L’Express: Par Christian Makarian – S’il est impossible de prédire l’avenir du régime, une chose est sûre, le peuple iranien agit en pleine souveraineté, seul décideur de son avenir.
Il serait pour le moins audacieux de se risquer à une prophétie sur l’avenir d’un régime dont les fondements sont ceux du Prophète. Mais il est flagrant qu’à l’heure de son 31e anniversaire la République islamique d’Iran apparaît plus mal en point que jamais. Dans une confusion certaine, les tenants de la république légaliste et les partisans du système islamiste s’affrontent ouvertement, dans une lutte pour l’instant inégale. Coupure profonde, qui se traduit par un accroissement de la répression et éloigne de jour en jour, au rythme des assassinats et des exécutions, toute idée d’apaisement ou de réconciliation.
Il y a un an à peine, lors des cérémonies du trentenaire de l’accession au pouvoir de l’ayatollah Khomeini, un tel déchirement interne n’était guère envisageable. Le monolithe perse n’offrait aucune prise. Il n’en offre pas davantage aujourd’hui, mais, depuis le scrutin présidentiel truqué du mois de juin 2009, l’Iran est redevenu, comme à la fin des années 1970, le pays face auquel le monde retient son souffle, la nation dont le basculement virtuel engendre un suspense global.
La course au nucléaire ne retient en rien les contestataires
La question, désormais, est autant de savoir comment faire pression sur les apprentis sorciers de Téhéran, afin de stopper leur délire atomique, que de trouver la bonne stratégie, l’attitude juste, pour aider l’opposition à l’emporter. Dans ce ciselage plutôt fin, une donnée est essentielle: la course au nucléaire, présentée comme une grande cause nationale, ne retient en rien les contestataires, pas plus qu’elle ne soude l’opinion autour du pouvoir. Du point de vue occidental, on est passé d’une dimension uniquement extérieure à de nécessaires calculs intérieurs, ce qui complique le jeu tout en rebattant les cartes et ménage l’éventualité d’une issue inattendue.
Même s’il faut se garder d’aller trop vite en besogne et de fantasmer sur le crépuscule des mollahs, on est en droit de se demander quel effet produirait un renversement du régime à Téhéran. Ce serait tout simplement la première fois qu’une théocratie islamique "modèle" serait vaincue par une aspiration plus démocratique; bref, une nouvelle révolution – qui ferait tache d’huile? Quel que soit le scénario à venir, le peuple iranien agit encore une fois en pleine souveraineté, seul décideur de son avenir, sans le recours à aucune influence étrangère. Le propre d’une grande nation.
source: http://www.lexpress.fr/actualite/monde/proche-orient/imprevisible-teheran_840352.html