IranIran (actualité)Bush : Après l'Irak, l'Iran ?

Bush : Après l’Irak, l’Iran ?

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Intimidation ou préparatifs de frappe ?

Le Nouvel Obs Hebdo, 25 janvier – Par Vincent Jauvert – Le président américain a affirmé à Jacques Chirac que, dans le dossier iranien, il privilégiait toujours la diplomatie. Pourtant, les indices de préparatifs guerriers contre la République islamique se multiplient…

John Rockefeller est l’un des hommes les mieux informés des Etats-Unis. Dans son bureau défilent les principaux responsables américains, civils et militaires. Président de la puissante commission du Sénat sur le renseignement, il a accès à la plupart des documents top secret produits par l’administration Bush. D’ordinaire, ce sénateur démocrate est peu loquace. Pourtant, vendredi dernier, il a cru bon de se confier au « New York Times ». Car il est très préoccupé par les plans de la Maison-Blanche concernant l’Iran. «Pour être honnête, a-t-il dit, je crains que ce ne soit un Irak bis.»

Il n’est pas le seul. La semaine passée, plusieurs leaders démocrates ont tiré la même sonnette d’alarme : selon eux, la Maison-Blanche serait secrètement en train de préparer l’Amérique à une guerre contre la République islamique. Beaucoup de spécialistes partagent leurs inquiétudes. Ancien professeur à l’Académie militaire des Etats-Unis, le colonel Gardiner suit de près le déploiement de forces américaines vers le golfe Persique. Il explique : «Il y a aura bientôt deux porte-avions sur zone : l’«USS Eisenhower», qui est arrivé il y a quelques semaines, et l’«USS Stennis», qui a appareillé le 16 janvier.» Or chaque fois que l’Amérique a déplacé deux porte-avions dans la région, il y a eu des bombardements.

Il y a d’autres indices de préparatifs guerriers contre l’Iran. Lorsque, début janvier, il a présenté son nouveau plan de bataille en Irak, George Bush a annoncé que l’Amérique allait déployer des batteries antimissiles Patriot dans des pays de la région – probablement les Etats du Golfe. «Pourquoi fait-il cela? Quel rapport avec la guerre en Irak? demande Trita Parsi, spécialiste des relations américano-iraniennes à Washington. Les insurgés irakiens n’ont pas de missiles balistiques, alors à quoi bon installer des batteries antimissiles? Je ne vois qu’une seule raison : l’année dernière, les responsables iraniens ont fait savoir aux Etats du Golfe que si l’Amérique attaquait l’Iran à partir de leur territoire, la République islamique riposterait contre eux. Washington veut donc les protéger contre une telle riposte. La preuve qu’une attaque est sérieusement envisagée…»

Ce n’est pas tout. George Bush vient de nommer l’amiral Fallon commandant des forces américaines de la région Europe-Moyen-Orient. Pourquoi un amiral à un tel poste alors que la guerre en Irak est terrestre ? Plusieurs spécialistes y voient un signe patent que les porte-avions vont bientôt entrer en action contre l’Iran. Les mêmes observateurs constatent que le nombre de sous-marins américains croisant dans le Golfe a augmenté à un point tel que les accidents avec des bateaux civils se multiplient. Ils remarquent aussi qu’après trois ans de fonctionnement au ralenti la base aérienne américaine d’Incirlik, en Turquie, proche de l’Iran, tourne désormais à plein régime et que plusieurs F-16 y sont de nouveau stationnés. Ils ajoutent que les F-16 peuvent embarquer les minibombes atomiques B61-11, dites « bunker busters », c’est-à-dire capables de détruire des bunkers – et donc les installations nucléaires que l’Iran cacherait sous terre.

La Maison-Blanche laisse entendre que tout cela n’est que gesticulation, que tous ces préparatifs n’ont pas d’autres buts que d’intimider l’Iran, de contraindre Téhéran à ne plus soutenir les milices chiites en Irak et à se montrer plus souple sur le dossier nucléaire. A l’Elysée, on dit croire à cette version. «En septembre, George Bush a répété à Jacques Chirac que, dans le dossier iranien, ce n’était pas la voie militaire qu’il privilégiait mais la diplomatie, explique un conseiller du président français. Nous pensons qu’il est toujours sur la même ligne.» Un grand nombre d’hommes politiques américains, y compris des républicains, ne sont pas aussi optimistes. Ils pensent que, malgré le bourbier irakien ou peut-être à cause de lui, George Bush a décidé d’en finir avec la « menace iranienne », seul ou avec Israël ; qu’il veut rester dans l’Histoire comme celui qui a débarrassé l’Occident du diable Ahmadinejad. Alarmés par les bruits de bottes, plusieurs sénateurs cherchent comment empêcher un tel scénario catastrophe. Certains entendent même faire adopter une loi interdisant au président d’engager une guerre nucléaire contre l’Iran sans l’aval du Congrès. Et ils veulent agir vite.

Car le temps presse. «Les préparatifs militaires seront terminés fin février», explique le colonel Gardiner. Et ce timing ne doit rien au hasard. Plusieurs casus belli se présenteront à ce moment-là. Un, le délai imparti à l’Iran pour exécuter la résolution 1737 du Conseil de Sécurité viendra à échéance. Deux, la Russie livrera le combustible nucléaire pour la centrale de Busher – qui pourrait, après utilisation, servir à fabriquer une arme atomique. Enfin, Ahmadinejad annoncera probablement que les 3 000 centrifugeuses de Natanz ont commencé à enrichir de l’uranium : un point de non-retour dans la course à la bombe, affirment les faucons israéliens et les néoconservateurs proches de Bush, qui brûlent d’en découdre.

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