L’Est Républicain, 28 juin – Par Sébastien MICHAUX – L’accord portant sur le gel par Téhéran de l’enrichissement de l’uranium devient de plus en plus hypothétique.
Voilà des mois que l’Allemagne, la France et la Grande-Bretagne mènent d’âpres négociations avec Téhéran, suspecté de vouloir se doter de l’arme atomique. Objectif : obtenir de l’Iran le gel de l’enrichissement de l’uranium. En échange de quoi, l’Union européenne s’engage à développer la coopération commerciale, technologique et politique avec la République islamique. Sauf que l’arrivée à la présidence iranienne de l’ultra conservateur Mahmoud Ahmadinejad remet bien des choses en cause. Lui qui critiquait vivement la position de ses compatriotes négociateurs dans cet épineux dossier nucléaire va certainement les contraindre à plus d’intransigeance vis-à-vis de leurs homologues européens.
Alors, à quelques semaines d’une nouvelle rencontre, « je serais surpris que l’Iran accepte les propositions européennes », analyse Bruno Tertrais. Pour ce spécialiste de la Fondation pour la recherche stratégique, le « risque d’un pas en arrière » dans cette longue marche en vue d’obtenir de Téhéran qu’il renonce à une partie de son programme nucléaire ne fait aucun doute.
Signataire du Traité de non-prolifération des armes nucléaires (TNP), l’Iran s’est vu ainsi octroyer le « droit inaliénable » d’utiliser le nucléaire comme source d’énergie pacifique.
Or, comme le dit Bruno Tertrais, de « très forts soupçons » portent sur la volonté de Téhéran à se doter de l’arme atomique. De fait, L’Union européenne cherche un accord pour éviter la violation du TNP par l’Iran. « J’étais pessimiste avant l’élection, je le suis encore plus aujourd’hui », s’inquiète l’expert. Car, indéniablement, si l’ancien président réformateur Khatami pouvait s’opposer au Guide Suprême Ali Khamenei sur ce dossier, on peut penser que son successeur va clairement durcir sa position et embrasser la position de l’Ayatollah, le détenteur du pouvoir en Iran.
De là à penser que les durs qui détiennent dorénavant tous les leviers du régime voudront retirer l’Iran du TNP, il n’y a qu’un pas. Qu’il ne faut cependant pas franchir selon Bruno Tertrais. « Ce risque a toujours existé », explique-t-il, « ce serait un choix extrême, une fuite en avant ». Amenant des sanctions à l’égard de la République islamique. « Sanctions nationales coordonnées », privilégie le spécialiste en questions nucléaires. Alors non, à ses yeux, cette possibilité « n’est pas plus forte aujourd’hui qu’il y a une semaine ». Les risques, pour autant, en matière de course à l’arme atomique, demeurent réels aux yeux des Moudjahidin du peuple, principal mouvement d’opposition aux mollahs. Qui, en 2002, avaient révélé l’existence de sites secrets. Lesquels avaient alors échappé à la vigilance de l’Agence internationale de l’énergie atomique…