Pour la deuxième journée consécutive jeudi, l’Iran a tiré des missiles à longue et moyenne portées dans le cadre d’un exercice militaire dans le Golfe arabo-persique. Une nouvelle version du "Shahab-3", qui avec une portée de 2.000km est capable d’atteindre Israël, a notamment été testée.
Téhéran avait déjà tiré neuf missiles à longue et moyenne portées mercredi dans les mêmes conditions, afin de montrer sa capacité à répondre à une attaque américaine ou israélienne. Ces démonstrations de force surviennent après un exercice militaire mené conjointement par Israël et la Grèce le mois dernier en Méditerranée, que beaucoup ont interprété comme une mise en garde adressée à l’Iran.
Les Etats-Unis voient dans ces tirs une raison supplémentaire de se méfier d’un régime déjà accusé par Washington de fomenter des troubles en Irak, de soutenir les ennemis d’Israël et de vouloir se doter de l’arme atomique.
Pourtant, le président américain George W. Bush et son homologue iranien Mahmoud Ahmadinejad ont tenté en début de semaine de minorer les risques de conflit militaire entre leur pays. En fin de mandat, le chef de la Maison Blanche ne cesse de répéter qu’il privilégie la diplomatie dans le dossier du nucléaire iranien, même s’il refuse d’exclure l’option du recours à la force.
De son côté, Mahmoud Ahmadinejad a qualifié mardi de "plaisanterie amusante" les spéculations sur une éventuelle guerre avec les Etats-Unis. "Je peux vous assurer qu’il n’y aura pas de guerre", a-t-il déclaré au cours d’une visite en Malaisie.
Reste que le menace d’un conflit semble loin d’être écartée, et ce pour plusieurs raisons. D’abord, les autorités américaines ont du mal à discerner les motivations réelles du régime des mollahs, divisé entre conservateurs et modérés. Certains dirigeants iraniens pourraient vouloir la paix, et pas d’autres, explique-t-on à Washington.
Alors qu’Ahmadinejad adopte un ton mesuré à l’égard des Etats-Unis, d’autres à Téhéran brandissent le spectre de représailles en cas d’attaque américaine ou israélienne contre les sites nucléaires iraniens. Ils menacent de frapper Israël et les bases américaines dans la région avec des missiles et d’interrompre le transport du pétrole dans la zone stratégique du Golfe.
Les tests de missiles "démontrent notre détermination et notre force contre les ennemis qui ces dernières semaines ont menacé l’Iran avec des mots durs", a déclaré le général Hossein Salami, commandant des unités aériennes du corps d’élite des Gardiens de la Révolution, cité par les médias officiels. "Nos missiles sont prêts à être lancés".
De son côté, le pouvoir iranien pourrait aussi être dans le doute quant aux intentions américaines. Si le président Bush, le secrétaire à la Défense Robert Gates ou la secrétaire d’Etat Condoleezza Rice mettent l’accent sur la diplomatie, d’autres membres de l’administration américaine, à commencer par le vice-président Dick Cheney, ont une rhétorique plus belliqueuse, similaire à celle des autorités israéliennes.
L’Iran pourrait aussi adapter sa stratégie en fonction de la position présumée du futur président américain. Les deux prétendants républicain et démocrate à la Maison Blanche, John McCain et Barack Obama, conviennent que l’Iran représente une menace. Mais ils sont en désaccord sur la manière d’y répondre.
M. Obama estime que les tests de missiles iraniens montrent la nécessité d’une diplomatie directe avec Téhéran, alors que M. McCain met l’accent, à l’instar de l’administration Bush, sur un renforcement des sanctions.
Certains analystes pensent pourtant que le président Bush agira militairement contre l’Iran avant la fin de son mandat en janvier 2009. Et s’il ne le fait pas, McCain s’en chargera, à condition bien sûr qu’il soit élu, ajoutent-ils.
John Pike, directeur de GlobalSecurity.org, cabinet-conseil spécialisé dans la défense et la sécurité, est l’un d’eux. "Bombarder (l’Iran) sera soit la dernière chose fera que M. Bush soit la première que fera M. McCain", prédit-il. AP