Iran Focus, Téhéran, 22 juin Les propos tenus récemment par le candidat battu Mehdi Karroubi et sa décision de rendre publiques des informations sur le bourrage des urnes, ont mis la nomenclature religieuse dans une colère noire, notamment le guide suprême Khameneï.
Des informations venant de Téhéran indiquent que des membres de la milice paramilitaire du Bassidj ont attaqué le domicile de Karroubi et lont menacé den faire le siège. Une kyrielle dinstitutions militaires et politiques proches de Khameneï, ont publié des communiqués dénonçant « linitiative de ce religieux qui ne fait quaider les ennemis de la République islamique ».
Karroubi a accusé les assaillants dêtre des agents de la faction rivale, conduite par Khameneï. « Ces mêmes personnes qui ont pu créer systématiquement des bulletins et prolonger les heures de votes pour que durant les espaces creux chaque personne puissent voter dix fois, sont les mêmes personnes qui répandent ces rumeurs », a-t-il dit.
Karroubi qui a été pendant longtemps un proche confident de layatollah Khomeiny et deux fois président du parlement, a toujours été considéré comme un homme du sérail par les puissants ayatollahs qui détiennent les leviers du pouvoir en Iran. Quand il était au perchoir, certains alliés de Khatami lont accusé dêtre « la voix de son maître », Khameneï, après sa défense vigoureuse du bureau et de lautorité indiscutable du guide suprême.
Mais dans un signe révélant les fissures dans la hiérarchie religieuse sous les pressions politiques et sociales croissantes, Karroubi a réagi avec une colère inattendue aux résultats du premier tour. Cest la première fois quune haute autorité iranienne déclare que « chaque personne a pu voter dix fois », reconnaissant de la sorte que la théocratique opère des fraudes électorales par le moyen de votes multiples de mêmes individus.
Le ministère de lintérieur a fixé le taux de participation à 62%, un chiffre qui avait été « prédit » par Khameneï, alors que le groupe dopposition des Moudjahidine du peuple (OMPI), par le biais dobservateurs clandestins dans 15.000 bureaux de vote à travers le pays, parlent de 10% de participation.
Les allégations de Karroubi et une déclaration similaire du principal syndicat étudiant du pays, renforcent la thèse de lopposition comme quoi une grande majorité dIraniens sont restés éloignés des urnes vendredi.
Dans une lettre ouverte à Khameneï dimanche, lancien président du parlement a accusé le corps des gardiens de la révolution, la milice du Bassidj et les autorités gouvernementales davoir entrepris « certaines actions » pour bourrer les urnes.
Karroubi a dit quil sétait plaint au ministre de lintérieur Moussavi-Lari dinnombrables infractions après la fin du vote à 21h00, ajoutant que la réponse du ministre avait été : « Ce que vous dites est vrai, mais jaurais préféré ne pas être soumis à des pressions ».
Il a accusé le Conseil des gardiens, le plus haut organe de censure de lestablishment religieux, dêtre un «instrument dans les mains de quelques organisations complexes » et dêtre coupable de soutenir un mouvement idéologique particulier. « Je proteste contre lattitude du Conseil des Gardiens et du corps des gardiens de la révolution. Sil avait pu le faire, le Conseil des Gardiens aurait dit que Ahmadinejad aurait dû être élu sans élection. »
Il a poursuivi en ajoutant que les votes avaient été trafiqués dans des villes comme Téhéran, Qom, Machad et Ispahan.
« La nuit du vote jai remarqué, alors que jétais bien devant les autres candidats au tout début, que tout à coup on a annoncé que les voix dun candidat avaient augmenté dun million, et jen ai été très surpris. »
« De grandes sommes dargent ont changé de main, a ajouté Karroubi » durant les élections, et « des événements étranges ont eu lieu dans certaines villes du pays. »
« Notre requête auprès du Guide suprême est denquêter dans ce domaines. Il nest pas possible quun inconnu reçoivent [le plus grand nombre de »> votes. Tout ceci avait été préparé à lavance et cela a été fait par les centres du pouvoir. Nous devons montrer que les commandants des gardiens de la révolution ont fait des discours dans de nombreux endroits pour un candidat en particulier », a précisé Karroubi.