par une balle explosive.
Pour lui, l’identité de ces tireurs ne fait pas de doute: « Ce sont des Iraniens, des Bassidjis », s’exclame-t-il.
Les Bassidjis dépendent des Gardiens de la Révolution (Pasdaran), bras armé du régime iranien, qui double l’armée régulière.
Velit, un étudiant de 23 ans venu d’un autre village proche d’Idlib, est plus circonspect.
« Je ne peux pas dire avec certitude qu’ils étaient iraniens, mais ce qui est sûr, c’est qu’ils n’étaient pas Syriens », déclare le blessé, touché à la jambe droite.
Ce n’étaient pas non plus des « chabiha », des miliciens syriens parfois vêtus d’uniformes noirs, précise-t-il, ajoutant: « Ceux-là, on les connaît ».
Les assaillants croisés par Velit « portaient des uniformes noirs, des chaussures blanches, de longues barbes et des crânes rasés », selon la description donnée par l’étudiant.
« J’en ai vu sept ou huit pendant que je ramassais des blessés. Ce sont eux et les policiers en civil qui tiraient, les soldats syriens restaient en arrière », poursuit-il. « C’étaient des gars très grands, très costauds. Ils avaient des fusils à viseur ».
La confirmation de ces déclarations est rendue difficile par l’impossibilité pour les journalistes de se déplacer en Syrie.
Dans un article publié fin mai, le Washington Post, citant des responsables américains non identifiés, a rapporté que l’Iran était en train d’envoyer des instructeurs et des conseillers en Syrie pour aider le régime à mater les manifestations qui menacent son principal allié dans la région.
Des officiers de la force al-Qods, une unité d’élite des Pasdaran, ont joué un rôle clé dans la répression en Syrie depuis mi-avril, a affirmé le journal.
La presse a également évoqué la présence de miliciens du Hezbollah libanais en Syrie, sans confirmation.
Mardi, devant le parlement anglais, le ministre britannique des Affaires étrangères William Hague a condamné le rôle de l’Iran en Syrie.
« L’Iran combine une suppression brutale des dirigeants de l’opposition chez lui à l’octroi d’équipement et de soutien technique pour aider le régime syrien à écraser les protestations en Syrie. C’est inadmissible », a-t-il déclaré.
Téhéran a vigoureusement démenti jeudi toute implication en Syrie.